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                  DECISION DU COMMISSAIRE

 

DIVULGATION SUFFISANTE: ARTICLE 36 - Diazacycloalcènes

 

Le requérant a revendiqué plusieurs méthodes de fabrication de nouveaux composés

chimiques qui ont une application médicale. L'examinateur désirait restreindre

le requérant à une seule méthode, arguant que les autres méthodes n'avaient pas

fait l'objet d'une divulgation suffisante. En raison des circonstances particu-

lières, à l'affaire, il a été décidé que les preuves à l'appui de la demande

étaient suffisantes.

 

Rejet: Renversé.

 

Le rejet final de la demande de brevet 090785, classe 260-263 déposée le 14 août

1970 par Farbwerke Aktiengesellschaft, qui agissait à titre de cessionnaire de

Robert Rippel et autres, a été soumis à la Commission d'appel des brevets pour

qu'elle l'étudie. L'invention s'intitule "2-(thyényl-3/-amino)-1, 3 diazacycloalcènes

et leur procédé de fabrication". A la demande du requérant, on a tenu une audience

à laquelle Mad. M. Morency et M. David M. Rogers, C.R. représentaient le requérant.

 

Dans sa décision, l'examinateur a rejeté la revendication 1 en raison de l'article

36 de la Loi sur les brevets, parce que la divulgation était insuffisante pour

appuyer tout l'objet de ladite revendication. L'examinateur a également invoqué

l'article 41(1) car quelques-uns des procédés revendiqués n'étaient pas "décrits

en détails" dans la demande. Les procédés sont ceux des parties c, d et e de la

revendication 1 qui se lit comme suit.

 

Procédé de préparation de 2-(thienyl-3/-amino)-1, 3-diazacycloalcènes

de formule générale

 

                              <IMG>

 

où R1, R2 et R3 représentent de l'hydrogène, un alcoyle de faible

poids moléculaire, un halogène, un radical cyanure ou un radical

phényle, R2 et R3 pouvant également constituer ensemble une

chaîne triméthylene ou tétraméthylène, et où Z représente un

radical alcoylidène à chaîne linéaire ou ramifiée, comportant de

2 à 4 atomes de carbone, dont 2 à 3 font partie d'un cycle,

      (a) un sel de thienyl-3-isothiuronium, thiourée, guanidine,

 nitroguanidine, ou cyanamide de formule II

 

                           <IMG>

 

 où R1, R2 et R3 ont la signification donnée ci-devant et

 où R représente le groupe

 

                         <IMG>

 

 -CN                                     (e)

 

 où R5 représente un alcoyle de faible poids moléculaire

 et X un anion acide - réagit avec un alcoylidène-diamine

 de formule III

 

         H2N-Z-NH2,               III

 

où Z a la signification donnée ci-devant - ou un monosel

 de ce produit,

 

 (b) un N-(3'-thienyl)-N' -aminoalkyl-thiourée

 

                     <IMG>

 

 où R1, R2 et R3 ont la signification donnée ci-devant et

 A représente de l'oxygène ou du soufre - subit une

 cyclisation,

(c) un aminothiophène de formule V

 

                       <IMG>

 

où R1, R2 et R3 ont la signification donnée ci-devant

- réagit avec du 2-alkylmercapto-1, 3-diazacycloalcène

de formule VI

 

                        <IMG>

 

où R5 et Z ont la signification donnée ci-devant - ou

un sel de ce produit.

 

(d) on fait réagir un aminothiophène de formule V avec un

chlorure de bis-(2-oxo-1, 3-diaza-cycloalkyl)-phosphrine

de formule VII

 

                       <IMG>

 

où Z a la signification donnée ci-devant, ou

 

(e) un thiophène-3-isocyanure-dihalogénure de formule VIII

 

                        <IMG>

 

où R1, R2 et R3 ont la signification donnée ci-devant

et où HaI représente du chlore ou du brome - réagit avec

un alcoyliolène-diamine de formule III.

 

Bien que l'introduction de la revendication 1 implique qu'un seul procédé est

revendiqué, il existe un grand nombre de procédés différents pour fabriquer

certains diazacycloalcènes. Lesdits alcènes possèdent des propriétés hypotensives

qui ont une application médicale.Il est donc possible d'invoquer l'article 41.

Dans la divulgation de l'invention, le requérant donne quelques exemples des

procédés (a) et (b), mais aucun pour les procédés (c), (d) et (e).

 

Dans sa décision, l'examinateur exprimait son opposition en affirmant notamment:

 

"Je maintiens le rejet des variations c, d et e de la revendica-

tion 1 parce que la divulgation n'est pas suffisante. Elle ne

respecte pas les exigences de l'article 36(1) concernant les

variations c, d et e et n'appuie donc pas suffisamment les reven-

dications, particulièrement aux termes de l'article 41(1) qui vise

à limiter le monopole des médicaments aux seuls procédés "décrits

en détails".

 

La divulgation de l'invention ne contient la description d'aucun

composé particulier fabriqué selon l'une des méthodes rejetées.

 

Si je me reporte à un paragraphe de la dernière décision qui ne

semble pas avoir été bien interprété je constate que: "Contraire-

ment à l'opinion du requérant, la divulgation ne fournit pas "la

description nécessaire pour permettre à un homme de métier d'arriver

auxdites variations". Les procédés ne sont pas à proprement parler

décrits. "

 

La divulgation n'indique pas la manière dont les variations rejetées

devraient être modifiées afin d'obtenir le résultat désiré et par

conséquent ne démontre pas l'utilité de la préparation des composés

revendiqués ni même la possibilité de réalisation d'une telle prépa-

ration. Les grands écarts de température et les multiples solvants

mentionnés ne constituent pas des informations mais plutôt une

absence d'information précise et; on ne communique donc au public

rien qu'il ne sache déjà.

 

Un brevet ne constitue pas une invitation à expérimenter et la

divulgation, relativement aux variations rejetées, ne suffit à

empêcher les personnes intéressées à se livrer à des expériences

afin de déterminer les manières d'aporter les méthodes et ce, sans

aucune garantie de succès.

 

Le concept selon lequel un procédé tire sa brevetabilité de celle

du produit ne constitue pas une exemption à l'article 36(1). La

décision d'accorder tous les procédés suggérés, rendrait totalement

inefficace l'article 41(1) car il suffirait d'incorporer une liste

complète des méthodes connue, comme substitut à la méthode employée

dans la synthèse originale: l'article 41(1) perd toute valeur si

une revendication concernant un composé couvre toutes les méthodes.

 

Dans sa réponse du 28 novembre 1974, le requérant présentait notamment le point

de vue suivant:

 

"Tous les procédés sont des réactions chimiques traditionnelles qui

tirent leur caractère brevetable de l'utilité nouvelle et non

évidente des produits de la formule mentionnée ci-dessus. Ce prin-

cipe est tout-à-fait conforme à la décision que la Cour suprême a

rendu dans l'affaire Ciba c. le Commissaire des brevets (1959) SCR 378.

 

Comme on le mentionnait précédemment, lesdites réactions étaient

considérées comme des réactions chimiques traditionnelles avant le

dépôt de la demande de brevet. Il est évident que ces réactifs n'a-

vaient jamais été auparavant mis en réaction ensemble puisque cela

viendrait à l'encontre de la nouveauté des procédés, mais des

réactifs semblables l'avaient effectivement été.

 

La variation c concerne la mise en réaction d'un composé de la

formule V avec un composé de la formule VI. Cette réaction est

mentionnée à la page 6 de la divulgation à partir de l'avant-

dernière ligne de la page 6 jusqu'à la ligne 15 de la page 7.

On y donne des instructions portant sur divers paramètres du

procédé. En outre, la page 7 contient le procédé de préparation

du produit de base de la formule VI.

 

Le requérant cite alors plusieurs publications selon lesquelles on avait déjà

utilisé des réactions semblables aux procédés c et d afin de fabriquer des

composés différents de ceux qui sont revendiqués. Lorsque le requérant commente

l'article 36(1), il déclare notamment:

 

Le requérant vous prie de croire que les exigences de l'article

36(1) ont été respectées dans la demande. L'invention concerne

des nouveaux procédés et leur utilité imprévue dans la fabrica-

tion de préparations pharmaceutiques. La demande décrit correcte-

ment et entièrement l'invention et l'usage prévu. Aux termes de

l'article 36, lorsqu'il s'agit d'un procédé, il est essentiel

d'exposer clairement les diverses phases du procédé et nous

l'avons fait pour chaque variation qui peut être utilisée pour

la préparation des nouveaux composés de l'invention. Nous avons

employé des termes complets, clairs, concis et exacts afin de

permettre à tout homme de métier qui connaît cette technique ou

cette science d'appliquer l'invention. Afin d'appuyer son

énoncé, le requérant avait joint une déclaration sous serment du

Dr. Leopold, professeur de chimie à l'université de Mainz d'Alle-

magne.

 

En se reportant à ladite déclaration sous serment, on remarqua

que le Dr. Horner a lu la divulgation de cette demande et qu'il

a utilisé les variations c, d et e du procédé pour préparer le

composé de l'exemple 1b, nommément 2-(4'-méthylthiényl-3'-amino)-1,

3-diazacycloalcènes-(2). Le bloc-note du Dr. Horner fait partie de

la déclaration sous serment. Il est à noter que le Dr. Horner croit

que la divulgation est suffisante pour permettre à un chimiste

expérimenté d'utiliser les variations c, d et e pour produire les

nouveaux composés.

 

Le requérant ne connaissait sans doute pas l'obligation d'inclure

des exemples pour appuyer une revendication de procédé. Dans

l'affaire Gilbert c. Sandoz; 64 CPR 14, la Cour de l'Échiquier a

frappé de nullité une revendication car aucun exemple spécifique

relatif au procédé revendiqué n'était donné dans la divulgation.

Cependant, en renversant cette décision, la Cour suprême affirmait

notamment:

 

"Selon moi, ceci n'est pas très important, étant

donné que le "procédé de condensation" n'est pas

revendiqué comme étant nouveau, et on ne peut nier

qu'un chimiste compétent aurait pu appliquer avec

succès ledit procédé sans disposer de plus d'infor-

mations que la description générale en contient

elle-même". (Sandoz c. Gilcross 8 CPR (2) 216).

 

Il est à noter que M. le juge Pigeon qui a rendu la sentence de la

Cour suprême considérait le procédé comme étant "décrit" même s'il

n'était pas appuyé par des exemples".

 

Ce dernier point est extrêmement important parce que l'examinateur

a soutenu que la divulgation de la demande n'était pas suffisante

pour appuyer les revendications, spécialement à cause de l'article

41(1) qui vise à limiter le monopole des médicaments aux seuls

procédés "décrits en détails". Le requérant soutient respec-

tueusement que chacune des variations c, d et e du procédé a

été décrite en détails et considère que la décision de la Cour

suprême dans l'affaire Sandoz c. Gilcross vient appuyer sa

présentation.

 

Lorsqu'il refute les objections de l'examinateur, le requérant déclare:

 

"Le requérant soutient que la divulgation indique certainement

le mode d'adaptation particulier des variations c, d et e qui

est nécessaire pour obtenir le résultat désiré. Cette position

est appuyée par la déclaration du Dr. Horner, "l'homme de métier"

à qui est destiné le mémoire descriptif du brevet. Un exemple

n'est pas nécessaire pour démontrer l'utilité de ces procédés

ou leur possibilité de réalisation et il n'y a aucun règlement

ou décision judiciaire qui oblige de citer des exemples.

 

L'examinateur a également soutenu que les très grands écarts

de température de même que les très nombreux solvants ne

constituaient pas en soi des informations mais plutôt une absence

d'informations précises. Le public n'en connaissait donc pas

plus qu'auparavant. Le requérant n'a jamais prétendu que les

procédés des variations c, d et e étaient des nouveaux procédés

chimiques mais simplement des procédés qui étaient classifiés

au moment du dépôt de la demande de brevet. Cependant, on n'avait

jamais mis ces procédés en réaction avec les divers réactifs pour

préparer les nouveaux composés de l'invention, lesquels ont une

utilité imprévue comme préparations pharmaceutiques. Si on con-

sidère l'ensemble de la divulgation, le public connaît des

éléments qui lui étaient inconnus auparavant, c'est-à-dire les

composés et leur utilisation.

 

et

 

L'examinateur a soutenu qu'un brevet ne constituait pas une

invitation à expérimenter et que la partie de la divulgation qui

traitait des variations rejetées n'était pas suffisante pour

empêcher les personnes intéressées de se livrer à des expériences

pour déterminer les véritables modes d'adaptation de la méthode

et ce, sans véritable garantie de réussite. Le requérant prétend

que la divulgation est suffisante pour permettre à un homme de

métier d'appliquer l'invention et ce ne sont uniquement que ces

éléments et c'est là tout ce qui est nécessaire.

 

M, le juge MacLean dans l'affaire BVD c. Canadian Celanese 1936, Cour de

l'Échiquier 140, soutenait notamment:

 

"Dans tous les cas où le mémoire descriptif d'un brevet explique

suffisamment en détails une invention pour permettre à un

"homme de métier" d'utiliser l'invention, même s'il est nécessaire

de se livrer à quelques expériences, le brevet sera valide aussi

longtemps que lesdites expériences ne feront pas appel à la

faculté inventive".

et

 

L'examinateur a également mentionné que si l'on devait

accepter tous les procédés suggérés, l'article 41(1) pourrait

devenir totalement inefficace car il suffirait d'ajouter une

liste complète des méthodes connues comme substituts de la

méthode employée dans la synthèse originale. Le requérant

n'a pas seulement évoqué des procédés il les a décrits. Les

revendications de la demande ne décrivent pas toutes les

méthodes mais seulement cinq méthodes qui ont été mentionnées

dans la divulgation afin de permettre à un homme de métier

d'appliquer l'invention.

 

Il s'agit maintenant de déterminer si la divulgation est suffisante et permet

la revendication de certains procédés. Dans le cas présent, l'élément principal

de l'invention est le produit et c'est en fonction de celui-ci que les revend

dications de procédé doivent acquérir leur ingéniosité inventive. Comme le

requérant l'a déjà mentionné: "tous les procédés constituent des réactions

chimiques classiques et tirent leur caractère brevetable de l'utilité nouvelle

et imprévue des produits..." Il mentionne à l'appui l'affaire Ciba c. le

Commissaire des brevets (1959) S.C.R. 378. Le requérant a affirmé qu'il existait

d'autres méthodes de fabrication des produits (réponse du 28 novembre 1974, p. 7),

mais la revendication 1 concerne les méthodes pratiques que l'on emploierait

généralement pour les fabriquer. C'est donc une revendication qui concerne toutes

les méthodes connues pour fabriquer ces produits et elle est presque une reven-

dication pour un procédé de fabrication des nouveaux composés selon toutes les

méthodes connues qui pourraient être employées pour leur fabrication. Elle

n'empêcherait pas les autres personnes de fabriquer les produits si elles avaient

l'intention d'élaborer de nouvelles méthodes inventives pour les préparer mais

contrôlerait toutes les méthodes utiles de fabrication des composés. Nous devons

aussi déterminer si l'article 41 permet à un requérant de déposer des revendi-

cations aussi larges.

 

Lorsque la Cour de l'Echiquier a statué sur l'article 36 (qui était alors

l'article 35) dans l'affaire RCA contre Raytheon (1956-1960) EX. C.R. 98 à 109,

elle a indiqué que la divulgation qu'imposait l'article à l'inventeur est une

lourde tâche.

 

On soulignait notamment, à la page 108:

 

L'un des principes essentiels de la législation sur les brevets

est qu'un inventeur ne peut revendiquer valablement un élément

qu'il n'a pas décrit. Selon la terminologie employée, la

divulgation du mémoire descriptif doit appuyer les revendications.

Sinon, les revendications sont nulles. En outre, il doit y avoir

divulgation et description, si l'on veut que la revendication

d'une invention soit valide....

 

Les juges indiquent également:

 

"L'objet de cette exigence est qu'une fois la période du monopole

expirée, le public devra être en mesure, ne disposant que du

mémoire descriptif, d'utiliser avec succès l'invention de la même

façon que l'inventeur peut le faire au moment de sa demande."

 

Le même principe se retrouve dans les affaires suivantes: Noranda Mines c. Minerals

Separation (1947) Ex. C.R. 306 à 316; French's Complex Ore c. Electrolytic Zinc

1930 S.C.R. 462 à 470, B.V,D. c. Canadian Celanese 1936 Ex. C.R. 139 et 138 S.C.R.

22, Smith Incubator c. Sealing 1937 S.C.R. 251, Gilbert c. Sandoz (1971) 64

C.P.R. 7 à 42-45 et Rhône-Poulenc D. Ciba c. Gilbert 1966 Ex. C.R. 59 et 1967

S.C.R. 45.

 

Nous avons déjà examiné le problème de la suffisance de la divulgation lorsque

la demande 028123 a été présentée à l'attention de la Commission. Nos conclusions

avaient été publiées dans la Gazette des brevets du 11 novembre 1975 à partir de

la page 11. Nous estimons qu'il serait utile d'examiner de nouveau l'un des cas

mentionnés.

 

Dans l'affaire Gilbert c. Sandoz (citée plus haut) à la page 52, la Cour de

l'Échiquier avait déclaré qu'une revendication de procédé était nulle pour les

motifs suivants:

 

... l'article 36(1) stipule que le requérant doit décrire

l'invention et son application ou utilisation éventuelle.

Le public et le lecteur son t censés être capables de

consulter une description de l'invention qui a été faite

par l'inventeur lui-même. Si l'inventeur affirme qu'un

groupe de prénothiazines substitués peut être fabriqué par

 un type connu de réactions chimiques, et ne fait qu'indiquer,

selon moi, ce qui est déjà connu, dans une affirmation générale,

et il ne dit pas qu'elle a été appliquée d'une façon particu-

lière en utilisant des matériaux particuliers et qu'il a

constaté que c'était là une méthode pratique de produire une

nouvelle substance utile connue sous le nom de thioridazine.

 

La Cour Suprême du Canada a cependant renversé la décision du tribunal inférieur

en se basant sur le point suivant (1974 S.C.R. 1336 à 1344):

... A mon avis, ceci n'est pas très important étant donné que

le procédé de "condensation" n'est pas revendiqué comme étant

nouveau et il n'est pas exclu qu'un chimiste compétent qui

utiliserait seulement les connaissances générales disponibles,

pourrait appliquer avec succès l'invention sans disposer de

plus d'information que celles de la description générale. On

ne peut nier en outre que le procédé bromo-éthane peut être

utilisé avec succès en fonction des directives et des réactifs

décrits à l'exemple 1 qui illustre l'application du procédé

relativement aux composés du chloro-éthane. Ainsi, la seule

objection qui peut être soulevée contre l'insuffisance de la

description des moyens de réaliser l'invention par le procédé

de chloro-éthane, bien que tout chimiste compétent saurait

qu'il doit s'y attendre; étant donné qu'aucune anomalie dans

le comportement du composé bromo-éthane au cours de la

réaction n'a été mentionnée."

 

Nous citerons aussi le passage suivant de notre décision antérieure:

 

"Comme il a été soutenu dans l'affaire Riddel c. Patrick

Harrison (1956-1960) Ex. C.R. 213 à 253, il n'est pas nécessaire

qu'un inventeur limite ses revendications "aux éléments décrits

en détails dans le mémoire descriptif et illustrés dans les

dessins annexés" mais l'inventeur peut déposer des revendications

aussi larges que des hommes de métier le feraient normalement.

Nous ne pensons pas que l'article 36 permette de refuser les

revendications 20 à 30 pour les raisons susmentionnées.

 

Dans l'affaire qui nous préoccupe, le requérant a déposé une déclaration

sous serment du Dr. Leopold Homer selon laquelle la divulgation est suffisante

pour permettre à un chimiste expérimenté d'utiliser les variations (c),(d) et

(e) ainsi que des copies d'articles, dont la date est antérieure au dépôt de la

demande de brevet, qui démontrent qu'on a utilisé des méthodes pour fabriquer

d'autres composés. Cette question ressemble sous certains aspects à l'affaire

Gilbert c. Sandoz. Par conséquent, nous sommes d'avis que la divulgation des

méthodes (c), (d) et (e) est adéquate et que le rejet basé sur l'article 36 ne

devrait pas être maintenu. Nous sommes d'accord pour affirmer que des "hommes

de métier" pourraient fabriquer facilement les composés désirés en utilisant n'im-

porte laquelle des trois méthodes mentionnées.

 

Examinons maintenant le deuxième élément de l'objection de l'examinateur. Pour

ce faire, nous devons nous reporter au paragraphe 1 de l'article 41 de la Loi

sur les brevets:

 

Lorsqu'il s'agit d'invention couvrant des substances préparées

ou produites par des procédés chimiques et destinées à l'ali-

mentation ou à la médication, le mémoire descriptif ne doit pas

comprendre les revendications pour la substance même, excepté

lorsque la substance est préparée ou produite par les modes ou

procédés de fabrication décrits en détails et revendiqués ou

par leurs équivalents chimiques manifestes. (nous soulignons)

 

   L'examinateur estime qu'il suffirait, pour rendre cet article totalement

   inefficace, d'ajouter une liste complète des méthodes connues comme substituts

   de la méthode employée dans la synthèse originale. Cette disposition serait

   complètement inutile. Il perdrait toute raison d'être si une revendication

   concernant le composé couvrait toutes les méthodes de fabrication dudit composé.

 

   Nous avons déjà parlé de l'affaire Gilbert c. Sandoz où l'invention était égale-

   ment régie par l'article 41. Lorsque la Cour suprême a jugé que le procédé de

   fabrication des dérivés du bromine était valable elle a affirmé implicitement

   que la revendication respectait l'article 41.

 

   Dans l'affaire Hoechst Pharmaceuticals c. Gilbert (1965) 1 Ex. C.R. 710 et 1966

   S.C.R. 189, la Cour de l'Echiquier et la Cour suprême ont examiné les revendica-

   tions de plusieurs procédés de fabrication pour des nouveaux produits pharmaceuti-

   ques. Le tribunal de juridiction inférieure a fait les observations suivantes:  

(à la page 720)...

 

   (à la page 720)...Nous avons par la suite plusieurs pages qui

   contiennent une description générale des méthodes - toutes très

   bien connues des chimistes - de même qu'une description de

   divers produits de base dont il est dit que beaucoup d'entre

   eux qui peuvent être utilisés dans le procédé présent ont fait

   l'objet de communications. Jusqu'à la fin de cette partie de

   la divulgation, il n'y a aucun élément pour indiquer l'existence

   d'une invention brevetable. Car ce n'est pas faire preuve

   d'esprit inventif que d'appliquer des méthodes connues à des

   matériaux connus ou certains autres genres de matériaux, même

   si personne n'a appliqué ces méthodes auparavant à ces matériaux

   particuliers et même si l''on assiste à la création d'un nouveau

   produit. Pour qu'il y ait invention brevetable, un produit

   outre qu'il est nouveau, doit être utile aux termes de la ter-

   minologie des brevets et ce n'est que si ces deux critères sont

   respectés que les produits et leur procédé de fabrication peu-

   vent faire l'objet d'un brevet. Se reporter aux commentaires

   de J. Jenkins dans l'affaire Re May & Baker et autres (65 R.P.C.

   255 à 281)

 

   et à la page 726

 

   ... Dans le cas de chaque brevet, la méthode de fabrication des

   urées mentionnée dans la revendication 1 n'était pas nouvelle

   et le brevet mentionne que beaucoup des produits de base étaient

   déjà connus. Lors du procès, on admit que tous les produits

   de base étaient déjà connus. Face à une telle situation les

   principes énumérés par J. Jenkins, dans l'affaire Re May & Baker

   (cité plus haut) et repris par le Cour suprême du Canada dans la

   cause Commissaire des brevets c. Ciba Ltd (1959 S.C.R. 378)

   semblent s'appliquer.

 

   Par la suite, le tribunal a déclaré que les revendications étaient nulles

   "parce qu'excessivement générales"' et qu'on ne pouvait dire que tous ou

   presque tous les membres de la catégorie des urées sulphonyles définies

possédaient un caractère utilitaire inconnu auparavant. (p. 731) Les conclusions

semblent impliquer dans le cas présent qu'en l'absence de revendications excessives

et si l'on peut affirmer que presque tous les membres de la catégorie possèdent

l'utilité requise, les revendications concernant les procédés seraient valides.

La Cour suprême l'a affirmé de cette manière: (p, 191)

 

"Il est admis que la tolbutamine, en elle-même, pourrait avoir

fait l'objet d'un brevet valide si on l'avait revendiquée ainsi

lorsqu'elle est préparée ou produite par les méthodes ou

procédés de fabrication décrits et revendiqués spécialement

dans le brevet ou par leur équivalent chimique manifeste." (nous

soulignons.)

 

Dans la demande que nous examinons présentement, on ne s'est pas opposé à l'étendue

de la catégorie de produits faits par les procédés et cette question n'est pas

pertinente. Il serait également utile de tenir compte des conclusions de

l'affaire Boehringer Sohn v Bell Craig 1962 Ex. C.R. 201 où l'on a examiné les

implications de l'expression "décrits et revendiqués en détails" à l'article 41,

paragraphe 1. Ainsi à la page 235 on soutient notamment:

 

Lorsque l'article 41(1) s'applique... il stipule que la revendi-

cation concernant la substance doit être limitée à cette même

substance lrosque cette dernière est préparée ou produite par

les méthodes ou procédés (a) qui ont été décrits en détail et

(b) revendiqués en détails ou (c) par les équivalents chimiques

manifestes des méthodes ou procédés qui ont été décrits et

revendiqués en détail.

 

Nous constatons donc que la seule restriction de la revendication

8 se retrouve dans les mots suivants "lorsque produite par les

procédés de revendication 1, 2 et 3 ou un équivalent chimique

manifeste". Lorsque nous examinons la revendication 1 pour

découvrir quel procédé de fabrication ou de production du 2-phényl-

3-méthylmorpholine est revendiqué, nous constatons qu'il ne s'agit

pas d'une revendication pour un procédé de préparation de ladite

substance mais plutôt d'une revendication pour un procédé de

préparation d'une large catégorie de substances. Et la substance

étudiée ne fait que partie de cette catégorie. A mon avis, la

revendication 1 ne concerne pas un procédé de production du

2-phényl-3-méthylmorpholine même si cette dernière substance fait

partie de la catégorie parce qu'il est évident qu'on ne peut

utiliser toutes les substances de la catégorie des produits de

base pour fabriquer 2-phényl-3-méthylmorpholine. La revendication

n'indique pas quel produit de base peut être utilisé pour fabriquer

du 2-phényl-3-méthylmorpholine. Donc, ladite revendication

n'énumère pas distinctement ou explicitement un procédé de

production de cette substance et, nous revenons aux commentaires

formulés sur la revendication 1 selon lesquels, elle ne concerne

pas l'invention de 2-phényl-3-méthylmorpholine mais porte

seulement sur l'invention présumée du procédé de production de la

catégorie de substance. Dans l'affaire Winthrop Chemical Co. Inc.

c. Commissaire des brevets, le Cour suprême a soutenu que: "on ne

peut tenir compte d'une revendication pour une substance tombant sous

le coup du paragraphe 1 de l'article 41 à moins qu'une revendication

ne soit formulée à l'égard du procédé de production", selon le juge

Martland dans l'affaire Parke Davis Co. c. Fine Chemicals of Canada,

Ltd: "un procédé implique l'application d'une méthode à un produit

ou des produits" selon Martland dans l'affaire du Commissaire des

brevets c. Ciba Ltd.

 

On retrouve les commentaires suivants à la page 237:

 

Relativement à la même présentation, on a souligné qu'en vertu de

l'article 41(1), la revendication ayant trait au 2-phényl-3-méthylo-

morpholine doit être limitée non seulement à cette substance lorsque

cette dernière est préparée selon les méthodes ou procédés qui ont

été décrits en détails ou leurs équivalents chimiques mainifestes, et

que la revendication ayant trait à cette substance de la revendica-

tion 8 n' est pas limitée aux méthodes et procédés qui ont été

décrits en détails. A mon avis, ce principe soulève une objection

incontestable contre la validité de la revendication 8. Selon moi,

les seuls procédés de préparation du 2-phényl-méthylomorpholine de

qui l'on peut dire qu'ils sont décrits en détails dans le mémoire

descriptif sont ceux des exemples 2 et 9. L'exemple 2 décrit un

procédé de production de 2-phényl-3-méthylmorpholine grâce à la

dissolution de B-phényl-à-méthyl-B, hydrochlorure de B-dihydroxy-

diéthylamine dans une certaine quantité d'acide sulphurique concentré

en laissant le mélange à la température de la pièce pendant une nuit

entière, fabriquer ensuite l'alkaline et procéder à l'extraction.

L'exemple 9 décrit un procédé selon lequel le même hydrochlorure de

tiéthanol - amine est chauffé avec 10% d'acide hydrochlorique pendant

6 heures dans un bain d'eau et le produit est alors traité "de la

manière habituelle".

 

La revendication relative au 2-phényl-3-méthylmorpholine de la

revendication 8 n'est pas limitée à la substance qui est préparée

ou produite grâce à ces 2 procédés ou leurs équivalents chimiques

manifestes. Cette revendication n'est même pas restreinte à cette

substance qui est produite par les procédés décrits en termes

généraux, comme on le mentionnait auparavant dans le mémoire

descriptif, ou leurs équivalents chimiques manifestes, car les

procédés ainsi décrits consistent uniquement à: (a) introduire un

diéthanolamine de la catégorie, sans chauffer, dans une certaine

quantité d'acide sulphurique concentre (96%); ou (b) traiter le

mélange avec de l'acide dilué à une température modérée. Ainsi,

même si, contrairement à ce que je crois, la description générale de

ces procédés pouvait être considéré comme étant suffisamment précise

pour respecter les exigences de l'expression "décrits en détails"

aux termes de l'article 41(1), et même si la revendication 1 concer-

nait véritablement un procédé de préparation ou de production de

2-phényl-3-méthylmorphine, la revendication 8 ne respecterait

toujours pas les exigences du paragraphe de la loi

 

Chercher à limiter la partie de la revendication 8 qui traite de

la substance en mentionnant uniquement la substance lorsqu'elle est

préparée selon le procédé de la revendication ou un équivalent

chimique mainfeste équivaut à ne pas tenir compte de l'exigence de

l'article 41(1) en vertu de laquelle la revendication peut être

limitée aussi bien à la substance "lorsqu'elle est préparée ou

produite par les méthodes ou procédés de fabrication décrits en dé-

tails.., ou par leurs équivalents chimiques manifestes". Comme nous

l'avons fait remarquer précédemment, la revendication n'est pas

limitée, comme l'est la description à l'utilisation de l'acide

sulphurique concentré à la température de la pièce et l'utilisation

de l'acide dilué à des températures médérées ni à la cyclisation de

la morpholine par l'action de l'acide sur la diéthanolamine. Je ne

crois pas non plus que tout ce qui est compris dans la revendication

1 le soit nécessairement dans les procédés du mémoire descriptif ou

leurs équivalents chimiques manifestes". La revendication 8 est

donc plus large que ne le permet l'article 41(1) et par conséquent

nulle.

 

La Cour suprême a confirmé (1963 S.C.R. 410) l'une des raisons invoquées par le

tribunal de première instance, sans se prononcer toutefois sur les autres motifs,

en soutenant que la revendication concernant le procédé était trop large et donc

nulle et que la revendication concernant le produit l'était également parce qu'elle

découlait de la première revendication. A la lumière de ses conclusions dans

l'affaire Gilbert c. Sandoz (cité plus haut), nous croyons toutefois qu'il n'est

pas nécessaire d'illustrer en détails chaque méthode revendiquée. Toutefois, le

"procédé même" de fabrication d'un produit doit être revendiqué dans tous les cas

où l'article 41(1) s'applique avant de revendiquer le produit lui-même. Comme

la Cour suprême l'affirme dans l'affaire Boehringer (p. 414):

 

... Le paragraphe (1) de l'article 41 visait à imposer des

restrictions strictes sur les revendications concernant les

substances produites selon des procédés chimiques et destinées

à l'alimentation ou la médication. Une telle substance ne

peut être revendiquée en elle-même. Elle ne peut être reven-

diquée que lorsqu'elle est produite selon un procédé de

fabrication particulier. Le demandeur doit non seulement

revendiquer la substance mais le procédé même de fabrication...

(nous soulignons)

 

Dans l'affaire qui nous intéresse actuellement, chaque revendication de produit

dépend de la revendication de procédé de production. La question de la présenta-

tion de revendications excessives n'a pas été soulevée et ne semble pas se poser

dans le cas présent. Dans tous les cas, la revendication qui a été refusée

concernait le procédé et non le produit à l'égard duquel il serait plus approprié

de formuler des objections pour ne pas avoir été revendiqué en détails.

 

Dans l'affaire Société Rhône-Poulenc c. Gilbert, 1967 S.C.R. 5, la Cour suprême

n'a exprimé aucune réticence quant à la revendication des méthodes multiples

lorsque l'article 41 est en cause et que toutes les méthodes sont connues. La

Cour soutient notamment à la page 48:

 

L'article 41(1) vise toute substance produite par 3 méthodes

ou procédés. L'article 41(1) permet une telle situation et

n'oblige pas la présentation de 3 demandes distinctes pour la

même substance, c'est-à-dire une demande pour chaque procédé....

 

Par la suite, le brevet a été jugé nul (1967, 35 F.P.C. et 1968 S.C.R. 950) à

cause de revendications excessives et parce que la catégorie de substances

revendiquée était trop large pour l'invention en question et parce que beaucoup

des composés revendiqués n'étaient pas utiles sur le plan thérapeutique. Ce n'est

toutefois pas l'objection qui a été invoquée pour rejeter la demande. La Cour

de l'Echiquier a également jugé que la divulgation de l'utilisation thérapeutique

des substances revendiquées n'était pas suffisante, objection qui aurait pu

être avancée, mais nous devons l'écarter étant donné que les examinateurs ont

accepté implicitement les méthodes (a) et (b) et les revendications de produits

qui en dépendent.

 

Dans l'affaire Boehringer Sohn c. Bell-Craig (1962) Ex. C.R. 201 et (1963) S.C.R.

410 le juge Martland a formulé les commentaires suivants sur l'article 41 à la

page 414, en prononçant le jugement de la Cour suprême:

 

... le paragraphe visait à  imposer des limites strictes aux

revendications concernant les substances produites grâce à des

procédés chimiques et destinées à l'alimentation ou à la

médication. Il est impossible de revendiquer une telle

substance en elle-même. Elle ne peut être revendiquée que

lorsqu'elle est produite selon un procédé spécial de fabliau-

timon. Le requérant doit non seulement revendiquer la substance

mais aussi le procédé de fabrication. Afin de respecter le

paragraphe en question, de la loi il doit donc déposer deux

revendications distinctes. A mon avis, le requérant doit donc

formuler des revendications valides à la fois pour le procédé

et la substance pour être en mesure de revendiquer avec succès

la dernière substance. Si on interprétait le paragraphe en

laissant sous-entendre qu'il suffit de déposer une revendais-

timon pour le procédé, qu'il soit valable ou non ce serait aller

à l'encontre de l'objectif du paragraphe. Une personne qui

revendique une substance aux termes du paragraphe, en s'appuyant

sur une revendication de procédé non valable ne se trouve pas

dans une meilleure position que le défendeur dans l'affaire

timon (Commissaire des brevets contre timon chemina 1948

8 C.R. 46). Le demandeur avait alors déposé des revendications

qui n'étaient pas assez larges. Dans le présent cas, le

demandeur a déposé des revendications trop larges...

 

Il est évident qu'il doit exister une revendication de procédé qui est valable.

Dans l'affaire Boehringer, le tribunal a jugé que la revendication de procédé

était nulle, non pas parce que le procédé n'était pas suffisamment décrit mais

parce qu'il était trop large car il englobait un grand nombre de composés qui

n'avaient pas le caractère utilitaire qu'on leur prêtait. Dans le cas qui nous

intéresse actuellement, l'examinateur n'a pas formulé ce genre d'objection. La

portée de la revendication sur les produits est beaucoup plus restreinte, et fait

plus important encore l'étendue des éléments revendiqués est appuyée par de

nombreux exemples de composés de cette catégorie qui possèdent l'utilité désirée

et qui sont assez nombreux dans l'affaire Boehringer. Dans ce cas, il est

probable qu'un "nombre important des substances imaginables faisant partie de la

catégorie définie" (Boehringer, p. 413) ont le caractère utilitaire mentionnée

dans le mémoire descriptif.

 

S'il est interdit au requérant de protéger son invention en revendiquant les modes

de fabrication mainfestes qui sont divulgués, il existe une certaine marge entre

l'invention divulguée et les éléments couverts par les revendications et le brevet

pourrait être aussi inutile que s'il n'était pas reçu. Tous auraient le droit

d'utiliser l'invention dans le domaine qui n'est pas protégé. (Burton Parson c.

 Hewlett Packard, S.C.C., 17 C.P.R. (2) 97 à 106). Dans la même page, la Cour a

refusé d'approuver une objection selon laquelle les revendications couvraient

"toutes les réalisations pratiques", laissant à l'homme de métier la tâche de

définir les détails de l'invention.

 

Dans l'affaire Boehringer Sohn c. Bell Craig 1962 Ex. C.R. 201 à 235 (affd. 1963

S.C.R. 410) nous constatons également que l'article 41(1) stipule que les revendi-

cations concernant les substances soient limités à cette substance lorsqu'elle

est préparée ou produite par les méthodes ou procédés qui ont été (a) décrits en

détails et (b) revendiqués ou (c) par leurs équivalents chimiques manifestes des

méthodes ou procédés qui ont été décrits et revendiqués en détails." (nous souli-

gnons).

 

Voici les conclusions que nous pouvons tirer de ces différents cas par rapport à

la question que nous étudions présentement:

 

(1) Une revendication de procédé n'est pas valable si elle englobe

la production d'espèces non opérationnelles, ou si elle est si large

qu'il est fort improbable qu'un nombre important des substances

fabriquées à l'aide de ce procédé ne possèdent pas l'utilité requise

qui est revendiquée. La revendication ne peut être purement théorique

ni englober un grand nombre de composés qui n'ont jamais été préparés.

 

(2) Lorsque l'article 41 s'applique, le requérant peut seulement

revendiquer les méthodes qui sont décrites en détail ou celles qui, si

elles ne sont que mentionnées permettraient à un homme de métier de

les appliquer facilement.

 

(3) Un composé chimique régi par l'article 41 ne peut être revendiqué

que lorsqu'il dépend d'une revendication relative au procédé qui sert

à le préparer. Si le composé chimique dépend, d'une revendication de

procédé, trop large, cela est malheureux.

 

A notre avis, il est également très important que la divulgation originale indique

clairement que le procédé a été utilisé et fonctionne. Ne mentionner qu'un procédé

"possible" pour la préparation des produits relèverait de la théorie et par le fait

même ne respecterait pas toutes les exigences. Dans le cas de la présente divul-

gation, indiquer clairement que le procédé a été utilisé et fonctionne. Par

exemple, nous retrouvons dans la description détaillée du procédé (e) à la page 7

du mémoire descriptif, les solvants employés, les températures utilisées et des

renseignements sur la réaction.

  Par conséquent, nous sommes d'avis que la revendication 1 ne devrait pas être

  rejeté pour les motifs avancés et nous recommandons de renverser la décision de

  refus. Cependant, cette décision ne doit pas être interprété comme signifiant

  que les revendications larges sur les procédés seront toujours acceptées, ni

  qu'elles sont acceptables lorsque la situation est différente ni qu'il n'existe

  pas d'autres motifs de refus. Dans plusieurs cas, les revendications larges des

  procédé qui tirent leur brevetabilité de l'utilité nouvelle et non évidente de

  leur produit pourraient être contestables comme étant purement théoriques, si elles

  englobent la production d'un si grand nombre de composés qu'il est douteux qu'ils

  aient tous la même utilité, s'il est évident que bon nombre des composés n'ont

  jamais été préparés ou s'il y a divulgation insuffisante de la façon dont les

  composés ont été employés. Toutefois, ces objections n'ont pas été formulées

  contre la revendication 1.

 

  Le président de la

 

  Commission d'appel

 

  Gordon Asher

 

  Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets et ordonne que

  la revendication 1 ne puisse être refusée pour les motifs énumérés dans la

  décision de l'examinateur. La demande doit être retournée à l'examinateur qui

  en reprendra l'examen.

 

  Le Commissaire des brevets

 

  J.H.A. Gariépy

 

  Fait à Hull (Québec)

  le 19ième jour d'août 1976

 

 Mandataire du requérant

 

Rogers, Bereskin & Parr

  Case postale 100

  401, rue Bay

  Toronto 1, (Ontario)

 

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