DECISION DU COMMISSAIRE
Article 2 de la Loi sur les brevets: Méthode de traitement des données
diagraphiques - programmes machine
La demande de brevet a trait à une méthode de traitement des données diagraphiques
à l'aide de programmes machine. L'es revendications ont été rejetées parce qu'elles
portaient sur un objet non visé par la loi aux termes de l'article 2 de la Loi
sur les brevets. Il a été décidé que les programmes machine, sous quelque forme
que ce soit ne sont pas brevetables lorsque l'innovation ne réside que dans le
programme ou l'algorithme.
Décision finale: Confirmée
Cette décision a trait à une demande de révision, par le commissaire des brevets,
de la décision finale de l'examinateur rendue le 13 août 1975 pour ce qui a
trait à la demande de brevet 104,311 (catégorie 349-6). Cette demande a été
déposée le 2 février 1971, au nom de Christian M. Clavier sous l'appellation
"Méthode de traitement des données diagraphiques". La Commission d'appel des
brevets a tenu une audience le 7 septembre 1977 au cours de laquelle M. D. Hill
et M. V. Marston représentaient le demandeur. Assistaient également à cette
audience M. B. Carpenter, de la société Schlumberger, Ltd., des Etats-Unis.
Cette demande porte sur des méthodes de traitement de données diagraphiques qui
comprennent l'extraction de mesures d'un certain nombre de paramètres ayant trait
au sous-sol et de les combiner d'une façon nouvelle pour permettre l'interpréta-
tion des données concernant les couches d'argile ou de sable argileux. Ces
mesures sont prises à l'aide d'un appareil qu'on enfonce dans un trou de sonde
destiné à permettre l'analyse des couches du sous-sol. Elles sont ensuite com-
binées de façon à produire des données utilisables.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté la demande de brevet parce qu'elle
portait sur un objet non visé par la loi, aux termes des articles 2 et 28(3) de
la Loi sur les brevets. "Il indiquait également ce qui suit:" (Extrait partiel)
L'objet d'une invention qui est un programme machine dont
les résultats obtenus à la suite de son exécution par un
ordinateur universel ne sont que des données n'est pas
brevetable. Cet objet n'est que le fruit des aptitudes d'un
programmeur. En d'autres termes, le programme est élaboré
sans qu'il soit fait référence à des appareils particuliers
comme des registres à décalage, des circuits et, etc. qui
composent l'ordinateur. L'élaboration de ce programme ne
fait appel qu'aux connaissances du programmeur qui se con-
centre entièrement sur la manipulation des données en respectant
les contraintes du langage de programmation qu'il utilise. Ceci
diffère de l'objet issu de l'application de connaissances
techniques à un ordinateur considéré comme un assemblage d'élé-
ments dont les propriétés sont utilisées pour trouver un usage
nouveau pour cet appareil afin d'obtenir un résultat inattendu
pouvant faire l'objet d'un brevet.
Le résultat des connaissances d'un programmeur consiste en un
ordinogramme et en une série d'instructions qui peuvent être
traités par un programme de traduction et transformés en
instructions machine qui permettent de commander un ordinateur
universel donné. Le résultat de l'effort du programmeur en
FORTRAN ou en COBOL et les ordinogrammes qui en résultent peuvent
être traités par des programmes traducteurs différents et produire
divers programmes machine plus ou moins évolués exécutables par
des ordinateurs composés de différents éléments de matériel. Il
est clair, par conséquent, qu'un programmeur n'utilise pas ses
connaissances pour créer des façons nouvelles d'exploiter cer-
tains appareils. Au contraire, il élabore un algorithme, en
Fortran ou Cobol, sans faire référence à aucun appareil parti-
culier.
L'objet de l'invention n'est pas considéré brevetable. A la page
8 de sa divulgation, le demandeur indique que ce qui suit: "le
ruban magnétique qui en résulte (sur lequel sont enregistrées les
données numériques obtenues conformément à des brevets cités aux
lignes 7 à 18 de la page 8) est transporté ou télétransmis à un
ordinateur numérique 27 qui est programmé conformément aux données
de la présente invention pour traiter les données. A la page 56,
lignes 3 et 4, le demandeur ajoute: "les figures 18 à 23 sont
des ordinogrammes représentant une application de l'invention".
Par conséquent, l'objet de la demande est un programme machine qu'on
exécute au moyen d'un ordinateur universel dans le simple but de
traiter des données numériques. Ceci découle de la divulgation dans
laquelle l'ordinateur n'est mentionné que par l'expression "ordina-
teur universel", et l'objet revendiqué est décrit en fonction
d'ordinogrammes qui sont le résultat des aptitudes du programmeur.
L'objet revendiqué qu'il s'agisse d'une méthode de traitement de
données exploitée au moyen d'une machine (revendications 1-44) ou
d'une méthode de transformation de signaux correspondant à des
données (revendication 45) n'est pas visé par la cinquième partie de
l'article 2 de la Loi sur les brevets, puisque le seul objet des
revendications est le programme machi-ne décrit dans la divulgation
sous forme d'ordinogramme de programmation.
Il est reconnu qu'un ordinateur programmé d'une certaine façon
constitue, d'une certaine façon, une machine différente du même
ordinateur programmé autrement. Toutefois, la décision Waldbaum
mentionnée à la page 3 de la lettre du demandeur datée du 17 avril
1975, indique ce qui suit au sujet des revendications 14 et 15:
"D'une part, la découverte qu'une chose connue peut être utilisée
dans un but utile pour laquelle elle n'était pas connue
auparavant ne constitue pas, en elle-même une invention
brevetable; d'autre part, la découverte qui consiste à
indiquer comment il faut utiliser cette chose dans un nouveau but
but constitue une invention brevetable, si le mode d'utili-
sation et non le but préaente le caractère de nouveauté."
Le fond de la revendication 14 accepté dans la demande
Waldbaum à laquelle le demandeur se réfère porte sur une
utilisation nouvelle d'un ordinateur. Comme on peut le
voir dans les pages 4 et 5 du cas Waldbaum (à présent brevet
canadien 909,386) le registre J qui était utilisé auparavant
pour mémoriser l'adresse d'une instruction est utilisé par
Waldbaum pour exécuter une opération de comptage. Par consé-
quent, le mode de fonctionnement d'un ordinateur a été modifié
et a permis une utilisation nouvelle; la deuxième condition
nécessaire pour qu'une invention soit brevetable est donc
remplie. Le demandeur ne mentionne pas d'application nouvelle
correspondante pour un ordinateur. Bien que tout programme
nouveau donne nécessairement lieu à une nouvelle utilisation
d'un ordinateur universel, il se peut que celle-ci ne résulte
pas de l'utilisation de connaissances techniques appliquées à
un ordinateur mais constitue simplement l'application de con-
naissances en matière de programmation, par lesquelles un
programmeur exprime un algorithme sous forme d'une série
d'instructions qui ne concernent que les règles qui régissent
l'utilisation d'un langage machine particulier.
Dans le paragraphe 2(1) de la page 3 de la lettre du mandataire
mentionnée ci-dessus, le demandeur affirme ce qui suit: "l'objet
revendiqué est une méthode informatique de traitement des données
diagraphiques et non une utilisation nouvelle d'un ordinateur".
La fonction principale d'un ordinateur est de traiter des données.
Le type des données n'a pas d'importance, le critère principal
étant que les données doivent pouvoir faire l'objet de traitements
mathématiques conformément au programme élaboré. Le fait d'inclure
la première étape qui consiste à obtenir des données d'entrée par
un processus bien connu ne distingue pas l'objet des revendica-
tions de l'utilisatin d'un ordinateur, puisque, principalement,
le résultat du traitement est, comme dans le cas d'un traitement
informatique, simplement une information.
En ce qui concerne le paragraphe 2(2), le demandeur semble
soutenir que sa "méthode la plus appropriée pour exploiter l'in-
vention pourrait bien être qualifiée d'utilisation nouvelle
brevetable d'un ordinateur universel programmable connu". D'après
la divulgation, il est évident que l'ordinateur universel utilisé
par le demandeur fonctionne normalement, c'est-à-dire que chacun
de ses éléments remplit normalement la fonction pour laquelle il
a été conçu. Par conséquent, la divulgation et les revendications
portent simplement sur un but nouveau et non sur un mode de
traitement nouveau.
On sait que le demandeur n'est requis que de divulguer entièrement
une seule application d'une invention. Toutefois, cette divulga-
tion doit porter sur un objet brevetable.
L'essentiel de l'objet revendiqué peut être exprimé sous
forme d'algorithme. Dans le "Vocabulary of Information
Processing" publié par l'American National Standard Institute,
un algorithme est défini comme étant: "un ensemble limité de
règles ou de procédés bien définis qui permettnet de résoudre
un problème en un nombre fini d'étapes."
Une fois la décision finale rendue, le demandeur a soumis environ 46 pages
d'arguments constituant plusieurs réponses, y compris les arguments écrits soumis
à l'audience. Il a également déposé les revendications supplémentaires 46 à 54
et les revendications X1 à X9 pour qu'elles soient étudiées. Dans sa réponse du
13 février 1976, le demandeur a indiqué les principaux arguments qu'il ferait
valoir pour démontrer le caractère brevetable de ses revendications; ce sont les
suivants:
a) Le commissaire des brevets a reconnu, dans l'affaire
Waldbaum (In re Waldbaum, The Patent Office Record,
Vol. 100, NÀ3, 18 janvier 1972), qu'un ordinateur
programmé d'une certaine façon constitue une machine
différente du même ordinateur programmé autrement et,
partant, un objet brevetable.
b) Que l'examinateur se trompe lorsqu'il affirme que l'objet
défini par les revendications peut être équitablement
caractérisé comme étant simplement un "programme machine".
c) Nous alléguerons respectueusement que la lecture, faite
par l'examinateur, de la décision Waldbaum restreint plus
que ne le justifient les faits énoncés dans la décision
restreint l'interprétation du principe qui doit en découler.
Plus particulièrement, nous soumettrons que, dans l'affaire
Waldbaum, il n'était pas question de changements de
structure apportés à un ordinateur et, qu'en fait, ces
différents éléments fonctionnent toujours de la manière
prévue lorsqu'on considere le fait que cet ordinateur
constitue un dispositif programmable.
d) L'invention du demandeur, telle qu'elle est revendiquée,
ne porte pas sur un programme machine en soi mais au
contraire constitue un processus ou méthode réels comprenant
une série d'étapes opérationnelles caractérisant l'exécu-
tion de ce processus ou de cette méthode, ces étapes étant
exécutées automatiquement par une machine qui peut être,
n'est pas nécessairement un ordinateur universel programmable.
e) L'interprétation du mot "ordinateur" ne doit pas désigner
une machine seulement avant qu'elle soit programmée parce que,
sans un programme, un tel "ordinateur" ne peut être utilisé.
Au contraire, le terme "ordinateur" doit, dans les présentes
circonstances, être interprété comme désignant un dispositif
qui a été conçu à l'origine pour effectuer une série d'étapes
spécifiée ou qui a été programmé à cet effet.
f) L'objet défini dans les revendications du demandeur
n'est pas un simple "principe scientifique ou théorème
abstrait" qui ne pourrait être breveté en vertu de
l'article 28(3). Au contraire, les revendications
portent sur un objet relatif au forage, qui a une
application pratique, dans un but utile, et qui peut
être considéré comme une "invention" au sens de l'article
2(d) de la Loi sur les brevets.
g) Le demandeur expliquera, comme il l'indique dans sa réponse
du 17 avril 1975, que, pour les besoins de la cause, un
appareil particulier a été mentionné dans sa demande parce
qu'une fois doté d'un programme englobant les principes
divulgués dans le mémoire descriptif (accompagné des
ordinogrammes explicatifs détaillés), un ordinateur uni-
versel ordinaire devient une machine réservée au processus
revendiqué et répond ainsi aux critères énoncés dans la
décision Waldbaum.
h) La divulgation des ordinogrammes et la description qui les
accompagne peuvent permettre, à une personne versée dans le
domaine, de construire un ordinateur spécialisé ou un
ordinateur universel capable de suivre les méthodes du
demandeur.
i) A l'appui des raisons énoncées ci-dessus, le demandeur se
réfèrera à la décision Waldbaum et aux cas qui y sont
mentionnés. Il fera également appel à une décision plus
récente du U.K. Patents Appeal Tribunal dans l'affaire
Burrough's Corporation (Perkins) Application (1974) R.P.C. 147.
Lors de l'audience, M. Hill a soutenu vigoureusement que les revendications
visaient bel et bien un objet brevetable. Il a fait une analyse détaillée
de la jurisprudence britannique pertinente et s'est appuyé en grande partie sur
elle pour justifier le bien-fondé de ses revendications. Le demandeur s'est
aussi fermement appuyé sur la "Décision Waldbaum" ci-dessus, rendue antérieure-
ment par le commissaire des brevets pour ce qui a trait aux programmes machine.
Dans le cas, il a été décidé que, lorsqu'il y a une invention,
1. les revendications visant un programme machine même ne sont
pas brevetables;
2. les revendications visant une nouvelle méthode de programmation
d'un ordinateur sont brevetables; et
3. les revendications visant un ordinateur programmé d'une nouvelle
minière sont brevetables.
A la lumière des récentes modifications de la loi régissant les brevets en
matière de programmes machine, nous pensons qu'il faut, à ce moment-ci, réévaluer
les conclusions ci-dessus. Il est en fait difficile de mettre fin aux incer-
titudes qui se sont manifestées depuis le cas Waldbaum, car ces questions ont
donné lieu à de nombreux litiges dans un grand nombre de pays, et les règlements
n'ont malheureusement pas toujours été uniformes.
Nous jugeons donc nécessaire d'apporter certaines explications d'ordre
général avant d'envisager le problème que nous avons à résoudre.
On peut définir un programme machine comme étant cette partie d'un système
informatique qui peut être écrite ou imprimée sur papier dans un langage source
alphanumérique, enregistrée magnétiquement sur bandes ou enregistrée sur cartes
perforées sous une forme acceptable par l'ordinateur. En d'autres termes, le
programme fournit les mots d'ordre au matériel informatique.
Pour notre propos, un ordinateur est un appareil qui est programmé pour exécu-
ter une série d'opérations précises, mais, généralement parlant, c'est le
matériel lui-même qui est habituellement désigné par les termes "ordinateur"
ou "équipement informatique".
De façon générale, un algorithme est un ensemble de règles ou de procédés
permettant de résoudre un problème grâce à un nombre limité d'opérations.
A notre avis, le programme lui-même ne peut être breveté pour la raison fonda-
mentale suivante: il s'apparente, par sa forme, à un imprimé ou à un dessin
et, si le caractère de nouveauté ne réside que dans la signification intellec-
tuelle de l'imprimé ou du dessin, il n'est pas brevetable. A ce sujet, nous
invoquons la demande de la British Petroleum Co. Ltd (voir l'Official Journal
of Patents, (1968)), dans laquelle il est déclaré: ".., le contenu intellectuel
d'une carte perforée (programme machine) est absolument non brevetable...".
En somme, toute demande type portant sur un programme pose des difficultés.
On y décrit un algorithme permettant de résoudre le problème; puis celui-ci est
converti en un programme informatique proprement dit; enfin, les revendications
sont formulées ou présentées dans un langage obscur afin d'écarter toute
objection visant à prouver que l'objet de la demande est un algorithme ou un
programme machine. Nous estimons qu'un algorithme et un programme machine
bien que leur élaboration soit difficile en soi, ne sont que le fruit des
aptitudes attendues d'un programmeur. Ils ne sont pas, par conséquent, breve-
tables. Poussant notre raisonnement encore plus loin, supposons qu'un program-
meur ait utilisé son talent créateur pour concevoir un programme précis non
évident. L'élément de nouveauté réside alors uniquement dans la signification
intellectuelle de l'imprimé et n'est pas, à notre avis, brevetable. Un grand
nombre d'objets exigeant une activité créatrice considérable ne sont tout
simplement pas visés par l'article 2 de la Loi sur les brevets.
A l'audience, M. Hill a déclaré n'avoir pas constaté que la jurisprudence
américaine sur ce sujet contenait "un avis clair dans un sens ou dans l'autre"
pour résoudre le problème qui nous est posé. Mais, étant donné que la décision
Waldbaum ci-dessus s'appuyait sur des décisions prises précédemment aux Etats-
Unis et que, surtout, l'article 2 de la Loi canadienne était similaire et
s'appuyait sur l'article 101 (Coder 35) correspondant de la United States Patent
Act, nous devrions, croyons-nous, en traiter à ce stade-ci.
Aux Etats-Unis, l'historique du traitement des programmes informatiques et des
algorithmes peut être retracée à travers de nombreuses décisions; mentionnons
les suivantes comme exemples.
1) En l'affaire Prater et Wei - (159 USPQ 583) 20 novembre 1968.
Les revendications définissant essentiellement un algorithme ont été
acceptées parce que la US/CCPA (Cour d'appel des Douanes et des
Brevets des Etats-Unis) a jugé que, puisque la loi n'exige pas qu'une
machine agisse sur des substances physiques pour être brevetable, il
ne convenait pas d'imposer pareille exigence au sujet d'en procédé.
La protection conférée par le brevet ne peut être refusée simplement
parce que la revendication portant sur le procédé pouvait être
comprise comme correspondant à un procédé exécuté mentalement au
moyen d'instruments comme un crayon et du papier. La Cour a jugé que,
pour autant qu'une suite d'étapes pouvant être exécutées sans interven-
tion humaine et appliquées à une technologie industrielle faisait
l'objet d'une divulgation, les revendications pouvaient être
acceptées même si elles correspondaient également à une méthode mentale.
(2) En l'affaire Prater et Wei (162 USPQ 541) 14 août 1969.
La US/CCPA a jugé que si des revendications portant sur des
appareils et des procédés sont suffisamment générales pour inclure
l'exploitation d'un ordinateur numérique universel programmé, elles
ne sont pas nécessairement non brevetables, une fois qu'un programme
a été chargé, un ordinateur universel devient un ordinateur
spécialisé qui, ainsi que le procédé selon lequel il est exploité,
peut être breveté à condition qu'il possède les caractéristiques
exigées de nouveauté, d'utilité et de non-évidence. La divulgation
d'un appareil qui exécute un procédé sans aucune intervention humaine
prouve que ce procédé n'entre pas dans la catégorie des "procédés
mentaux" exclus.
3) En l'affaire Bernhart et Fetter (163 USPQ 611) 20 novembre 1969.
La US/CCPA a jugé qu'une machine programmée de façon nouvelle et non
évidente est physiquement différente de la même machine non programmée.
Il est faux de décider que, si le caractère de nouveauté est véhiculé
par une expression qui n'existe pas dans une classe prévue par la
Loi, l'invention entière n'est pas brevetable parce que tout le reste
est ancien. La Cour ne peut rejeter des brevets portant sur des
machines simplement parce que leur nouveauté peut être expliquée en
fonction de lois mathématiques et physiques.
4) En l'affaire Benson et Tabbot (169 USPQ 548) 6 mai 1971.
Le US/CCPA a rejeté l'affirmation selon laquelle une méthode de
traitement des données n'est pas brevetable puisque l'ordinateur
programmable n'est qu'un outil de l'esprit et que la méthode a,
fondamentalement, un caractère "mental". Une méthode de traitement
des données n'est pas considérée comme "non prévue par la Loi" si elle
se compose d'étapes qui peuvent être exécutées par un ordinateur selon
la méthode indiquée dans le mémoire descriptif. Le procédé n'est
utilisable qu'avec un ordinateur numérique.
5) Gottschalk (Commissaire des brevets) v. Benson,
20 novembre 1972 (175 USPQ 673) U.S. Supreme Court.
Bien que les raisons sur lesquelles se fondent les jugements dans
ce cas ne soient pas définitives, nous constatons que la Cour
Suprême des Etats-Unis a jugé que, parce que la formule mathématique
en question n'avait pas d'applications pratiques importantes sauf
dans le cadre d'un ordinateur numérique, un brevet engloberait la
formule mathématique elle-même et, en pratique, porterait aussi sur
l'algorithme. En d'autres termes, la portée des revendications n'était
pas limitée à un nouvel appareil ni à une utilisation particulière
d'un domaine de la technologie. Parce qu'on ne peut breveter une idée,
la Cour Suprême des Etats-Unis a renversé la décision de la US/CCPA en
l'affaire Benson et Tabbot (169 USPQ 548).
6) En l'affaire Christensen (178 USPQ 35) 31 mai 1973.
Les revendications portaient sur une méthode permettant de déterminer
in situ, la porosité du sous-sol d'un terrain. Les données étaient
prélevées dans un trou de sonde et traitées dans un ordinateur numérique
par l'algorithme du demandeur. La US/CCPA a décicé que les revendi-
cations relatives à une méthode comprenant les étapes connues et néces-
saires de la cueillette des données et une étape finale consistant à
résoudre une équation mathématique avaient pour objet une question non
prévue par la loi.
7) En l'affaire Johnston (183 USPQ 172) 19 septembre 1974
Les revendications portaient sur un système informatique qui permet de
mémoriser les classes de mouvements, de les grouper et de les imprimer
sur un état du client. La US/CCPA a décidé que les revendications ne
portaient pas sur une façon de faire des affaires et qu'elles n'empê-
cheraient pas autrui d'utiliser l'algorithme. Le Bureau des brevets
américains a fait appel de cette décision auprès de la Cour Suprême
(Affaire Dan contre Johnston) (voir décision suivante).
8) Dann v. Johnston (189 USPQ 257) 12 mai 1975
La Cour Suprême des Etats-Unis a renversé la décision de la US/CCPA.
Elle a décidé que les revendications étaient de nature évidente étant
donné la méthode utilisée antérieurement, qui était la méthode manuelle
normale de tenue des livres. Toutefois, la Cour Suprême a refusé
d'étudier la question de la validité de l'objet de la demande.
9) En l'affaire Chattfield (191 USPQ 730) 18 novembre 1976.
Les revendications portaient sur une méthode qui consistait à
rassembler des données pendant une période prédéterminée, à les
évaluer et les faire traiter par un ordinateur qui choisirait un de
ses programmes pour ce faire. La CCPA avait décidé que les revendi-
cations ne portaient pas sur un algorithme ou un programme particulier
et que l'algorithme n'était qu'accessoire. Elle a décidé que la
méthode était brevetable, mais deux des cinq juges différèrent
fortement d'opinion en s'appuyant sur le cas Gottshalk contre Benson
ci-dessus.
10) En l'affaire Noll (191 USPQ 721) 18 novembre 1976.
Les revendications portaient sur un appareil destiné à lire et à
convertir des données sur bande magnétique au moyen d'un ordinateur
et à extraire les données converties pour explorer la trame d'un CRT
(cathode ray tube tube cathodique). Le seul caractère de nouveauté
était le programme de conversion utilisé dans l'ordinateur. La CCPA a
décidé que les revendications portaient sur un appareil appartenant
à une technologie particulière et ne visaient pas l'algorithme.
Comme dans l'affaire Chattfield, la CCPA a décidé qu'il ne convenait
pas de disséquer une revendication pour trouver ce qui est nouveau
puis, si cette partie nouvelle n'est pas brevetable, de rejeter la
revendication. Là encore, deux des cinq juges furent d'avis contraire
et l'exprimèrent vigoureusement.
11) L'affaire Noll et l'affaire Chattfield (voir ci-dessus)
Le US Patent Office essaya de faire appel dans ces deux cas, mais
n'obtint pas d'ordonnance de certiorari parce que le délai d'appel
était expiré et que l'une des parties s'était retirée.
12) En l'affaire Deutsch (193 USPQ 645) 5 mai 1977.
Les revendications portaient sur une méthode permettant de gérer un
ensemble d'usines de fabrication à l'aide d'un ordinateur programmé.
La CCPA a décidé que le programme était accessoire et que les revendi-
cations pouvaient être acceptées. La CCPA a décidé que la revendi-
cation ne visait pas directement une formule mathématique, un algorithme
ou un programme lorsqu'elle était considérée comme un tout.
13) En l'affaire Waldbaum (194 USPQ 465) 28 juillet 1977
Cette affaire était la contrepartie américaine de la cause canadienne
Waldbaum. Avant le cas Gottschalk contre Benson, la CCPA avait décidé
que ces revendications pouvaient être acceptées mais, ensuite, elle
changea d'avis et décida que les revendications constituaient, en effet,
des revendications portant sur l'algorithme lui-même.
14) En l'affaire Flook (195 USPQ 9) 4 août 1977.
Les revendications portaient sur une méthode par laquelle un ordinateur
était programmé pour traiter les données relatives à la production
d'hydrocarbures par catalyse et pour rajuster périodiquement les niveaux
d'alarme. La méthode revendiquée consistait fondamentalement à lire des
paramètres, à calculer de nouvelles valeurs d'alarme et à rajuster les
limites d'alarme. La CCPA a décidé que l'opération qui consiste à rajuster
les limites d'alarme après avoir trouvé la solution de l'algorithme fai-
sait que ces revendications n'étaient plus des revendications portant
sur un algorithme mais équivalaient à une simple utilisation d'un algo-
rithme.
Le US Patent Office a obtenu une ordonnance de certoriari de la Cour
Suprême des Etats-Unis, et cette décision a été révisée (Parker contre
Flook No 77-642 novembre 1977).
15) En l'affaire DeCastelet (195 USPQ 439) 6 octobre 1977.
Les revendications portaient sur une méthode permettant de tracer des
courbes à partir de donnés fournies par un ordinateur programmé. Les
sorties d'ordinateur pouvaient être utilisées pour tracer un dessin ou
commander une fraiseuse. Les revendications ne mentionnaient pas
d'algorithme, d'équation ni de formule particulière mais le processus
comprenait un algorithme. La CCPA a décidé que l'opération postérieure
à la solution de l'algorithme doit démontrer que la méthode ne fait
qu'utiliser un algorithme et que la revendication ne porte pas sur
celui-ci.
La CCPA a décidé que les revendications ne faisaient que définir le
traitement des données et n'établissaient pas que l'utilisation des
équations n'était qu'une étape permettant d'obtenir un autre résultat.
Dans la méthode revendiquée, l'ordinateur ne faisait que transmettre
des signaux électriques représentant des résultats; ceci n'a pas été
considéré comme faisant partie du type d'activité postérieure à la solu-
tion de l'algorithme qu'il faudrait pour renverser la décision prise dans
l'affaire Gottshalk contre Benson.
16) En l'affaire Richman (195 USPQ 340) 6 octobre 1977
Les revendications portaient sur une méthode qui permet de déterminer
le calibre de l'orifice de sortie du faisceau des radars et la vitesse
du vecteur. Les revendications comportaient une nouvelle étape de ras-
semblement des données et une étape finale de résolution d'une équation
mathématique. La CCPA a décidé que les étapes nouvelles et nécessaires
de rassemblement des données ne rendaient pas la méthode brevetable.
Elle a également décidé que la méthode revendiquée était essentiellement
un calcul mathématique, même si elle était exprimée en mots et non sous
la forme d'une formule.
On peut constater qu'avant la décision de la Cour Suprême des Etats-Unis dans
l'affaire Gottshalk contre Benson, la CCPA estimait que des programmes informatiques
et des algorithmes pouvaient être brevetés à condition qu'ils servent à une tech-
nologie particulière, que leurs applications soient limitées au traitement par
des machines et qu'ils soient nouveaux et non évidents. Cette position s'appuyait
en grande partie sur l'argument selon lequel un ordinateur numérique universel
programmé d'une façon particulière était un ordinateur différent d'un ordinateur
programmé d'une autre façon. Après le cas Gottschalk contre Benson, la CCPA a
semblé modifier sa position et considérer qu'un algorithme pouvait être brevetable
aux conditions suivantes:
a) que l'algorithme constitue un accessoire de la méthode
revendiquée et
b) qu'il y ait, après la solution de l'algorithme, une certaine
activité qui montre que l'algorithme a été plutôt utilisé et
non inclus dans les revendications.
Cette position a été renforcée par la suite et exclut la "simple sortie des données
vers des appareils d'usage connu" du type d'activité envisagé après la solution
de l'algorithme. Les étapes anciennes ou nouvelles de rassemblement des données
nécessaires ont également été exclues comme constituant un type d'activité qui
rendrait brevetable une revendication comprenant un algorithme.
La position actuelle de la CCPA peut être résumée de la façon suivante:
Les revendications qui portent essentiellement sur un calcul
mathématique ou qui décrivent un processus algorithmique et qui
effectivement englobent l'algorithme sont irrecevables, à moins
que ces revendications comprennent une activité postérieure à la
solution de l'algorithme qui montre que cet algorithme a été sim-
pleurent utilisé. Les étapes de rassemblement des données et de
sortie des données vers des dispositifs d'usage connu ne rendent pas
les revendications brevetables.
Toutefois, nous attendons avec intérêt la décision de la Cour Suprême des Etats-
Unis dans l'affaire Flook. Si cette cour suit ce que nous croyons être le fonde-
ment de sa décision dans l'affaire Benson ci-dessus, la décision de la CCPA sera,
croyons-nous, renversée.
Divers appels présentés au U.K. Patent Appeal Tribunal (Cour d'appel des brevets
du R.-U) ont établi la position du Royaume-Uni sur l'acceptabilité des algorithmes
ou des programmes informatiques.
1) Demande de Badger Co. Inc. 1971 RTC 36 à p. 40 27 fév. 1968.
Les demandeurs voulaient faire breveter une méthode de conception
et de formage mécanique d'un dessin visible représentant un système
de canalisation dont les données alimentaient un ordinateur; les
données de sortie étaient finalement converties en un dessin
visible à l'aide d'appareils connus. Le Patent Appeal Tribunal
a décidé que la revendication, dans sa formulation actuelle, ne
pouvait entrer dans le cadre de la Loi, mais que des revendications
d'une certaine forme pourraient être acceptées. Le Tribunal a, par
conséquent, examiné la forme plutôt que la substance de la reven-
dication. Il en résulta des revendications exprimées dans la forme
apparaissant dans le brevet canadien Waldbaum.
2) Demandes de Slee et Harris (1966 RPC 194) 25 novembre 1965.
Les demandeurs voulaient faire breveter une méthode d'exploitation
d'un ordinateur au moyen d'un programme comprenant un certain nombre
d'opérations et caractérisé par le fait que l'une d'entre elles était
lancée avant que la précédente soit terminée. Le bureau des brevets
objecta que ceci ne constituait pas une invention nouvelle. Le
Patent Appeals Tribunal décida que des revendications exprimées dans
la forme: "un ordinateur programmé pour fonctionner", (comme ci-dessus)
et "les moyens de commander un ordinateur pour fonctionner" (comme
ci-dessus) seraient acceptables. Ainsi, le Tribunal concentra son
attention sur la forme et non sur le contenu des revendications, et
put ainsi accepter des revendications du type apparaissant dans
l'affaire Waldbaum au Canada.
3) Demande de Gever (1970 RPC 91)
Les revendications principales portaient sur une méthode permettant
de préparer mécanographiquement un index de marques de fabrique à
l'aide de cartes perforées. On a refusé cette demande, alléguant
qu'elle portait sur un plan qui n'est pas brevetable. Le Patent
Appeal Tribunal décida que les revendications portant sur
un moyen de commander à un ordinateur d'exécuter le processus
ci-dessus n'étaient pas acceptables. Là encore, la forme des
revendications fut décisive.
4) Burroughs Corp. Demande (1974 RPC 147) 30 juillet 1973
Les revendications portaient sur une méthode de transmission
des données au moyen d'une liaison entre un ordinateur central
et des ordinateurs périphériques. Les revendications furent
refusées parce que leur objet n'était pas brevetable, Le
Patent Appeal Tribunal décida que si une revendication portait
clairement sur unes méthode permettant d'utiliser un ordinateur
modifié par un programme pour fonctionner d'une façon nouvelle,
elle était acceptable et que les programmes informatiques sous
leur forme physique sont brevetables. Tant que le programme est
considéré comme moyen, il est brevetable.
Il apparaît clairement qu'au Royaume-Uni, si des revendications portant sur des
algorithmes et des programmes informatiques sont rédigés dans une forme particu-
lière, on considère qu'ils sont brevetables. Nous, toutefois, ne considérons pas
que la jurisprudence britannique l'emporte en ce qui concerne l'objet de l'invention
mentionné à l'article 2 de la Loi sur les brevets du Canada (Voir, Hoffmann-LaRoche
contre le Commissaire - 1955 - S.C.R. 414 et Tennessee Eastman contre le Commissaire
1972 - 8 CPR, 202). Nous remarquons également que la Loi canadienne sur les
brevets n'a pas été conçue d'après la Loi britannique.
En plus de considérer l'obligation légale de suivre la jurisprudence britannique,
il convient également de considérer s'il est désirable d'agir ainsi. A cet effet,
un comité britannique créé pour étudier le système et la loi des brevets (Banks
Report Cmnd No 4407) a déclaré en substance ce qui suit en 1970:
Un programme informatique, compris comme une série
d'instructions destinées à commander la séquence des
opérations d'un système de traitement de données, quelle
que soit la façon dont il est exprimé (c'est-à-dire une
méthode de programmation des ordinateurs, un ordinateur
programmé d'une certaine façon et si la nouveauté ou
la nouveauté présumée ne réside que dans le programme)
n'est pas brevetable (soulignés ajoutés).
De plus, nous trouvons que le nouveau "Patents Act" britannique 1977, chapitre 37
Partie 1(2) vise des choses qui "ne sont pas des inventions" et comprend ce qui
suit:
c) un plan, une règle ou une méthode permettant d'exécuter un acte
mental, de jouer un jeu ou de faire des affaires, ou un programme
d'ordinateur (souligné ajouté);
d) la présentation de l'information; ....
Les tribunaux européens continentaux refusent généralement de breveter des appli-
cations d'ordinateur. Par exemple, les cours autrichiennes ont eu à se prononcer
sur des brevets et des applications dans trois cas et ont toutes rejeté les reven-
dications (voir, par exemple, Austrian Patent Office Appeals Division, Déc. 12,
1967-1968 O Pat B1.39). La Loi française sur les brevets de 1970 exclut explici-
terrent les programmes informatiques des matières brevetables. En Suisse et aux
Pays-Bas, on ne peut breveter le logiciel parce qu'il constitue un "processus
mental" (voir, par example, Swiss Federal Supreme Court "Dimensional Synthesis"
décembre 12, 1972, 5-11 C 448, 1974). Toutefois, l'Allemagne accepte certaines
formes de revendications portant sur des programmes informatiques. A l'article
52(2) c) et d) de la "Convention on the Grant of European Patents", nous trouvons
également des restrictions identiques à celles de la Loi britannique mentionnée
ci-dessus.
Parmi les pays où l'on applique le droit commun, l'Australie refuse d'accorder la
protection d'un brevet à des programmes informatiques. Cette attitude se traduit
dans sa jurisprudence. Dans trois cas (voir par exemple: N.V. Philips Gloeilam-
penfabrieken, 36 Official Journal of Patents, Trademarks, and Designs 2392 (1966),
les tribunaux ont refusé d'accorder un brevets. Ils ont adopté l'approche recom-
mandée par le "Banks Report" mentionné ci-dessus. Ils ont allégué le fait que la
nouveauté ne résidait que dans le mode d'exploitation et qu'un tel brevet limiterait
le propriétaire d'un ordinateur qui ne pourrait utiliser ce dernier de la manière
la plus efficace après avoir investi des montants importants pour l'acquérir.
Au Canada même, le Conseil économique a conclu qu'"il ne serait pas opportun
d'accorder au Canada la protection d'un brevet aux programmes d'ordinateur" (Rapport
sur la propriété intellectuelle et industrielle, jan. 1971, p. 109. Cette position
fut reprise dans le Document de travail sur la révision de la Loi sur les brevets,
au mois de juin 1976 dans lequel on a cherché à la page 203, à s'assurer que:
"... tous les moyens d'obtenir des droits de brevet sur des techniques de
programmation de l'ordinateur soient écartés". (guillemets ajoutés)
Comme nous l'avons mentionné auparavant M. Hill a insisté, au cours de l'audience,
sur la décision canadienne en l'affaire Waldbaum, ci-dessus. Nous devons rappeler,
toutefois, que dans cette cause on a accepté les revendications portant essentiel-
lement sur un algorithme ou un programme machine en s'appuyant principalement sur
la décision de la U.S./CCPA en l'affaire Bernhart and Fetter. Des décisions
ultérieures de la U.S./CCPA et de la U.S. Supreme Court ont grandement limité la
portée de la décision en cette affaire. Par exemple, dans l'affaire Gottschalk v.
Benson, ci-dessus, la U.S. Supreme Court a trouvé, inter alia, que les brevets rela-
tifs à des procédés dont l'application se fonde sur des principes ou des idées
scientifiques n'ont été jugés valides que lorsque: 1) le processus était exécuté à
l'aide d'un appareil spécial conçu pour concrétiser l'idée nouvelle et 2) la reven-
dication portant sur le monopole d'exploitation ne mentionnait qu'une utilisation ou
un domaine particulier d'un art ou d'une technologie. Parce que, dans cette décision,
les revendications n'étaient pas limitées à un appareil nouveau ni â une utilisation
ou une technologie particulière, la U.S. Supreme Court a décidé qu'elles portaient
sur l'algorithme lui-même et n'étaient, par conséquent, pas recevables en vertu du
texte 35 U.S.C. 101. Dans cette décision, la U.S. Supreme Court a également indiqué
que, pour qu'un brevet protège un procédé, celui-ci doit être associé à une machine
ou à un appareil particulier ou doit être utilisé pour transformer des articles ou
des matériaux en une "chose ou un état différents". De plus, comme nous l'avons
indiqué, la contrepartie de l'affaire Waldbaum aux Etats-Unis a été refusée, pour
la deuxième fois, par la CCPA elle-même.
Au Canada, il est bien établi que, lorsqu'un progrès brevetable a été fait dans une
certaine technique sous forme d'une idée ou d'un concept, les revendications peuvent
prendre la forme d'une application pratique nouvelle de cette idée ou de ce concept.
(voir l'affaire Canadian Gypsum Co. Ltd. contre Gypsum Lime (1931) Ex. C.R. 180 at
187). Cette application doit, naturellement, être écrite dans la divulgation mais
le droit exclusif accordé doit être limité aux applications de l'idée, du concept de
l'invention qui ont été faites (voir l'affaire Farbwerke Hoechst A.G. contre le
commissaire des brevets (1962) 22 Fox Pat. C. 141 at 169). En d'autres termes, les
revendications doivent caractériser l'invention et définir les limites du monopole
qui sera consenti.
Parmi les arguments invoqués par le demandeur le 24 aoflt 1977 (pages 9 à 11) l'un
deux, fondé sur le cas Waldbaum, présume que ce cas constitue un précédent qui nous
lie. Sur ce point, inter alia, le demandeur dit que:
L'examinateur a choisi de définir l'invention revendiquée par le
demandeur comme portant sur un programme machine. Le demandeur
estime toutefois respectueusement que l'objet des revendications
1 et 45 (ainsi que des revendications X1 à X9 ci-jointes) constitue
un vrai procédé ou une méthode comprenant une série d'étapes opé-
rationnelles caractérisant l'exécution du procédé ou de la méthode.
Ces étapes, comme nous le revendiquons, sont exécutées automatique-
ment par une machine qui peut, mais ne doit pas nécessairement être
un ordinateur universel programmable.
Dans son rejet, il est implicite que l'examinateur considère que
l'invention du demandeur ne constitue qu'une série d'instructions
commandant un ordinateur universel, c'est-à-dire une liste établie de
commandes destinées à un ordinateur d'un type donné, même si celui-ci
est un ordinateur universel. Le demandeur n'a pas l'intention de
restreindre ainsi la portée de ses revendications. Ses demandes ne
portent pas sur le chargement d'un programme dans un ordinateur uni-
versel ce qui, comme nous l'avons vu, est une technique qui complète
la construction d'un ordinateur d'un certain type qui peut être
utilisé pour appliquer la méthode inventée. Ce qui est revendiqué
est une méthode d'exécution de la série d'étapes indiquée, même si
cette méthode implique l'utilisation d'un appareil modifié pour fonc-
tionner d'une façon nouvelle.
Nous estimons que la définition de l'examinateur est arbitraire et
que, dans les circonstances" elle n'est pas justifiée. Il en est de
même de l'essai d'isoler l'élément "intellectuel" présumé dans la
méthode revendiquée sans tenir compte que, dans son ensemble, la
méthode est une opération physique reliant différentes données d'entrée
à une ou plusieurs données de sortie.
L'un des arguments de l'avant-dernier paragraphe de la décision finale
illustre particulièrement bien cette erreur de conception manifeste.
C'est le suivant: "la méthode revendiquée correspond à une exécution
par ordinateur d'un procédé qui pourrait être effectué mentalement
même si cette procédure ne serait pas commercialement utile". Le fait
que la partie intellectuelle des étapes d'une méthode puisse être
exécutée par l'homme sans l'aide d'une machine n'est pas une preuve de
non-brevetabilité. Ce qui est divulgué et revendiqué, c'est une méthode
suivie par une machine qui comporte des étapes propres à une machine
et qui ne simulent ou reproduisent aucunement le fonctionnement d'un
cerveau humain. La seule analogie qu'on peut faire avec un être humain
est la similarité des buts de certaines étapes et non dans la façon
dont elles sont exécutées; il en est ainsi de nombreuses inventions, y
compris celle de Waldbaumé En effet, la méthode revendiquée par Waldbaum
est l'exécution par une machine d'un procédé qui pourrait, en principe,
être exécuté mentalement et la définition d'un algorithme donnée par
l'examinateur décrit parfaitement la technique de Waldbaum.
Cette interprétation limitées de la décision Waldbaum se manifeste d'une
autre façon. Alors que le Commissaire reconnaît formellement dans
l'affaire Waldbaum le principe général selon lequel un ordinateur
programmé d'une façon différente constitue un ordinateur différent,
la décision finale est exprimée en termes qui suggèrent que ce
principe ne s'applique qu'à des cas où une utilisation brevetable
nouvelle peut être trouvée dans l'invention. Le demandeur estime
respectueusement qu'aucune restriction de ce type ne peut être trouvée
dans la décision Waldbaum.
Tous les aspects de la décision Waldbaum ne nous satisfont pas, pour les raisons
indiquées auparavant, parce qu'il existe une jurisprudence plus récente. Ainsi,
nous ne sommes pas convaincus que le fait de programmer un ordinateur d'une
certaine façon produire un nouvel ordinateur ou le modifie de quelque façon que
ce soit. La programmation ne fait que créer une condition temporaire. Un ordi-
nateur est, de par sa nature même, capable d'exécuter un certain nombre d'opérations
dans un ordre donné. Aucun programme ne peut faire exécuter à un ordinateur des
opérations qu'il n'est pas, de par sa conception même, en mesure d'exécuter. Il
est en effet évident que les ordinateurs numériques universels sont conçus pour
exécuter tout programme, quel qu'il soit, dans la mesure où celui-ci respecte les
contraintes physiques qui lui sont inhérentes. C'est même là la raison d'être des
ordinateurs numériques universels. En règle générale, les programmes sont un type
de produit que tout programmeur compétent peut produire par ses propres moyens.
La création d'un nouveau programme ne fait qu'ajouter une information intellectuelle
à ce qui existait déjà. A notre avis, toute invention dans ce domaine ne peut être
brevetée, que la revendication ait trait à un ensemble d'instructions écrites sur
la façon d'exploiter une machine ou à un support d'informations.
L'article 2 de la Loi sur les brevets stipule qu'un brevet peut être délivré à
quiconque invente un objet qui se classe dans l'une des cinq catégories statutaires
suivantes: réalisation, procédé, machine, fabrication ou composition de matières.
On pourrait penser, à la lumière de ce texte, que toute invention qui peut être
définie comme une façon d'exécuter quelque chose est un objet statutaire. Or,
comme l'a justement souligné l'examinateur, aux termes de l'alinéa 3 de l'article
28 de la Loi sur les brevets, certains types d'inventions (par exemple les
principes scientifiques ou les conceptions théoriques) n'ont jamais été considérés
comme des objets brevetables. Un algorithme, comme nous l'avons mentionné précé-
demment, est un ensemble de règles ou de procédés destiné à résoudre un problème
au moyen d'un nombre limité d'opérations et, de façon générale, ne peut être assi-
milé à une conception théorique.
Il est cependant évident que toute invention portant sur un système de régulation
d'un procédé industriel, dont le programme n'est qu'un élément accessoire, peut
être brevetée. Le système de régulation d'un procédé industriel doit cependant
comprendre un appareil de conception nouvelle relié à un ordinateur qui contrôle
une fonction à la sortie d'un ordinateur. Dans ce cas, l'invention ne réside pas
uniquement dans le caractère de nouveauté du programme.
Passons maintenant à la présentation faite par M. Hill le 24 août 1977, et aux
questions soulevées lors de l'audience. A la page 2, il est mentionné, que
l'invention porte sur le traitement de données diagraphiques "et qu'elle n'est en
soi pas un programme machine". La méthode permettant de traiter les données à
l'aide d'un ordinateur numérique est en réalité un programme machine ou, dans un
sens plus général, un algorithme. Il a sûrement fallu, pour préciser les données
du problème et les rapports mathématiques entre les divers paramètres, une con-
naissance de la géophysique, mais l'élaboration subséquente d'un algorithme ou d'un
programme fait partie des fonctions normales de l'analyste et fait appel aux apti-
tudes qu'on attend de lui.
A la page 6, M. Hall soutient que la divulgation suffit à appuyer les revendications
à l'égard d'un ordinateur spécialisé. Les ordinogrammes, etc., du devis ne sont
cependant que la simple illustration du mode d'application de la méthode proposée.
Or, l'alinéa (1) de l'article 36 exige une divulgation complète, claire, concise
et précise qui permette à toute personne compétente dans le domaine de fabriquer
et d'exploiter l'invention. Nous ne considérons donc pas qu'il est suffisant de
simplement divulguer une idée et un programme pour ordinateur universel et d'affirmer
ensuite que l'invention peut être exploitée au moyen d'un appareil spécial. Nous
nous étendrons davantage sur ce sujet lorsqu'il sera question de la revendication
qui s'y rapporte.
A la page 7, l'argument selon lequel un ordinateur universel et un ordinateur
spécialisé ont, fondamentalement, la même nature physique est manifestement le
prolongement de l'argument invoqué dans l'affaire Bernhart et Fetter, ci-dessus,
où il est soutenu qu'un ordinateur programmé est physiquement différent d'un ordi-
nateur non programmé. Nous rejetons cet argument.
Dans les deux derniers paragraphes de la page 11, le demandeur affirme que les
revendications ne portent pas sur une série d'instructions destinées à un ordinateur
universel. Cet argument s'appuie sur le postulat suivant: le terme "programme
machine" ne peut signifier que la série d'étapes qui commandent finalement l'ordi-
nateur. "Programmé machine" comprend également des explications sommaires sur la
méthode utilisée pour résoudre le problème du demandeur. Ce sens apparaîtrait
peut-être mieux si, dans la décision de rejet, les termes "programme machine" et
"algorithme" étaient utilisés ensemble, car la nuance qui les sépare est très
subtile.
Les pages 12 à 21 traitent exclusivement de la jurisprudence britannique qui, nous
le maintenons, ne peut servir à déterminer les limites de l'article 2 de la Loi sur
les brevets du Canada. De plus, il se peut que cette jurisprudence puisse ne plus
être invoquée en raison des modifications qui lui est approtée par la nouvelle
"British Patents Act" (1977), ci-dessus.
Nous avons souligné précédemment que, dans le cas Waldbaum, il a été décidé,
lorsqu'il y a invention, que:
1. les revendications visant un programme machine même ne sont pas
brevetables;
2. les revendications visant une nouvelle méthode de programmation
d'un ordinateur sont brevetables; et
3. les revendications visant un ordinateur programmé d'une nouvelle
manière sont brevetables.
Compte tenu de l'évolution des évènements depuis le cas Waldbaum, voici notre
position actuelle:
1. les revendications visant un programme machine même ne sont pas
brevetables;
2. les revendications visant une nouvelle méthode de programmation
d'un ordinateur ne sont pas brevetables;
3, les revendications visant un ordinateur programmé d'une nouvelle
manière, exposées sous quelque forme que ce soit et dont l'élément
de nouveauté réside uniquement dans le programme ou l'algorithme, ne
visent pas un objet brevetable aux termes de l'article 2 de la Loi
sur les brevets;
4. les revendications portant sur un équipement informatique
programmé d'une nouvelle manière sont brevetables, si l'invention
à breveter a trait à l'appareil lui-même; et
5. les revendications portant sur une méthode ou un procédé exigeant
l'utilisation d'un nouvel appareil conçu spécialement pour exploiter
une nouvelle idée sont brevetables.
Nous recommandonc énergiquement au commissaire des brevets d'adopter les critères
ci-dessus.
Au cours de l'audience, M. Hill a dit que: "il est clair que la présente invention
comprend des idées nouvelles, originales et méritoires", qui ne sont pas le fruit
des connaissances normales d'un programmeur. Sur ce point, il ajoute (comme il
le dit dans sa réponse du 24 août 1977):
A notre avis, il est clair que la présente invention comprend
des idées nouvelles, originales et méritoires, même s'il serait
relativement facile pour une personne qui posséderait les con-
naissances requises de programmer un ordinateur pour mettre ces
idées en pratique conformément aux indications de la divulgation.
Par ailleurs, à la page 2, à l'avant-dernier paragraphe de la
décision finale, l'examinateur analyse l'utilisation nouvelle d'une
"chose connue". L'ordinateur non programmé seul ne peut fonctionner
comme un ordinateur et diffère entièrement, sauf dans son apparence
extérieure, d'un ordinateur programmé.
Si un ordinateur programmé d'une certaine façon est différent du
même "matériel" programmé d'une autre façon, le fonctionnement de
cet ordinateur peut, sans aucun doute, être commandé d'après une
méthode différente et, en particulier, d'après une méthode qui
comprend des étapes clairement identifiables qui correspondent à
différents états physiques de ce matériel. C'est là une caractérisât-
que des procédés techniques.
Le demandeur ne considère pas que son invention est simplement une
utilisation nouvelle d'un ordinateur universel programmable. Cette
autre inteprétation restrictive est, à notre humble avis, uniquement
celle de l'examinateur. Il faut remarquer qu'en rédigeant cette
partie de sa décision, celui-ci limite la signification du mot
"ordinateur" un ordinateur universel avant qu'il ne soit programmé.
Le demandeur ne partage pas cette manière de voir et considère que
l'invention peut être justement décrite comme étant une méthode de
traitement de données par ordinateur dont l'une des applications
s'effectue par l'intermédiaire d'un ordinateur programmé. Un ordi-
nateur programmé de ce type exécute un nouvel ensemble de fonctions
exécutées en milieu physique. Ces opérations ne constituent pas un
principe scientifique ni un théorème abstrait, auquel cas l'article
28 paragraphe 3 s'appliquerait. Au contraire, ils font partie des
"procédés utiles" mentionnés à l'article 2(d). Ce procédé est décrit
avec suffisamment de détails pour permettre à une personne compétente
dans le domaine de le reproduire et l'utilisation divulguée d'un
ordinateur programmé, tout en constituant le meilleur mode d'applica-
tion, n'est pas la seule façon imaginable d'exécuter la méthode
faisant l'objet des revendications.
Dans le deuxième paragraphe de la décision finale, l'examinateur
indique que l'objet de la demande porte sur un programme machine
qui commande une manipulation par un ordinateur universel, qui
produit seulement des données et que, par conséquent, elle n'est
pas brevetable. Il indique de plus que cet objet est le fruit des
aptitudes d'un programmeur. Ces arguments sont beaucoup plus
pertinents au cas Waldbaum où des données sont manipulées (pour
compter le nombre de "1" dans un registre") et où un programme
particulier est réellement divulgué (figure 2).
Il n'a pas été déterminé s'il y avait, à un certain moment, invention dans "l'idée
méritoire". L'examinateur a cité une réalisation antérieure dans une cause,
mais cette citation n'a pas été répétée dans la cause suivante. Il a indiqué, au
cours de l'audience, que ce que les ingénieurs ont fait en ce domaine peut avoir
quelque mérite. Supposons, en poussant plus loin l'argumentation, qu'il y ait
invention, il nous faut encore décider si l'objet de la réclamation est brevetable
aux termes de l'article 2 de la Loi sur les brevets.
Nous allons maintenant étudier chaque revendication à la lumière de nos principales
conclusions. Pour les raisons indiquées, nous convenons avec l'examinateur que
les réclamations rejetées dans la décision finale ne définissaient pas un objet
brevetable. Toutefois, nous allons étudier les revendications et indiquer, pour
chacune d'elles les arguments qui les ont fait refuser.
La revendication 1 est rédigée ainsi:
Une méthode de traitement par machine de données diagraphiques
qui consiste à:
a) dériver de nombreuses mesures représentant les caractéristiques
d'une formation du terrain à des profondeurs sélectionnées dans une
section d'un trou de sonde;
b) combiner par ordinateur au moins certaines desdites mesures
dérivées d'au moins quelques-unes desdites profondeurs sélectionnées
dans ladite section de trou de sonde pour calculer au moins un para-
mètre d'entrée pour ladite section de trou de sonde;
c) combiner par ordinateur au moins certaines desdites mesures
dérivées d'au moins quelques-unes desdites profondeurs sélectionnées
avec au moins un desdits paramètres d'entrée pour calculer au moins
un paramètre de sortie pour au moins quelques-unes desdites pro-
fondeurs sélectionnées; et à
d) combiner par ordinateur au moins certaines desdites mesures
dérivées avec au moins un desdits paramètres de sortie pour au
moins quelques-unes desdites profondeurs sélectionnées pour recal-
culer au moins un desdits paramètres d'entrée ou calculer un autre
paramètre d'entrée pour le combiner avec au moins certaines desdites
mesures pour produire des paramètres de sortie représentatifs d'au
moins une caractéristique de la formation.
Cette revendication porte sur une méthode qui consiste en une série d'opérations
caractérisant le déroulement de méthode. Même si l'on suppose que "l'idée méritoire"
traduise une contribution nouvelle, le cadre d'exploitation de ce concept (non
brevetable en soi) ne remplit cependant pas, à notre avis, les conditions permet-
tant de breveter un objet aux termes de l'article 2 de 1a Loi sur les brevets.
L'invention n'exige pas l'utilisation d'un nouvel appareil conçu spécialement pour
la concrétisation de la nouvelle idée. Le seul élément de nouveauté qui existe
réside uniquement dans le programme ou l'algorithme et n'est en fait, qu'une infor-
mation intellectuelle. Bref, une méthode de programmation d'un ordinateur ne peut
être considérée comme un objet brevetable. Nous pensons donc que cette revendica-
tion doit être rejetée. Les revendications 2 à 43, portent également sur des
méthodes et doivent aussi être écartées pour les mêmes raisons. La revendication
44 porte sur un procédé de transformation de signaux représentant des données.
Cette revendication est, dans son essence, la même que la revendication 1 et devrait
également être refusée.
Dans la demande du 24 août 1977, les revendications X1 à X9 ont été soumises.
Elles portent sur une méthode de traitement de données diagraphiques par ordinateur.
"Ces revendications devraient également être refusées parce que les arguments
utilisés pour refuser la revendication 1 peuvent également leur être appliqués.
Si ces méthodes ou procédés étaient exécutés à l'aide d'un appareil particulier
et nouveau, conçu pour concrétiser "l'idée méritoire" nouvellement découverte,
la revendication serait recevable.
Les revendications 46 à 54, soumises le 13 février 1976, sont exprimées comme si
elles portaient sur un appareil. La revendication 46 est ainsi rédigée.:
"Appareil pour traiter des données diagraphiques permettant
de déterminer les propriétés caractéristiques des formations
du sol comprenant: a) des moyens pour dériver un grand nombre
de mesures représentant des caractéristiques d'une formation
du sol à des profondeurs sélectionnées dans une section d'un
trou de sonde; b) une unité de traitement de données, et c) des
moyens adaptés pour faire compiler par ladite unité de traitement
de données au moins quelques-unes desdites mesures dérivées d'au
moins certaines desdites profondeurs sélectionnées dans ladite
section de trou de sonde pour calculer au moins un paramètre d'en-
trée pour ladite section de trou de sonde, combiner au moins
quelques-unes desdites mesures dérivées d'au moins certaines
desdites profondeurs sélectionnées avec au moins un desdits para-
mètres d'entrée pour calculer au moins un paramètre de sortie pour
au moins certaines desdites profondeurs sélectionnées, combiner au
moins certaines desdites mesures dérivées avec au moins un
desdits paramètres de sortie pour au moins certaines desdites
profondeurs sélectionnées pour recalculer au moins un desdits
paramètres d'entrée ou calculer un autre paramètre d'entrée
pour combiner au moins plusieurs desdites mesures pour pro-
duire des paramètres de sortie représentant au moins une
caractéristique de la formation".
Cette revendication exige un appareil pour enregistrer les données, une unité de
traitement des données et des moyens adaptés pour faire exécuter à cette dernière
une série d'opérations données. Il nous semble que le demandeur essaie de reven-
diquer une nouvelle application pratique de son "idée méritoire". Toute nouvelle
application pratique doit cependant être décrite dans la divulgation. Le mémoire
ne dévoile pas, véritablement un ordinateur nouveau et précis. Au contraire, à la
page 55, ligne 28, il indique clairement que:
"...il serait possible d'utiliser un ordinateur spécialisé
pour effectuer l'analyse, ou il serait possible d'utiliser
un programme informatique pour utiliser un ordinateur numé-
rique universel. En raison de la complexité des techniques
d'analyse de la présente invention, il est considéré préférable
d'utiliser un programme informatique".
S'il est vrai que l'ordinateur revendiqué est physiquement différent de tous les
autres ordinateurs connus, on peut se demander pourquoi le mémoire descriptif ne
fait pas mention de ce fait et n'explique pas en quoi cet ordinateur se distingue
des autres. Nous croyons plutôt que devant l'impossibilité de faire breveter une
méthode de programmation d'un ordinateur, on ait fait porter la revendication sur
l'ordinateur lui-même pour malheureusement se heurter à une objection tout aussi
inévitable. En effet, le mémoire descriptif ne comporte aucune description véritable
d'un ordinateur. En outre, aucun ordinateur qui y est mentionné (et non "entière-
ment décrit") n'est un nouvel ordinateur et n'est mentionné comme tel. Cette
revendication doit donc à notre avis être rejetée. Ces arguments valent également
pour les réclamations 47 à 54 qui devraient, elles aussi, être rejetées.
En résumé, nous ne sommes pas satisfaits que les revendications 1 à 54 et X1 à X9
ont un caractère brevetable en vertu des articles 2 et 28(3) de la Loi sur les
brevets. Nous recommandons que ces revendications soient rejetées. Alors que nous
ne voyons rien qui soit d'une nature brevetable dans cette demande, nous pensons
que nous devons réfléchir avant de recommander de rejeter l'ensemble de cette de-
mande. En raiosn de la complexité de l'objet de l'invention, nous pensons que le
demandeur devrait avoir encore la possibilité de mettre en lumière une autre partie
de l'objet divulguée qui à son avis, ne sera pas sujette aux objections soulevées
contre les revendications rejetées.
Après avoir pris cette décision, nous avons été amenés à prendre connaissance d'un
article intéressant, intitulé "Dispositions types sur la protection du logiciel".
Cet article se trouve aux pages 259 et suivantes du numéro de décembre 1977 de
"Activités de l'OMPI". On y présente les conclusions de six années de recherches
effectuées par le Bureau international de l'OMPI grâce à la collaboration de spé-
cialistes. Le bureau envisage la possibilité d'un traité international pour la
protection du logiciel dans le secteur informatique. Un tel traité offrirait un
niveau de protection minimal en matière de logiciel et une façon, pour les Etats
signataires, de reconnaître "l'enregistrement ou le dépôt, à l'échelle internatio-
nale, du logiciel". Le dépôt ou les dispositions types auraient pour objet d'assu-
rer une forme de protection suffisante au logiciel.
Le président adjoint de la
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
J'ai étudié l'instruction de cette demande et analysé soigneusement la décision et
les conclusions de la Commission d'appel des brevets. Je souscris aux recomman-
dations de la Commission d'appel et rejette, pour les raisons invoquées, les ré-
clamations 1 à 54 et X1 à X9. Le demandeur dispose de six mois pour interjeter
appel de la présente décision en vertu de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
Le Commissaire des brevets
J.H.A. Gariépy
Fait à Hull (Québec)
le 28 février 1978