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                       DECISION DU COMMISSAIRE

 

EVIDENCE: Chaises

 

Ces chaises sont faites essentiellement de matériaux en feuilles en pliant les

surfaces réglées et développables. Les revendications étendues ont été refusées

compte tenu de l'antériorité.

 

Rejet: Confirmé

 

La présente décision concerne une demande de révision par le Commissaire des

brevets de la décision de l'examinateur datée du 29 juillet 1976 portant sur

la demande 142,751 (Catégorie 155-61.2). Cette demande a été déposée le 23 mai

1972, au nom de John A. Speidel, et est intitulée "Sièges et dossiers de

chaises". Monsieur J. Baker représentait le demandeur au cours de l'audience

tenue par la Commission d'appel des brevets, le 22 septembre 1976.

 

La demande concerne des meubles tels que des chaises, fauteuils ou autres, et

plus particulièrement des meubles faits essentiellement de matériaux en feuilles

en pliant les surfaces réglées et développables. Ces surfaces sont soit a)

plates, soit b) courbées, c'est-à-dire cylindriques, coniques et enroulées. Les

illustrations 14 et 15 ci-dessous montrent l'invention dans son ensemble telle que

décrite dans les revendications 1 à 3 rejetées.

 

                          <IMGS>

 Dans sa décision, l'examinateur a refusé les revendications 1 à 3 étant donné

 qu'elles concernent un objet non brevetable compte tenu des brevets américains

 suivants:

 

 3,069,204                 18 décembre 1962              Vesterhold

 2,541,835                 13 février 1951               Saarinen

 

Le brevet de Vesterholt divulgue un dossier et un bras de chaise faits à partir

 d'une pièce unique de matériau souple recourbé le long de lignes droites dont

 au moins une de leurs extrémités se terminent au bout de la pièce. (Voir

 illustration 3).

 

                              <IMG>

 

 Le brevet de Saarinen divulgue une chaise et souligne le fait que lorsqu'elle a

 pris sa forme, le sommet du cône disparaît, tel que le montre l'illustration 6

 ci-dessous:

 

                            <IMG>

 

 L'examinateur a convenu que la chaise décrite dans les revendications 1, 2 et

 3 est originale, mais il prétend que ce qui la distingue de l'antériorité ne

 constitue pas une caractéristique innovatrice. Il ajoute qu'une des façons de

 déterminer s'il y a ingéniosité dans l'invention est de rechercher un résultat

nouveau ou imprévu, c'est-à-dire, un résultat qui apporte des avantages

insoupçonnés par rapport à l'antériorité, or, d'après lui, il n'en est pas ainsi

dans les revendications rejetées. De plus, il déclare, notamment:

 

A la page 8 de sa divulgation, le demandeur s'exprime ainsi:

 

"De plus, il est à noter qu'en ce qui concerne toutes

les modifications de mon invention, seuls les

mécanismes de pliage sont nécessaires..."

 

Cela peut également s'appliquer au brevet de Vesterhold et coll.

dans lequel il est mentionné:

 

Malgré le fait que le matériau en feuille se plie dans

un sens seulement, le siège et le dos présentent deux

courbes et ce uniquement en raison des forces que

produit le pliage du matériau.

 

Tel que le montrent les illustrations, il a peu de courbes

doubles, mais ceci est sensé accroître la résistance du

siège et le rendre plus confortable. Etant donné que les

revendications du demandeur ne présentent pas ces caracté-

ristiques et sa demande ne comporte pas cet avantage.

 

Dans sa réponse du 7 juin 1976, le demandeur déclare:

 

"... pour obtenir la chaise de Vesterhold et coll., il

s'agit de combiner deux matrices assorties et qui

s'enchevêtrent."

 

Ceci est contraire aux revendications du brevet de Vesterholt.

De plus, les courbes à sens unique sont antériorisées et

décrites dans le brevet de Saarinen, notamment:

 

Cette caractéristique facilite ... le rembourrage d'une

telle chaise car les goussets sont superflus.

 

Le brevet de Vesterhold et coll. expose également le rembourrage

d'une chaise au moyen d'un coussin circulaire 38 collé à la

plaque du siège.

 

En réponse à la décision de l'examinateur, le demandeur souligne que sa chaise

est faite d'une pièce unique d'un matériau en feuille qui se déplie pour

former une surface plate et unitaire sans qu'il soit nécessaire de joindre les

rebords de la pièce ni de la découper. Il fait également état de l'antériorité

citée et des avantages que présente sa chaise par rapport à celle de l'anté-

riorité. La réponse se lit comme suit, (notamment):

 

...

 

Le brevet de Vesterhold et coll. concerne une chaise dont

la surface ne comporte essentiellement que des courbes à

à sens unique. On peut lire aux lignes 29 à 36 de la

              colonne 1: "De façon générale, on peut obtenir la forme

              voulue en pliant la plaque vierge une ou plusieurs fois le

              long d'au moins deux linges qui se recoupent, c'est-à-dire

              du périmètre jusqu'au point d'intersection desdites lignes

              de façon à ce que les courbes soient exécutées dans des

              directions opposées". (Nous soulignons). Le demandeur

              prétend respectueusement qu'il faut plier une telle chaise

              le long d'au moins 4 lignes, et non de deux comme le

              décrit Vesterholt. A l'appui de cette déclaration, le

              demandeur annexe un document rédigé par l'inventeur et inti-

              tulé "Characteristics of Structures That Are Fully Developable

              Without Slitting Within the Confines of the Structures". Ce

              document expose en détail les exigences des formes courbes

              entièrement développables.

 

              ...

 

              De plus, il ajoute que le brevet de Vesterhold se détache de

              la présente invention et comporte parfois des erreurs. En

              effet, il déclare que le pli qui rattache le dossier de la

              chaise à son siège (tels que conçus par Vesterholt) doit

              avoir une double courbe. Voir l'illustration 3 de son

              brevet. De plus, en ce qui concerne l'illustration 1, si

              le dernier pli mentionné était à courbe unique, une ligne

              devrait rejoindre les points d'intersection des lignes 5 et

              6, 3 et 4.

 

              ...

 

              La revendication 1 de la présente demande concerne une

              chaise composée d'un siège, d'un dossier et de pièces de

              raccord qui se déplient pour former une surface plate et

              unitaire. Cette déclaration exclut toutes les chaises

              comportant une surface à double courbe dont le matériau en

              feuille doit être étiré pour former la chaise. De plus, le

              siège, le dossier et les parties doivent être des surfaces

              réglées; les lignes se rencontrent sur la surface de la

              chaise aussi bien que sur la plaque vierge. Ceci exclut

              les cas où le matériau de la chaise est fendu pour former

              sa structure.

 

              La revendication explique que les lignes des surfaces réglées

              ne forment pas une ligne droite qui s'étendent respectivement

              d'un bout à l'autre de la surface et de la plaque vierge.

              Autrement dit, si une ligne est droite, elle ne peut se

              prolonger d'un bout à l'autre de la plaque. Cette restriction

              distingue la présente invention des chaises entièrement

              développables mais dont les plis se prolongent d'une extrémité

              à l'autre de la plaque. La pièce justificative "B", ci-jointe,

              illustre ce genre de chaise. Il est à noter que pour que la

              chaise soit résistante, les dossier et les bras doivent être

              reliés aux points CC et DD respectivement. Etant donné la

              restriction (D), de telles. chaises sont exclues de l'étendue

              revendiquée.

 ...

 

Il faut comprendre que la mise au point d'une chaise

totalement faite de surfaces courbées dans un sens et en-

tièrement développables présente des avantages. Comme on

l'a mentionné plus haut, l'un des avantages réside dans la

facilité de recouvrir le matériau une fois la chaise

formée. Etant donné qu'elle se déplie complètement, il

n'est pas nécessaire de rattacher ni de tendre le matériau

qui la recouvre. Par conséquent, la housse peut être placée

sur la plaque avant de former la chaise; elles suivront donc

ensemble le processus de pliage.

 

Le deuxième avantage en est la facilité de fabrication. Il

est beaucoup plus facile de plier un matériau en feuille

étant donné qu'il n'est pas nécessaire de l'étirer. L'exa-

minateur déclare qu'il croit Vesterholt lorsque celui-ci

expose la facilité de fabrication de sa chaise. Toutefois, le

degré de force est relatif. Il peut être facile de fabriquer

la chaise de Vesterholt avec les forces requises mais la

fabrication l'est encore davantage avec la présente invention,

étant donné que les forces requises sont inférieures à celles

nécessaires pour l'invention de Vesterholt, laquelle invention

comme il est clairement indiqué ci-dessus, ne fournit pas une

chaise développable mais une chaise à courbes doubles.

L'invention de Vesterholt oblige à étirer le matériau pour le

~rmer et, par conséquent, exige des forces plus importantes

que pour la présente demande.

 

Il s'agit de déterminer si les revendications 1 à 3 concernent ou non un

objet brevetable compte tenu de l'antériorité. La revendication 1 se lit comme

suit:

 

Une chaise composée

(a) d'un siège, d'un dossier et de pièces de raccord,

 

(b) le siège au complet, le dossier et les pièces pouvant

être dépliées pour former une surface plate et unitaire,

 

 (c) le siège, le dossier et les pièces étant des surfaces

réglées dont les lignes se rencontrent sur la surface de

la chaise aussi bien que sur la plaque vierge,

 

(d) les lignes des surfaces réglées ne formant pas en se joi-

gnant, une ligne droite qui s'étend d'un bout à l'autre

de la surface et de la plaque, respectivement

 

(e) le siège, le dossier et les pièces n'ayant aucun appui

et pouvant supporter un poids.

 Au cours de l'audience, M. Baker a habilement exposé les points qu'il jugeait

 pertinents dans l'espoir d'établir une distinction entre la prétendue invention

 et l'antériorité citée. Il a également relevé certaines contradictions dans le

 brevet de esterholt. Nous nous efforçons de ne pas interpréter un mémoire à

 la légère ni de façon restrictive; il doit être lu et compris dans son ensemble.

 Par exemple, en générla, les illustrations doivent être considérées comme de

 simples dessins (voir Lovell Mfg. (Co. C. Beatty Bros. Ltd. (1962) 23 Fox Pat.

 C. 112 à 141) et non comme des croquis de travail (voir Raleigh Cycle Co. Ltd.

 c. Miller & Co. Ltd. (1948) C.P.R. 141 à 150. Toutefois, il nous semble clair

 que Vesterholt décrit la construction d'un siège de chaise en pliant une plaque

 unitaire.

 

 Il a également souligné les points suivants: a) la facilité de fabrication de la

 chaise étant donné qu'il n'est pas nécessaire d'étirer ni de plisser le matériau;

 et b) la facilité d'application du rembourrage sans qu'il soit nécessaire de le

 découper, de l'étirer ni de le déchirer.

 

 Toutefois, pour ce qui est du premier point, "sans avoir à l'étirer ni à le

 déchirer", nous rappelons au demandeur sa divulgation à la ligne 18 de la page

 7: en employant les expressions "sans avoir à étirer, à plisser ni à déchirer

 le tissu", je n'élimine pas le fait que lorsqu'il est plié, le matériau est

 évidemment plus épais ou "foncé" comme disent les spécialistes en la matière"

 

 M. Baker a également présenté nombre de modèle à l'audience, y compris un moule

 en plâtre considéré comme étant la maquette exacte (sur le plan mathématique) de

 la structure décrite dans la revendication 1. Toutefois, nous sommes d'avis que

 la définition mathématique de la forme de la chaise est une question théorique

 et n'a pas de grande importance pour l'utilité ou l'aspect inventif de la chaise.

 

Nous signalons que la chaise de Vesterholt est formée de pliures simples,

 réalisées avec une presse à cintrer, exactement comme avait fait le demandeur.

 Le degré de force requise est relatif. En utilisant un modèle en papier, une

chaise pliée comme le montre l'illustration 1 de Vesterholt pourrait avoir

un siège et un dossier de forme conoïde parabolique dont le bord intérieur

est en ligne droite et le bord extérieur en ligne courbe. Que cette chaise

soit de forme conoïde (surface gondolée et non développable) ou de forme

contrainte (surfaces planes et segments coniques), comme dans la présente demande,

n'est qu'une question de choix de la part du dessinateur et ne constitue pas un

élément brevetable.

 

La force de flexion requise est loin de dépasser la capacité des machines

existantes servant à plier le métal. en feuilles. Pour que le matériau reste dé-

foré, il doit être étiré au-delà de sa limite de résistance. Cette force exerce

des tensions secondaires sur le reste du matériau; aucune plaque de métal n'est

infiniment mince et par conséquent, les déformations secondaires qui en découlent

ne résultent simplement que d'un degré minime de force. Vesterholt déclare que

ces déformations augmentent la résistance du siège et le rendent plus confortable.

Nous n'avons aucune raison de mettre en doute ces constatations, ni de leur

accorder une grande importance. Il est également clair que lorsque les bords

extérieurs des chaises de Vesterholt sont repliés vers le bas, le siège et le

dossier se déforment davantage en raison des forces de flexion que subit le ma-

 tériau. Cependant, cet effet est bien connu.

 

Ceci nous amène à soulever un autres point relevé au cours de l'audience "... la

facilité du rembourrage". L'illustration 7 du brevet de Vesterholt montre une

chaise rembourrée d'un coussin de mousse plastique recouvert d'une housse en

tissu ou en plastique. De plus, il est indiqué à partir de la ligne 61 de la

colonne 3: "L'illustration 8 montre une coupe du coussin où 39 désigne une

plaque de mousse plastique, tandis que 40 illustre une housse de plastique ou

de tissu. Le rembourrage peut également consister en une plaque de mousse plastique,

une plaque de caoutchouc mousse, par exemple, collée à la plaque du siège".

Il est clair que ce coussin est circulaire et adapté à la forme du siège, par

pression; cette opération peut s'effectuer pendant qu'on forme la chaise ou après,

de faon à ce que le coussin adopte' la forme du siège.

 

Il est évident que dans le brevet de Vesterholt les lignes droites (3, 4, 5 et 6

de l'illustration 1) sont des articularions simples. D'ailleurs, Vesterholt n'en

divulgue pas d'autres. Les articulations composées qui sont mentionnées ne sont,

à notre avis, rien de plus que ce qui est connu sous le nom d'"articulation à

ressort". En outre, il faut se rappeler que les illustrations, comme on l'a déjà

mentionné, ne sont que des exemples.

 

Bref, nous sommes d'avis que le brevet de Vesterholt pris dans son ensemble

concerne une chaise formée en pliant une plaque unitaire. La première partie

(a, b et c) de la revendication 1 se retrouve clairement chez Vesterholt. La

partie d) de la revendication 1 se lit comme suit: "les lignes des surfaces

réglées ne formant pas, en se joignant une ligne droite..." Les lignes du brevet

de Vesterholt se rencontrent manifestement à un point donné, se conformant ainsi

à la restriction voulant que les lignes ne se rencontrent pas en "ligne droite".

Compte tenu de ce qui précède, nous sommes d'avis que la revendication 1 doit

être refusée.

 

Les revendications 2 et 3, qui dépendent de la première, constituent des variantes

de conception qui ne sont pas jugées brevetables compte tenu de la revendication

1 rejetée.

 

Un affidavit rédigé par M. R.J. Hurka a été présenté au cours de l'audience,

mais il ne détermine pas si la demande en question fait preuve d'originalité ou

non. Il indique seulement que M. Hurka a jugé les chaises "confortables et

satisfaisantes".

 

Nous sommes convaincus que les revendications 1, 2 et 3 ne constituent pas un

progrès brevetable compte tenu de l'antériorité. Nous recommandons, par conséquent

que soient rejetées ces revendications.

 

Le président adjoint

Commission d'appel des brevets

 

J.F. Hughes

 

Je souscris aux constatations de la Commission d'appel des brevets et rejette les

revendications 1, 2 et 3. Le demandeur dispose d'une période de six mois pour en

appeler de la décision en vertu des dispositions de l'article 44 de la Loi sur

les brevets.

 

Le Commissaire des brevets

 

J.H.A. Gariépy

                                    Mandataire du demandeur:

                                    A.E. MacRae & Co.,

Fait à Hull (Québec)                Case postale 806, Succ. B

ce treizième jour d'octobre 1976    Ottawa (Ontario)

 

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