DECISION DU COMMISSAIRE
Evidence: Fusible
Surchargé, un revêtement de verre sur une résistance ouvre rapidement le
circuit. Les revendications ont été rejetées en vertu de l'article 45(4), tel
que démontré dans un brevet antérieur.
Rejet: Confirmé
La présente décision porte sur une demande de révision par le Commissaire des
brevets du rejet des revendications C1 à C18 inclusivement, y compris la demande
de brevet 155,163. Une lettre officielle datée du 28 octobre 1975, envoyée à la
suite du réexamen des revendications en vertu de l'article 45(4) durant la
procédure de conflits, visait le demandeur du rejet.
La demande a été déposée le 4 novembre 1971 au nom de Matthey & Mallory Limitée
sous la mention "Résisteur de fusion". La Commission d'appel des brevets a tenu
une audience le 3 mars 1976, à laquelle M. G. Seaby représentait le demandeur.
La demande porte sur un résisteur de sécurité (c'est-à-dire un fusible) améliorant
la technique d'interruption du courant passant dans le fusible lorsqu'il y a
surcharge. Le segment conducteur du fusible est revêtu d'un verre qui fond
lorsque sa température est plus basse que celle du conducteur, en provoquant
la destruction et interrompant ainsi le circuit. Des surcharges temporaires
ne feront pas fondre le verre, mais si elles se prolongent, le fusible
interrompt le circuit à des températures plus basses que celle de fusion du
conducteur, réduisant ainsi le danger d'incendie causé par des fusibles
surchauffées.
La lettre précisait que les revendications C1 à C18 inclusivement avaient été
rejetées parce qu'elles ne réussissaient pas à démontrer une amélioration
brevetable de la réalisation antérieure suivante: German Auslegeschrift
1,196,765 Le 15 juillet 1965 Kugelstadt
La lettre déclarait:
La publication brevetée décrit l'emploi d'un résisteur de sécurité
qui s'autodétruit en cas de surcharge grâce à une couche de verre qui
adhère, au moins en partie, au résisteur. La couche de verre
s'ionise au-dessus de son point de fusion et détruit le résisteur par
électrolyse. L'illustration montre un résisteur enroulé à
l'intérieur d'un tube scellé à l'aide de résine autour des électrodes.
Les revendications C1 à C18 sont donc rejetées pour avoir déjà
été anticipées dans la publication brevetée. Le demandeur doit, en
réponse à cette décision, soit révoquer les revendications C1 à C18,
soit démontrer une différence brevetable entre l'objet de la demande
et l'objet de l'antériorité.
Si le demandeur soutient toujours que l'objet de la revendication qui
a été rejetée est brevetable, et que la revendication continue à s'opposer
à une autre, la Commission d'appel des brevets réexaminera la revendication avant
que le Commissaire prenne une décision finale. Par conséquent, le demandeur
devrait soumettre toutes les raisons pour lesquelles, selon lui, la réalisation
antérieure invoquée n'est pas pertinente; de plus, s'il désire être entendu
par la Commission d'appel des brevets, il doit en faire la demande dans le délai
prévu pour répondre à la lettre, soit 3 mois.
...
La présente demande ne semble pas présenter de différence brevetable
avec la publication allemande. Nous traiterons toutefois de cette
question plus tard.
Dans sa réponse du 23 janvier 1976, le demandeur déclarait (en partie):
L'antériorité allemande citée ne mentionne pas l'utilisation d'un
revêtemet protecteur pour le résisteur, tel que revendiqué dans les
revendications contradictoires C1 à C7 et C10 à C18. En fait, le
résisteur n'a pas besoin d'un tel revêtement puisque le film résistant
de l'instrument de l'antériorité citée se trouve à l'intérieur d'un
tube. A vrai dire, l'antériorité montre bien l'emploi de cannelures
dans le matériau de la résistance, tel que soutenu dans les revendi-
cations contradictoires C6, C7 et C12 à C17. Le matériau de la
résistance est appliqué par bandes spiralées. L'antériorité citée
ne décrit pas l'emploi du verre disposé en anneaux autour du résisteur.
Qui plus est, l'antériorité n'indique pas l'emploi d'un oxyde
métallique comme film protecteur de la résistance. Elle parle de
métaux nobles, citant à titre d'exemple une couche métallique d'or
et de platine. Un métal n'est pas un oxyde métallique, ce dernier
étant un alliage dont les caractéristiques sont complètement différentes
de celles du métal. Pour ce qui est de leurs propriétés électriques,
par exemple, la conductivité d'un métal est inversement proportionnelle
à sa température alors que celle de l'oxyde métallique lui est
directement proportionnelle. A noter que l'emploi d'un oxyde
métallique dans la fabrication de résistances est revendiqué dans
chaque revendications contradictoires C2 à C4, C8 et C11. L'avantage
de l'utilisation d'un oxyde métallique dans une résistance, et en
particulier l'oxyde stannique, est expliqué dans le paragraphe qui
commence au haut de la page 3 de l'exposé.
Le brevet allemand décrit un résisteur de sécurité formé d'une base tubulaire
isolante renfermant, sur la face interne du tube, une couche métallique spirallée.
Les fils à l'entrée du tube se prolongent à travers les bouts scellées à la
résine du résisteur et sont soudés à la couche métallique enroulée. Du verre
pulvérisé recouvre plusieurs spirales de métal, de façon à permettre au verre,
en cas de surcharge, de fondre sur la couche métallique, interrompant ainsi le
circuit. Le conducteur du demandeur est enroulé autour de l'extérieur de la
base isolante, mais nous croyons qu'une telle modification ne change rien au
procédé.
La demande a trait à des résisteurs qui ont une couche de matériau disposée sur
une partie du film résistant du résisteur. Ce matériau a un point de fusion plus
bas que le film résistant et, lorsqu'il fond, sa réaction avec le film
interrompt le circuit. La revendication C1 stipule:
Un résisteur comprenant: une première couche isolante recouverte
d'un film résistant, une couche de matériau disposée sur au moins un segment
du film dont le point de fusion est inférieur à celui du film résistant et dont
la réaction chimique avec le film, lorsqu'elle fond, rend le segment isolant,
des petites plaques de métal disposées à chaque bout de la première couche
et recouvrant le film, des électrodes fixés aux plaques, et un revêtement
isolant entourant en grande partie le film et les plaques.
A l'audience, le demandeur et la Commission ont convenu de s'en tenir à
1 "'évidence" plutôt qu'à l'"antériorité". L'"évidence" a été traitée dans les
pages 1 et 2 de la lettre officielle; on y trouve des déclarations telles que:
"la demande ne semble pas présenter de différence brevetable avec la publication
allemande" et "démontrer une amélioration brevetable de l'objet de la réalisation
antérieure". Pour la Commission, il était clair qu'on ne pouvait prouver la
validité d'un rejet pour antériorité. Les deux fusibles présentent de petites
différences qui excluent la possibilité d'un tel rejet, mais pas nécessairement
un rejet pour évidence.
Le demandeur soutient que, dans l'antériorité, la température de fusion du verre
est plus élevée que celle du film, alors que, pour les revendications C1 à C18,
sa température de fusion est inférieure à celle du film résistant.
Dans sa description de l'antériorité, la publication allemande déclare (selon
la traduction):
"Jusqu'ici, les résisteurs étaient fabriqués avec du carbone, des bandes de
métal ou des fils et ils se comportaient comme des instruments de sécurité
qui, en plus de remplir leur fonction de résisteurs, s'autodétruisaient
lorsqu'il y avait surcharge de courant, interrompant ainsi le circuit dans
lequel se trouvait le résisteur et protégeant le reste des éléments du cricuit."
D'après la publication, de tels résisteurs ne sont pas satisfaisants car
"il arrive que la surcharge ne soit pas suffisante pour détruire rapidement
le résisteur; elle ne peut que le détruire lentement, notamment par une
désintégration progressive de la couche résistante. L'augmentation de la valeur
de la résistance entraînée (entre autres) par la désintégration de la couche
atteint bien souvent (à cet égard) une importance bien supérieure à la variation
maximale permise de la valeur nominale (nécessaire, voulue) de la résistance."
Le demandeur allemand continue de décrire la manière de surmonter de tels
obstacles, et nous citons:
L'invention résoud le problème de telle façon que la couche métallique,
à la base du résisteur, est recouverte, au moins en partie, de verre
adhérent à sa surface et dont la température de fusion correspond à
une température préétablie atteinte seulement en cas de surcharge; le
verre s'ionise seulement au-dessus de la température de fusion.
Comparativement aux résisteurs de sécurité connus qui sont faits de
couches métalliques, les résisteurs de sécurité de l'invention offrent
également plusieurs avantages sur le plan de la fabrication. Par
exemple, tout résisteur fait de couches métalliques peut se transformer
en résisteur de sécurité en y ajoutant une simple couche de verre
approprié, tel qu'employé d'habitude pour les résisteurs de sécurité.
En fonction de l'importance des pressions mécaniques auxquelles sera
soumis le résisteur de sécurité, des secousses à la position de repos,
le verre peut être fixé, sous forme de poudre, à la couche métallique
à l'aide d'une résine de silicone déposée à l'aide d'huile de silicone,
pulvérisée sur la couche métallique, ou même fusionnée sur la couche.
Il est évident que la publication allemande utilise bien un verre dont la
température de fusion est inférieure à celle du film résistant. Si ce n'était
pas le cas, ajouter du verre à l'invention n'aurait aucun sens puisqu'autrement,
le métal fondrait d'abord pour interrompre le circuit, comme il arrivait si
souvent dans les réalisations antérieures. Nous citons à nouveau l'antériorité
allemande:
Le but de l'invention est de fabriquer des résisteurs de sécurité
qui s'autodétruisent spontanément, non seulement en cas de surcharge
importante, mais aussi en cas de surcharge ne menant généralement
qu'au dépassement de la variation maximale permise de la valeur
nominale de la résistance, et non à la destruction du résisteur.
(Non souligné dans le texte)
Dans cette invention, le verre qui recouvre le film résistant fond, en cas de
surcharge, en raison de la chaleur qui se dégage du film résistant. Cette fusion
rend le verre conducteur, ce qui entraîne rapidement une modification de la
valeur de résistance du film et provoque la défaillance rapide du résisteur.
Le demandeur se sert du même procédé que la publication allemande, en vue du
même résultat.
Le demandeur a insisté sur le fait que la réalisation antérieure ne faisait pas
mention de l'emploi d'un film résistant fait d'oxyde métallique. Toutefois,
l'emploi, dans la réalisation antérieure, de films fait d'oxyde stannique est
bien connu. Voir, par exemple, à la page 1, deuxième ligne, de l'exposé du
demandeur où il admet lui-même le fait. Puisque la conductivité d'un oxyde
métallique est proportionnelle à la surcharge de courant, le film dégagerait
encore plus de chaleur avant de fondre que ne le ferait un résisteur métallique.
L'exposé du demandeur ne suggère nullement qu'un film résistant d'oxyde métallique
constituerait un meilleur résisteur que celui fait de métal et, d'après nous,
ne présente pas un progrès brevetable dans cette technique. Que le résisteur
soit fait de métal ou d'oxyde métallique n'a aucune importance dans le cas à
l'étude qui préconise l'emploi de verre et d'autres matériaux pour décomposer le
résisteur. Le demandeur est, de toute évidence, du même avis puisque la
principale revendication ne se limite pas aux oxydes.
Nous sommes d'avis que les revendications C1 à C18 inclusivement ne présentent
pas de progrès brevetable dans cette technique et estimons que la décision de
l'examinateur de rejeter la demande doit être confirmée.
Le président
Commission d'appel des brevets
G. Asher
Je souscris aux recommandations de la Commission d'appel des brevets. Je
refuse de concéder un brevet pour les revendications C1 à C18 inclusivement.
Le demandeur dispose de six mois pour révoquer les revendications ou en appeler
de la présente décision, conformément aux dispositions de l'article 44 de la
Loi sur les brevets.
Le commissaire des brevets
J. H. A. Gariépy
Hull (Québec)
en ce 22ième jour d'avril 1976
Mandataire pour le demandeur
Marks & Clerk
Case postale 957, Station B
Ottawa (Ontario)