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       DECISION DU COMMISSAIRE

 

ARTICLE 2 DE LA LOI SUR LES BREVETS - Gicleur produisant un jet liquide puissant.

 

La demande revendique un gicleur produisant un jet puissant. Elle a été

rejetée car la revendication définit la cavité du gicleur au moyen d'une

équation ce qui, d'après l'examinateur, résulte d'un progrès intellectual

plutôt que d'une différence matérielle. Toutefois, une personne qui utilise

cette invention n'a pas à faire preuve de jugement pour savoir quel genre de

gicleur construire. La revendication définit les caractéristiques matérielles

du gicleur par une formule qui en limite les dimensions et la forme; en outre,

elle appartient manifestement aux techniques utiles.

 

Décision: Annulée

 

**********************************

 

La présente décision porte sur une demande de révision par le Commissaire

des brevets de la décision de l'examinateur du 9 février 1976, au sujet de

la demande 176,809 (catégorie 299-29) déposée le 18 juillet 1973, au nom de

Lewis A. Glenn et coll. et intitulée "Gicleur produisant un jet liquide puis-

sant". La Commission d'appel des brevets a tenu une audience le 15 juin 1977

à laquelle M. P. Hammond représentait le demandeur.

 

La demande porte sur un gicleur produisant un jet liquide puissant, qui doit

s'adapter sur un appareil, afin de couper, de casser, de déformer ou de

nettoyer des matériaux. La figure 1 ci-dessous illustre schématiquement la

coure transversale d'une moitié de l'appareil, avec le contour de l'antériorité

(4) et celui que revendique la présente invention (5), lequel dispositif

s'adapte sur un piston plein.

 

                           <IMG>

 

       Dans sa décision, l'examinateur a rejeté la demande parce qu'à son avis,

       l'invention alléguée ne répondait pas à l'article 2 de la Loi sur les brevets

       et que, d'autre part, elle était évidente, compte tenu de l'antériorité invoquée

       dans la demande.

 

       Dans sa décision, l'examinateur déclarait (notamment):

       Compte tenu de l'antériorité, comme l'illustre la figure 1,

       la revendication ne se distingue que par les dimensions qui

       répondent à la formule ou équation de la revendication 1.

 

       Comme la distinction ne réside que dans une équation, ce qui

       constitue un acte intellectuel et non une différence matérielle,

       l'invention alléguée ne répond pas à l'article 2 de la Loi.

 

       Une fois que l'on a décidé que le gicleur revendiqué par le

       demandeur n'était pas différent des autres gicleurs (seules les

       dimensions changent), la seule nouveauté que l'on puisse alléguer

       est le processus intellectuel par lequel les paramètres physiques

       sont calculés. Ce genre de calcul ne peut être considéré comme

       une invention aux termes de la Loi.

 

       Evidemment, l'octroi d'un brevet n'est pas irrémédiablement

       compromis par l'absence de distinctions matérielles entre un

       article manufacturé nouveau et les articles anciens, à la

       condition qu'une autre forme de distinction existe, le procédé

       de fabrication, par exemple: mais, le procédé doit alors résulter

       d'un progrès matériel. Le gicleur de la revendication 1 ne se

       distingue que par le calcul de sa forme. Ce processus est

       purement intellectuel et ne répond pas à l'article 2 de la Loi,

 

       Dans sa réponse, le demandeur s'exprimait (notamment) en ces termes:

 

...

 

       La première objection de l'examinateur, dans sa décision, semble

       être que l'objet de la revendication 1 n'est pas brevetable au

       sens où l'entend l'article 2 de la Loi, d'après lequel une inven-

       tion signifie "toute réalisation, tout procédé, toute machine,

       fabrication ou composition de matières, ainsi qu'un perfectionne-

       ment quelconque de l'un des susdits", La revendication 1 de la

       demande porte sur un dispositif gicleur comprenant un gicleur avec

       une cavité interne et une certaine forme. Nous prétendons qu'un

       tel dispositif correspond exactement aux termes "machine" ou

"fabrication" de la définition. I1 est à peu près certain que

de nombreux gicleurs ont déjà été brevetés au Canada sans que

l'on se soit opposé aux revendications sous prétexte que les

gicleurs ne sont pas des objets brevetables. Un gicleur est un

produit concret, fabriqué suivant des procédés industriels,

comme beaucoup d'autres produits, et qui est vendu dans le

commerce de la façon habituelle. Nous ne voyons pas comment l'on

peut sérieusement opposer le manque d'objet brevetable, surtout

compte tenu de ce qui suit quant à l'importance des deux équations

de la revendication 1 qui déterminent le profit de la cavité

interne.

 

L'examinateur semble également fonder son objection sur le fait

que le gicleur revendiqué ne diffère pas matériellement de

l'antériorité. I1 est à remarquer, tout d'abord, que l'examina-

teur n'a opposé aucune antériorité aux revendications, à part celle

qui est invoquée dans la divulgation et illustrée dans le dessin.

Comme l'explique le deuxième paragraphe de la première page de la

demande, le profil interne du gicleur déjà connu a un rayon qui

diminue exponentiellement au fur et à mesure qu'il s'éloigne de

l'entrée du gicleur. Dans ce modèle, le taux de changement de

surface est relativement invariable par rapport à l'ensemble du

profil. Le profil du gicleur connu est représenté par la ligne

(4) de la figure 1, tandis que la ligne (5) indique le profil du

gicleur de l'invention. Cette figure illustre la seule antériorité

qu'admet le demandeur. Le profil du gicleur connu ne correspond

pas aux limites définies par les deux équations de la revendication

1. De fait, le demandeur a précisé et soutient fermement qu'il

n'existe aucun gicleur connu dont le profil interne corresponde

aux dimensions revendiquées. Comme vous le voyez facilement sur

la figure 1, les équations de la revendication 1 définissent un

profil qui est bien distinct du profil (4). Par conséquent,

1'examinateur se trompe lorsqu'il assure, dans sa décision, que le

gicleur de la revendication 1 ne présente aucune distinction

matérielle par rapport à L'antériorité.

 

L'examinateur prétend également que la nouveauté de la revendication

1 réside uniquement dans le processus intellectuel par lequel sont

calculés les paramètres physiques des gicleurs. Ici encore, c'est

faux, car, comme il est indiqué précédemment, le gicleur de la

revendication 1 présente réellement des différences matérielles

par rapport à l'antériorité....

 

A l'audience, M. Hammond a présenté des points intéressants et pertinents. la

question fondamentale, pour la Commission, est de savoir si l'objet de la

demande répond à l'article 2 de la Loi. La revendication 1 se lit comme suit:

 

Un gicleur produisant un jet liquide puissant devant

s'adapter sur un appareil, afin de couper, de casser, de

déformer ou de nettoyer des matériaux; ce dispositif

comprend un gicleur avec une cavité interne de façon à

recevoir une colonne liquide, le profil de ladite cavité

ayant une ligne de convergence continue située entre les

limites définies par les deux équations suivantes:

 

<IMGS>

 

A  section interne variable

A  valeur de A à l'entrée du gicleur

A o  valeur de A à la sortie du gicleur

L e  longueur du gicleur depuis l'entrée jusqu'à la sortie

X  coordonnée variable le long de l'axe du gicleur

 

Nous précisons ici, que l'élément A de la revendication 1 est la "surface de

coupe transversale interne et variable du gicleur".

 

Nous faisons remarquer qu'aucune antériorité n'a été opposée aux revendications

de cette demande, à part celle qui est admise dans la divulgation. Cette an-

tériorité est illustrée par la ligne (4) de la figure 1.

 

La principale objection énoncée dans la décision repose sur le manque d'objet

aux termes de l'article 2 de la Loi.

 

L'examinateur indiquait: "Comme la distinction ne réside que dans une équation,

ce qui constitue un acte intellectuel et non une différence matérielle, l'in-

vention alléguée ne répond pas à L'article 2 de la Loi."

 

Ce que nous cherchons à savoir, c'est si la nouveauté réside uniquement dans

un certain exercice de jugement. Les limites du gicleur sont définies par des

formules qui, en fait, décrivent la structure des gicleurs. Tous les gicleurs

dont les dimensions ne dépassent pas les limites prévues par ces formules ont

le rendement désiré. Une personne voulant mettre en pratique cette invention

n'a pas à faire preuve de jugement pour savoir quel genre de gicleur construire.

Elle n'a qu'à suivre les indications de la revendication. Il importe peu que

la forme du gicleur soit décrite par une formule ou par des mots. Dans les

deux cas, c'est une structure précise qui est revendiquée. Dans le cas qui

nous intéresse, les formules représentent le mode de description le plus facile,

et nous ne voyons aucun motif valable de prétendre le contraire. Étant donné

les faits qui nous ont été présentés, nous sommes convaincus qu'il n'est pas

nécessiare de faire preuve de jugement pour mettre l'invention en pratique.

La formule n'est qu'une autre façon de décrire les dimensions d'une structure

et sa forme matérielle. Les machines et appareils nouveaux ont toujours été

brevetés s'ils possédaient le niveau inventif requis, s'ils étaient utiles et

clairement définis dans la revendication.

 

Par conséquent, nous sommes convaincus que la revendication 1 définit les

caractéristiques matérielles du gicleur, au moyen d'une formule qui en limite

les dimensions et la forme matérielle, et qu'elle appartient donc aux techniques

utiles. A notre avis, les motifs de rejet en vertu de l'article 2 de la Loi

devraient être retirés.

 

A l'appui de son rejet, l'examinateur a également déclaré: "... la revendica-

tion 1 ne définit pas de différence structurelle nouvelle par rapport au gicleur

connu..." (voir la décision du 17 avril 1975 et la décision finale).

 

Nous estimons que dans l'équation de l'antériorité, "n" tend vers plus ou moins

l'infini. Par contre, dans l'équation de la présente invention (voir la re-

vendication 1), "n" est supérieur ou égal à -5, et inférieur ou égal à -1.

Autrement dit, dans la présente demande, "n" doit être un petit nombre négatif.

 

Comme il a été mentionné, l'examinateur n'a invoqué aucune antériorité dans sa

décision, mais s'est fondé sur celle qu'avait mentionnée le demandeur. La

structure de la cavité interne du présent gicleur est manifestement différente

de l'antériorité (voir la figure 1 qui compare les deux profils). Il semble que

le demandeur ait choisi un certain étalement afin d'obtenir des résultats

optima. Nous n'avons aucune raison de contester qu'il y a une différence

considérable de performance, comme l'a fait remarquer M. Hammond à l'audience,

et que le demandeur a apporté un perfectionnement important dans la technique.

Ce dernier a atteint un résultat d'une façon nouvelle et profitable, ce qui

nécessitait de l'originalité.

 

En bref, nous sommes convaincus que le demandeur a réalisé un progrès breve-

table dans les techniques utiles et nous recommandons que la décision de l'exa-

minateur soit annulée. La revendication 1 sera modifiée, tel qu'il a été

mentionné plus haut, afin d'apporter plus de clarté.

 

Le président adjoint

Commission d'appel des brevets

 

J.F. Hughes

 

J'ai examiné l'instruction du cas et la recommandation de la Commission d'appel

des brevets, et ai décidé d'annuler la décision. La demande est renvoyée à

l'examinateur afin qu'il en termine l'instruction.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

Fait à Hull (Québec)

ce 8 août 1977

 

Agent du demandeur

 

Fetherstonhaugh & Co.

Case postale 2999, Succursale D

Ottawa, Ontario

 

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