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                           DECISION DU COMMISSAIRE

 

EVIDENCE: Méthode et composition cour contrôler la croissance des surgeons des

          plants de tabac.

 

Les revendications relatives à la composition, qui portent sur des mélanges

d'alcools avec un support, ont été refusées parce qu'elles ne définissaient pas

un progrès techhique brevetable compte tenu des antériorités citées.

 

Décision: Maintenue

 

La présente décision porte sur une demande de révision par le Commissaire des

brevets de la décision de l'examinateur du 29 juin 1976 relative à la demande

n  955,790 (classe 71-12.0). La demande qui a été déposée le 24 mars 1966 au nom

de Tien C. Tso et autres s'intitule "Méthode et compositions pour contrôler la

croissance des surgeons des plants de tabac". La Commission d'appel des brevets

a tenu une audience le 8 décembre 1976; le demandeur y était représenté par M. M.

Marcus. Etaient également présents MM. Rice et Moss.

 

La demande porte sur une méthode servant à empêcher la croissance des surgeons

des plants de tabac par l'application d'une quantité d'alcool saturé C6 à C18

et porte également sur des compositions servant à empêcher la croissance. Dans la

décision qu'il a rendue, l'examinateur a refusé les revendications 23 à 32 relative

à la composition compte tenu des antériorités suivantes:

 

Antériorités citées à nouveau.

"Retardation et Evaporation by Monolayers" Lamar, (1962) pp. 205 et 224 à 230.

 

Brevets américains:

 

3,205,059 le 7 septembre 1965 Classe    71-2.7  Robertson

(correspondau brevet belge 615,406, le 13 avril 1962)

2,903,330 le 8 septembre 1959 Classe  21-60.5 Dressler

2,164,723 le 4 juillet 1939   Classe    252-6   Schrauth et autres

2,054,257 le 15 septembre 1936 Classe    252-6   Heuter

 

C.A. 44,8053 d

C.A. 50,13367 i

C.A. 47,11885 f

C.A. 51,10180 c

 

L'examinateur soulève entre autres les points suivants dans sa décision:

 

L'antériorité Lamar mentionne l'utilisation de diverses

émulsions d'alcools grad C12 à C24, y compris des émulsions

d'alcool-Tween. Ladite antériorité indique précisément que

les émulsions d'alcool gras sont généralement connues. La

lettre de modification du requérant qui est datée du 24 avril

1970, indique cependant que ces émulsions ne sont pas nouvelles.

Se reporter aussi à la page 1 de la lettre de modifications du

6 novembre 1975: "bien qu'il soit reconnu que les émulsions

d'alcools gras peuvent être connues...".

 

Le brevet américain no 3,205,059 qui a été accordé à Robertson,

porte sur des émulsions d'alcools gras qui sont utilisés afin

de réduire la transpiration végétale.

 

Le brevet américain no 2,903,330, délivré à Dressler, porte sur

des émulsions d'alcools gras utilisées afin d'empêcher l'évapo-

ration de l'eau, à partir des lacs, par exemple.

 

Le brevet américain no 2,164,723 accordé à Schrauth et autres,

porte sur des émulsions d'alcools gras qui sont utilisées comme

des produits de base pour certaines compositions thérapeutiques

et cosmétiques.

 

Le brevet américain no 2,054,257, délivré à Heuter, porte sur

l'émulsification d'acides gras, leurs esters et leurs alcools

(utilisés par exemple pour le traitement des textiles).

 

Les quatre abrégés de chimie cités traitent d'émulsions d'alcools

gras.

 

En règle générale, les antériorités susmentionnées portent sur

des émulsions d'alcools et d'autres substances grasses identiques

dans l'eau. Elles démontrent donc clairement que l'utilisation

d'une composition d'alcools gras émulsifiée n'est pas nouvelle.

Par conséquent, les revendications 23 à 32 sont refusées parce

qu'elles sont évidentes compte tenu des antériorités déjà citées.

 

Suite à la décision de l'examinateur, le requérant a examiné et cité la

jurisprudence traitant de la "sélecaion" des brevets. Il soulève notamment les

points suivants:

 

Dans ce cas précis, les requérants ont revendiqué un produit ou

une composition différente (étant donné la nature spécifique et

très sélective des alcools gras). Comme ces compositions n'étaient

pas utilisées pour "enlever les surgeons" des plants de tabac, je

crois que cela suffirait à écarter l'idée qu'une antériorité a

déjà prévu les revendications des requérants. Il est clair que

l'examinateur est d'accord avec l'affirmation du requérant selon

laquelle il existe une utilisation non évidente à cause d'une

composition semblable parce que l'examinateur soutient les points

suivants:

"Il n'a jamais été suggéré que l'antériorité

citée mentionnait l'utilisation de compositions

d'alcools gras pour empêcher la croissance des

surgeons des plants de tabac".

 

Cependant, il faut distinguer ce cas d'un autre cas semblable,

c'est-à-dire la demande no 948,406 (Brevet no 968,176 22 C.P.R.

(2d) 245 accordé le 24 mai 1972. Il s'agissait de l'ensemble

d'une revendication qui portait sur une composition servant à

empêcher la croissance des surgeons des plants de tabac et

comprenant un mélange d'une certaine quantité d'un agent d'émul-

sification et au moins un ester inférieur d'alcoyle d'un acide

grad C6 à C18 qui "a été décrit en détail", par deux antériorités

qui mentionnaient respectivement des émulsions aqueuses de lino-

léates d'éthyl et de méthyl et des esters d'acide gras émulsifiés

comme par exemple des émulsions d'huile dans l'eau qui contiennent

des esters de méthyl, d'isopropyle ou de butyle d'acide gras com-

le palmitate d'isopropyle pour utilisation comme émollient. Ce-

pendant, le requérant dans le cas qui nous intéresse présentement,

ne revendique pas une invention générique mais une invention

sélective au sens général de l'antériorité. Comme le requérant

prétend qu'il revendique un brevet sélectif, nous citerons donc à

nouveau les principes généraux qui régissent la validité de la

sélection des brevets comme nous l'avons déjà mentionné dans les

brevets I.G. Farben Industry A.G. 47 A.P.C. pages 289 à 332: (1)

la sélection doit assurer un certain avantage par l'utilisation

d'éléments choisis; (2) tous les éléments choisis doivent

posséder l'avantage requis; mais quelques exceptions à la règle

ne seraient pas suffisants pour annuler le brevet; (3) la

sélection doit tenir compte "du type spécial d'une qualité" qui

est propre au groupe choisi et elle ne doit pas être évidente à

un expert. Il est également essentiel que "le titulaire du brevet

définisse clairement la mature de la caractéristique que la sé-

lection est censée posséder... il doit divulguer une invention;

il ne le fait pas dans les cas d'une sélection pour des caracté-

ristiques spéciales s'il ne définit pas ces caractéristiques de

la façon appropriée".

 

                               ...

 

Les revendications du requérant concernent donc en résumé une

nouvelle composition qui est spécialement adaptée à une utilisation

imprévue. Cette composition spéciale est nouvelle parce que

l'antériorité ne divulgue pas spécifiquement l'utilisation d'un

alcool gras C8-C12 combiné à un agent mouillant; cette composition

particulière posséde un autre élément de nouveauté puisqu'il

s'agit d'une sélection faite à partir d'un grand nombre de composés.

Cette composition spéciale est également une invention puisqu'elle

possèce une utilité reconnue imprévue peu évidente. Par conséquent,

il est prouvé que toutes les exigences de la brevetabilité ont été

satisfaites et que les revendications sur la composition sont

brevetables.

 

Les revendications 1 à 22 qui concernent une méthode pour empêcher la croissance

des plants de tabac sont considérées comme acceptables. La revendication 1 se

lit comme suit:

 

Une méthode pour empêcher la croissance des surgeons des

plants de tabac, par l'application sur lesdits plants d'une

certaine quantité d'un alcool saturé C6 à C18 ou d'un mélange

de deux de ces alcools ou de plus de deux.

 

Nous sommes d'avis que le fait de découvrir que des alcools C6 à C18 connus

peuvent être utilisés efficacement pour empêcher la croissance des surgeons des

plants de tabac constitue l'étape inventive qui rend l'invention tout à fait

valable. (se reporter à Raleigh Cycle Co. Ltd. c. H. Miller et Co. Ltd., (1946)

63 R.P.C. 113).

 

Le requérant peut obtenir dans ce cas des revendications ayant trait à la

méthode d'utilisation comme les revendications qui sont déjà considérées comme

acceptables. Il eput également obtenir de nouvelles revendications sur la

composition qui seraient adaptées spécialement à la nouvelle découverte. Cependant,

la nouvelle composition ne doit pas être artificielle pour éviter l'antériorité.

Elle doit donc faire partie intégrante de l'invention. Par exemple, une certaine

quantité de "poussière d'or" que l'on ajouterait à une vieille composition

pourrait conférer un certain caractère de nouveauté, mais à moins que ladite

quantité de poussière d'or ne contribue à la réalisation de l'invention, elle ne

rendrait pas nécessairement la nouvelle composition brevetable.

 

Au cours de l'audience, MM. Marcus et Rice ont soulevé quelques points intéressants

que nous devons examiner très attentivement. Dès le début de son exposé, M.

Marcus admet que le refus des examinateurs était partiellement fondé. Il avoue

que certaines revendications du dossier ayant trait exclusivement aux alcools

gras n'étaient pas brevetables compte tenu des antériorités. "Il présentait

alors les revendications modifiées 23 à 32 portant sur un agent mouillant et un

mélange d'alcools afin que la Commission les examine.

 

La Commission doit déterminer si les nouvelles revendications modifiées

constituent ou non une nouvelle composition qui est adaptée spécialement à la

nouvelle découverte. La revendication 23 se lit comme suit:

 

"Une composition destinée à empêcher la croissance des

surgeons des plants de tabac et comprenant un mélange un

agent mouillant et d'un composé d'alcool gras contenant un

mélange d'au moins deux des alcohols gras suivants: C8, C9,

C10, C11 ou C12.

 

Au cours de l'audience, M. Marcus a déclaré qu'il était surtout préoccupé par

des revendications de "type sélectif" et a mentionné les critères s'y rapportant.

D'abord, les éléments sélectionnés doivent procurer un avantage important". La

Commission se posait donc la question suivante: "Est-ce que les éléments

séléctionnés procurent un avantage important par rapport aux alcools individuels

qui, comme vous le concédez actuellement, ne sont pas brevetables." La réponse

fut la suivante: "Je ne le pense pas, nous ne pouvons affirmer qu'un mélange de

la série C8 à C10 présenterait un avantage par rapport à une seule pièce." Il

est évident que les éléments sélectionnés, comme ils ont été revendiqués, ne

satisfait pas au critère de "l'avant age important".

 

On a également considéré un autre critère: "La sélection doit être en fonction

du caractère spécial d'une qualité que l'on peut considérer honnêtement comme

étant caractéristique du groupe choisi". Nous sommes d'avis que ce caractère

spécial n'est pas propre au groupe choisi comme on l'a mentionné à l'audience:

"Ils sont également propres aux compositions que vous ne revendiquez pas ici,

comme dans le brevet Heuter. Un alcool unique mélangé à un agent mouillant a les

mêmes propriétés que vous revendiquez." Le requérant admet que les alcools C8,

C10 et C12 auraient la même utilité s'ils étaient seuls. Dans le résumé qu'il

faisait au cours de l'audience, M. Rice avançait en outre que: "Je ne crois pas

que nous affirmons que le mélange eat supérieur à l'alcool C8, C10 ou même C12.

La série C8 à C12 est efficace pour empêcher la croissance des surgeons des plants

de tabac et le mélange l'est également. Notre intention n'est pas de faire des

distinctions entre le mélange du requérant et l'un des alcools de la série 8 à

12 au plan de l'efficacité."

 

Dans la jurisprudence sur les brevets, nous retrouvons le principe suivant:

"une simple sélection entre des solutions possibles ne constitue pas un objet.

Pour être brevetable, une sélection doit être fiate afin d'assurer un certain

avantage ou éviter un certain désavantage. Il s'ensuit donc que lorsqu'il

s'agit de décrire et de déterminer la nature d'une invention qui consiste à

choisir entre plusieurs solutions possibles, on devrait considérer les avantages

possibles ou les désavantages à éviter." (se reporter à l'affaire Clyde Mail Co.

Ltd. contre c. Russell (1916) 33 R.P.C. 291).

 

La divulgation de l'invention, comme elle a été présentée, ne mentionne pas la

sélection spécifique qui fait maintenant partie des revendications modifiées.

Elle semble même se donner un point de vue différent. Par exemple à la page 7,

ligne 14 et suiv.: "compte tenu deus résultats expérimentaux l'efficacité des

alcools gras avec diverses longueurs de chaînes carbonées ne varie presque pas

pour le contrôle des surgeons." La revendication porte sur l'utilisation des

alcools de la série C6 à C18. Compte tenu du mémoire descriptif il est évident

que cette série constitue la véritable sélection ayant trait à la découverte de

la nouvelle utilité. Restreindre :les revendications à deux alcools au moins

(revendication 23) afin d'éviter l"antériorité ne constitue pas, croyons nous,

une véritable sélection.

 

Dans les circonstances actuelles, nous ne croyons pas que les preuves dont nous

disposons nous permettent d'accepter les revendications 23 à 32 parce que nous

aurions un "brevet de sélection". En outre, les revendications actuelles sur la

composition ne concernent pas plus l'utilité spécifique de l'invention que les

compositions déjà connues.

 

Compte tenu des antériorités, il est également évident que les compositions

émulsifiées d'alcool gras (c'est-à-dire 1 alcool plus 1 agent mouillant), sont

bien connus par les hommes du métier et le requérant admet ce principe. Le

fait de prendre uniquement deux alcools et de les mélanger avec un agent mouil-

lant n'est pas différent de l'utililsatin d'un alcool avec un agent mouillant, à

moins que l'on obtienne un résultas nouveau ou imprévu. Dans le cas présent on

n'a pas obtenu un tel résultat. Comme nous l'avons déjà indiqué, le résultat n'a

pas changé. Le requérant a soutenu également que lorsque vous fabriquez du C8 et

du C10 par exemple "vous n'obtenez pas un mélange pur", il est assez difficile

de séparer C8 et C10". Cette dernière affirmation est donc une preuve de l'ab-

sence de nouveauté dans la sélection de ces deux alcools.

 

La Commission verse au dossier uniquement parce qu'elle revêt un certain intérêt,

une citation d'un document, se rapportant à un mélange des alcools C10 et C12

(H. Luther et W. Hiemenz Chem. Eng. Tech. 29 530-5 (1957).

 

En dépit des affirmations du requérant, nous ne sommes pas d'avis que les

revendications 23 à 32 respectent les critéres nécessaires pour un brevet de

sélection. Par contre, nous croyons que l'invention présumée qui est définie

dans ces revendications est bien appuyée par les antériorités citées. La reven-

dication qui concerne une nouvelle composition présumée, est à notre avis,

véritablement artificielle et n'a aucune preuve pour l'étayer. De toute façon,

selon le requérant, il est tout à fait normal qu'un mélange d'alcools soit

fabriqué en même temps et dans une même quantité.

 

Nous recommandons de maintenir la décision de refuser les revendications 23 à 32

et de ne pas inclure les revendications modifiées 23 à 32 dans la présente

demande.

 

Le président adjoint

Commission d'appel des brevets, Canada

 

J.F. Hughes

 

J'ai étudié l'examen de cette demande et j'ai passé en revu les recommandations

de la Commission d'appel des brevets. Dans les circonstances, j'ai décidé de

refuser les revendications 23 à 32 ea de ne pas accepter les revendications

modifiées 23 à 32. Le requérant a un délai de six mois pour annuler les reven-

dications 23 à 32 ou pour en appeler de la présente décision en vertu des

dispositions de l'article de la Loi sur les brevets.

 

Le Commissaire des brevets

 

J.H.A. Gariépy

 

Fait à Hull (Québec)

le 24ième jour de février 1977

 

Mandataire du requérant

Moffat, Butler, Marcus & Graham

Case postale 2088, Succursale I

Ottawa (Ontario)

K1P 5W3

 

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