DECISION DU COMMISSAIRE
Evidence: Ruban pour machine à affranchir.
Le ruban comprend une bande allongée de papier à timbrer, à dentelures
transversales, légèrement retenue à une bande porteuse par un auto-adhésif;
la bande porteuse est plus large que la bande de papier et possède, dans sa
marge, des perforations équidistantes qui coïncident avec les dentelures de
la bande de papier et servent à recevoir les dents du pignon d'entraînement.
Les réalisations antérieures ne font pas état de l'objet de la présente
demande et il n'est pas non plus évident dans le dispositif. On a suggéré
au demandeur de présenter une revendication modifiée qui pourrait être
acceptable.
Décision finale: Rejetée
*******************************
La présente décision porte sur une demande de révision, par la Commission des
brevets, de la Décision de l'examinateur en date du 24 juin 1976, au sujet de
la demande 169,737 (classe 219-3), qui s'intitule "Ruban pour machine à
affranchir et bande porteuse à perforations de coïncidence". La Commission
d'appel des brevets a tenu une audience le 19 octobre 1977 à laquelle
M. N. Hewitt, représentant du demandeur, a assisté.
La demande porte sur un ruban d'affranchissement postal ou un ruban de machine
à affranchir. Le ruban comprend une bande allongée de papier à timbrer
légèrement retenue par un auto-adhésif à une bande porteuse plus large que la
bande de papier de façon à laisser une marge d'un côté de la bande porteuse.
La bande de papier porte des dentelures transversales. La marge de la bande
porteuse comporte des perforations équidistantes qui coïncident avec les
dentelures et servent à recevoir les dents du pignon d'entraînement. La
disposition est expliquée ci-après par la figure 1.
<IMG>
Dans sa décision finale, l'examinateur a refusé la revendication 1 ( la seule
revendication), en raison du brevet américain suivant:
3,501,365 le l7 mars 1970 Marshall
Le brevet Marshall porte sur un ruban d'étiquettes à auto-adhésif retenu à une
bande porteuse en rapport synchrone avec des perforations d'entraînement
30a de ladite bande porteuse. Un dispositif (16) permet l'impression sur le
ruban d'étiquette. Un pignon à dents (26) fait avancer le ruban. Cette
invention est illustrée par les dessins suivants, les figures 1 et 3 du brevet:
<IMGS>
La revendication 1 de ce brevet se lit comme suit:
La combinaison du matériau d'étiquette et de celui de la bande porteuse
juxtaposés et qu'un matériau adhésif retient légèrement l'un à l'autre
de façon qu'ils soient facilement séparés; la bande porteuse est
perforée en une multitude d'endroits de manière à donner une ligne de
séparation qui traverse ladite bande porteuse seulement. Chaque ligne
de séparation constitue la paroi latérale d'une perforation
d'entraînement qui se trouve à l'intérieur de la périphérie du
matériau d'étiquette correspondant, de façon à ce qu'une part de
ladite bande porteuse forme une partie intérieure reposant à l'intérieur
de chaque ligne de séparation formant une surface d'entraînement définie
qui permet l'avancement dudit matériau d'étiquette et de ladite bande
porteuse.
Voici ce que l'examinateur a déclaré (en partie) dans sa décision:
...
Les caractéristiques de la revendication 1 que ne fournit pas le
brevet Marshall sont:
(a) la production de timbres-poste plutôt que d'étiquettes;
(b) la coïncidence des dentelures et des perforations
d'entraînement.
La première différence est visiblement facile à corriger par des
spécialistes dans ce domaine puisqu'il leur suffit de changer les
plaques imprimantes du dispositif Marshall. La deuxième différence
(b) n'a pas une importance majeure dans le fonctionnement du dispositif
du demandeur puisque la synchronisation peut s'effectuer tout aussi
facilement sans cette restriction Dans certains cas, lorsque la
bande porteuse et la bande portée sont détachables simultanément,
cette caractéristique aide à la distribution. Cependant, cette
coïncidence dans le dispositif du demandeur, n'apporte aucun avantage
et, de fait, pose un petit problème aux lecteurs de la demande, car il
est possible de s'égratigner les doigts, comme à 16(a), sur le rebord
de l'ouverture repliée pratiquée dans la bande porteuse.
REFUTATIONS BREVES DES ARGUMENTS DU DEMANDEUR
(1) Caractéristiques non montrées dans le brevet Marshall ou modifications
à apporter pour produire le dispositif du demandeur
Le demandeur énumère plusieurs des caractéristiques de son ruban et
déclare que le brevet Marshall ne les possède pas Il se demande ensuite
comment un spécialiste dans ce domaine pourrait modifier le dispositif
Marshall en vue de produire un dispositif qui ressemblerait au sien.
Il n'est pas nécessaire de partir du "ruban mixte de Marshall" pour y
parvenir. On peut plus facilement partir, comme la fait Marshall, d'un
élément existant tel que décrit par Marshall. A la suite de cela, on
voit que la seule différence importance entre le ruban du demandeur et
le ruban mixte de Marshall réside dans la coïncidence entre les ouvertures
d'entraînement et les lignes de dentelures
(2) LA SYNCHONISATION obtenue par la coïncidence entre les ouvertures et
les lignes de dentelures
Comme il a été démontré au représentant du demandeur lors de l'entrevue
avec l'examinateur, le genre d'alignement précis ou détaillé que
revendique le demandeur n'est pas nécessaire pour obtenir la synchronisation.
Des perforations d'entraînement à pas constants et une bande coupée
ou dentelée à des distances qui sont des multiples de ce pas suffisent.
Le réglage final est alors effectué pour le montage de l'imprimante,
pour le rouleau d'entraînement et, au besoin, pour la plaque de découpage.
Ces réglages sont nécessaires pour les deux genres d'alignement. C'est
pourquoi le demandeur ne peut revendiquer aucun résultat efficace en ce
qui concerne la synchronisation.
(5) Résultat inattendu - Autre preuve d'invention
Lorsqu'il n'y a pas de "résultat inattendu" évident, il faut chercher
ailleurs des dispositifs ingénieux. On reconnaît qu'une amélioration
dans un domaine nécessite de l'ingéniosité. La solution qu'apporte le
demandeur à son problème en proposant inutilement une bande de papier
perforée qui exige que l'appareil soit muni d'une plaque à couteau ou
d'une barre de séparation dont l'arête, côté opérateur, est tranchante,
ne constitue pas une amélioration. En réalité, il y a un avantage, soit
l'emploi d'une bande porteuse, que le demandeur aurait pu exploiter, ce
qu'il n'a pas fait. Comme le brevet Marshall de 1970 (li y a six ans)
le montre clairement, avec l'utilisation d'une telle bande, on a besoin
d'aucune perforation ni d'aucun lien entre les étiquettes. On ne fait
que remplacer la matrice à percer par une matrice à couper.
Parfois, un besoin de longue date ou l'évidence d'un succès commercial
sont des preuves d'invention. Cependant, le témoignage du demandeur
n'en fait pas des preuves. Le fait que le timbre puisse être facilement
ou accidentellement détaché de son rouleau rend impossible tout succès
commercial. De même, les désirs des philatélistes ne peuvent pas passer
avant la satisfaction de l'usager quotidien de timbres-poste.
...
En réponse à la décision finale, le demandeur a modifié la revendication pour
la formuler, en partie, ainsi:
...
Dans son application du dispositif Marshall, l'examinateur déclare que
ce brevet utilise un ruban de papier à auto-adhésif retenu à une bande
porteuse, en rapport synchrone avec des perforations d'entraînement (30a).
Un dispositif permet d'imprimer ou de façonner autrement le ruban de
papier. L'examinateur cite les lignes 3 à 5 de la deuxième colonne
laquelle, à son avis, explique l'utilisation initiale des rubans
d'étiquette qui peuvent être coupés selon différentes exigences; il
mentionne aussi les lignes 62 à 64 de la deuxième colonne pour discuter de
l'utilisation d'une bande porteuse plus large qui permet d'utiliser un
pignon d'entraînement à l'aide des perforations pratiquées dans la partie
plus large. L'examinateur est d'avis que par rapport à cette prétendue
découverte la revendication décrit des différences évidentes pour les
spécialistes. Les demandeurs soutiennent que, de façon générale, le
brevet Marshall ne décrit pas, comme produit fini, un ruban à imprimer
relié à une bande porteuse par une couche d'auto-adhésif à séparation
facile. En général, les passages auxquels l'examinateur fait allusion
ne présentent pas de preuves. réelles. On déduit, en particulier, des
découvertes de Marshall que plusieurs tentatives ont été faites pour
résoudre ce problème, entre antres, celles dont on discute dans les
colonnes 1 et 2 de la réalisation antérieure citée, mais qu'elles
n'apportent pas de solution pratique et économique. Le brevet Marshall
prévoit un espacement délibéré entre les étiquettes et évite ainsi le
problème mentionné par les demandeurs en l'occurrence la séparation des
étiquettes à auto-adhésif à l'aide de dentelures. Cependant la méthode
préconisée par Marshall, qui évite cette séparation nécessite qu'on coupe
et jette une partie du ruban; d'une façon pratique, le désavantage qu'il
y a à utiliser une bande porteuse plus large est minime lorsqu'on se rend
compte que cette caractéristique permet de supprimer les opérations
compliquées de coupe et de rejet du ruban d'étiquettes suggérés par
Marshall. Par conséquent, Marshall ne fait pas état d'un ruban d'étiquette
et il ressort que la déclaration de l'examinateur, mentionnée ci-dessus et
selon laquelle Marshall fait état dans ses discussions sur son invention
ou sur les réalisations antérieures d'un ruban d'étiquettes à auto-adhésif,
est erronée....
...
Les demandeurs ne sont pas d'accord avec la déclaration de l'examinateur
à l'alinéa 3. Un ruban mixte n'est formé, à la base, que de deux bandes
intégrales, soit une bande de papier pour étiquettes et une bande
porteuse reliées entre elles par un adhésif approprié. De plus, comme le
reconnaît Marshall et le confirme son invention, il fallait, pour rendre
le ruban mixte utile dans les réalisations antérieures, séparer la bande
de papier en étiquette, à l'aide d'une méthode incommode et fastidieuse
qui consistait à supprimer en la coupant une partie du ruban qui se
trouvait entre les étiquettes. Par conséquent, le ruban mixte utile de
Marshall ne fait pas mention d'un ruban d'étiquettes. Les demandeurs sont
en désaccord total avec la déclaration de l'examinateur à l'alinéa 4.
Marshall ne fait aucune mention de dentelures. Dans sa discussion sur
les réalisations antérieures et sur sa propre invention, il ne fait état
que de la séparation complète des étiquettes. Les extraits mentionnés
par l'examinateur pour appuyer sa position ont exactement l'effet
contraire: ils appuient la déclaration des demandeurs que nous venons de
citer.
Nous avons étudié à fond les nombreux exposés, tant variés qu'élaborés, des
demandeurs et de l'examinateur; les arguments apportés semblent cependant
atténuer les différences qui existent entre la prétendue invention et la
réalisation antérieure citée. Il s'agit de savoir si le demandeur a apporté
une amélioration brevetable dans le domaine.
Nous voulons en premier lieu marquer notre accord avec la déclaration du
demandeur, soit que "le rouleau 31, conjointement avec les perforations 15
disposées sur le bord du ruban mixte, objet de la présente demande, n'est pas
un rouleau d'entraînement. L'entraînement se fait en réalité par le tambour
d'enroulement 22 qui exerce une tension continue sur la bande porteuse..."
Il semble y avoir eu confusion à ce sujet dans la décision finale.
Lors de l'audience, M. Hewitt a fait un effort admirable pour soutenir qu'il
travaillait dans un "domaine différent de la technologie" de celui de
M. Marshall, mais il est évident qu'ils se préoccupent tous deux de problèmes
touchant le domaine des distributeurs automatiques. Le demandeur se préoccupe
d'un distributeur de bande d'affranchissement et M. Marshall d'un distributeur
d'étiquettes. La nuance nous semble faible.
Etudions maintenant la demande et la revendication modifiée. La revendication
se lit comme suit:
Un ruban mixte pour machine à affranchir, formé d'un ruban à timbrer
relié par un auto-adhésif à une bande porteuse; le ruban est traversé,
à des distances égales, de dentelures qui permettent de détacher, à la
sortie, les parties timbré es définies par les dentelures; le produit
final se présente sous la forme de rubans timbrés à affranchir enduits
d'auto-adhésif; la bande porteuse qui est plus large que le ruban laisse
une marge sur un côté où des perforations d'entraînement sont pratiquées
à intervalles réguliers, coïncidant avec les dentelures du ruban; ces
perforations sont placées de façon à recevoir les dents d'un pignon
entraîné par l'avance desdites perforations dans le but de déclencher
le tampon timbreur lorsque le ruban se trouve au point de timbrage, puis
de permettre l'entraînement jusqu'à ce que la partie timbrée passe le
poste de flexion où le ruban est détaché de la bande porteuse tout en
restant attaché au reste du ruban; l'étiquette ainsi timbrée avance jusqu'à
la sortie où elle est détachée du ruban; cette dernière opération se fait à
la sortie plutôt qu'au timbrage.
Comme les paragraphes précédents le mentionnent, le brevet Marshall fait état
d'un ruban d'étiquettes à auto-adhésif porté par une bande porteuse. Un
dispositif (16) est prévu pour imprimer ou façonner le ruban. Les étiquettes
finales doivent être coupées selon les dimensions voulues. Le pignon
d'entraînement passe par des perforations pratiquées dans la bande porteuse.
Une différence par rapport à la réalisation antérieure est le moyen
d'entraînement. Celui-ci comporte, entre autres, le tambour d'enroulement 22
qui exerce une tension continue sur la bande porteuse qui passe par le point
de timbrage 20 depuis la bobine débitrice 11 et le rouleau 31 (voir figure 1
ci-dessus). Le dispositif Marshall utilise le pignon 26 pour l'entraînement
De plus, il ne met pas en évidence la coïncidence entre les dentelures et les
perforations d'entraînement. Le pignon est entraîné par les perforations
d'entraînement aux seules fins de synchronisation. La séparation du ruban de
sa bande porteuse se fait aussi d'une manière différente de celle du
dispositif antérieur cité. Il semble aussi que le brevet Marshall laisse
délibérément un espace entre les étiquettes alors que le demandeur fait état
d'un ruban à timbrer relié à une bande porteuse par un auto-adhésif de façon à
se détacher facilement. En d'autres termes, le présent dispositif a comme
caractéristique un ruban mixte formé d'un ruban à imprimer traversé, à distances
fixes, par des dentelures transversales qui délimitent les surfaces â timbrer
qui son détachées du reste du ruban après avoir été imprimées au point de
timbrage de l'appareil. Le brevet Marshall ne prévoyait pas de dentelure.
La différence entre le dispositif Marshall et le présent dispositif peut sembler
infime lorsqu'on examine les détails. Il nous faut cependant examiner
l'ensemble et ses résultats. Lors de l'audience, l'examinateur a déclaré que,
lorsqu'on connaît le problème, la solution est évidente. On doit se rappeler
qu'une part de l'invention, consiste, dans des cas comme celui-ci, à se rendre
compte qu'il existe un problème et à chercher à le résoudre.
A la lumière de ce qui précède, nous ne voulons pas suggérer au commissaire
que le demandeur n'apporte pas d'amélioration brevetable dans le domaine. Nous
ne sommes cependant pas satisfaits de la formulation actuelle de la revendication
1. Certaines de nos réserves concernent les méthodes d'utilisation du ruban.
La revendicaiton devrait s'appliquer clairement à un produit. Il nous
semble que dans ce cas le préambule devrait comporter un énoncé complet du
contexte d'utilisation du ruban Voici une formulation possible: "Pour
emploi dans une machine à affranchir, dans laquelle l'entraînement se fait
par la bande porteuse après le point de sortie et dans laquelle la synchronisation
entre le point de détachement et les dentelures s'effectue par l'intermédiaire
d'un mécanisme de rétroaction formé d'un pignon de repérage, d'un interrupteur
et d'un rouleau entraîneur motorisé, un ruban mixte comprenant..." Le reste
de la revendication serait modifié en conséquence. La dernière ligne devrait
être ainsi modifiée: "...cette dernière opération se fait à la sortie plutôt
qu'au point de timbrage".
En résumé, nous sommes convaincus que le demandeur a apporté une amélioration
brevetable dans le domaine. Il est indiscutable que l'ensemble présente une
nouveauté et nous pensons que l'invention fait preuve d'ingéniosité. Nous
recommandons donc que soit confirmée la décision finale de rejet de la
revendication actuelle mais que la revendication modifiée selon nos
recommandations et soumise après la décision finale, soit acceptée.
J.F Hughes
Vice-président,
Commission d'appel des brevets
J'ai étudié la poursuite de cette demande et je souscris aux recommandations
de la Commission d'appel des brevets. De même, j'accepterai la revendication 1
lorsqu'elle aura été modifiée, comme la Commission en a discuté. Le demandeur
dispose de six mois pour annuler la revendication modifiée proposée et pour
présenter la modification appropriée ou en appeler de cette décision aux termes
de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets
Fait à Hull (Québec) Mandataire du demandeur:
ce 18e jour de novembre 1977 Marks & Clerk
Box 957, Station B
Ottawa (Ontario)