DECISION DU COMMISSAIRE
EVIDENCE: Rouleau d'étiquettes
L'invention concerne un rouleau d'étiquettes, coupées et imprimées à l'avance,
si bien qu'ils peuvent être appliqués plus rapidement sur les contenants en
plastique et en verre. La présente demande est une division de la machine
à étiqueter dans laquelle le rouleau est destiné à servir.
Il a été décidé que l'invention faisait preuve d'assez d'ingéniosité pour que
l'on puisse accepter les revendications.
Rejet: Annulé
Le rejet final de la demande de brevet 094,016 (Catégorie 40/23) a été remis
à la Commission d'appel des brevets pour qu'elle l'étudie. Au cours d'une
audience devant la Commission, le 18 février 1976, M. O'Gorman s'est prononçé
au nom du demandeur. L'inventeur, Herbert LaMers, a intitulé sa demande
"Appareil à étiqueter".
L'invention revendiquée dans la présente demande est un rouleau d'étiquettes
destiné à servir dans la machine à étiqueter protégée par le brevet canadien
860,753, du 12 janvier 1971. La demande constitue une division de celle
qui a été brevetée; ces demandes ont toutes deux été inventées par la même
personne. Durant la procédure d'examen du brevet, l'inventeur a soutenu
que le rouleau d'étiquettes faisait partie d'une invention distincte de la
machine à étiqueter et qu'il tombait sous le coup de l'article 38 (bien que
le rapport ait fait état de l'article 36). La demande divisionnaire résulte
de cette objection.
Les étiquettes et l'équipement sont utilisés pour l'emballage ultra-rapide
de divers produits, tels que les contenants en plastique ou en verre pour les
détergents, les boissons et les produits alimentaires. Les étiquettes du
rouleau sont imprimées et coupées à l'avance afin qu'elles puissent se
détacher plus facilement avant d'être collées sur les contenants. Les deux
extrémités du rouleau comportent des trous dentés qui servent à faire avancer
le rouleau.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté la demande parce qu'il a jugé
qu'elle constituait un fait notoire ne présentant pas d'éléments brevetables,
compte tenu des antériorités suivantes.
Brevet canadien 414,033 20 juillet 1943 Sherman
694,818 22 septembre 1964 Mitzer
Brevet américain 2,259,358 14 octobre 1941 Templeton
Brevet français 1,095,874 7 juillet 1955 Burgner
A cette occasion, l'examinateur a formulé les objections suivantes:
Dans la modification qu'il a apporté aux revendications
s'appliquant à un rouleau de papier, le demandeur y ajoute maintenant les
limites de l'appareil et les opérations qu'il effectue. Le demandeur
reconnaît ces limites quand il dit: "l'objet revendiqué est défini et
limité en partie par l'appareil avec lequel il est employé". Cependant,
on maintient que les revendications qui s'appliquent à un accessoire tel
qu'un rouleau ou une bande de papier ne peuvent être fondées sur les
caractéristiques structurales d'un appareil particulier dans lequel on
prévoit utiliser le papier ou sur les détails d'une opération qu'effectue
un tel appareil, pour prouver qu'il y a nouveauté et, portant, invention.
Pour que les revendications soient brevetables, elles doivent non seulement
définir les caractéristiques structurales qui distinguent la bande ou le
rouleau de tout autre bande ou rouleau déjà connus, mais ces caractéris-
tiques structurales nouvelles doivent être suffisamment non évidentes et
ingénieuses pour qu'elles bénéficient des privilèges de monopole. On
estime que le fait que la bande soit coupée é l'avance et conçue pour une
machine à étiqueter sans couteau modifiée, ou le fait que le dispositif
ait la forme d'un rouleau, ne constituent pas des éléments brevetables.
Par conséquent, les revendications 1 et 4 à 7 ont été rejetées. De plus,
les revendications 2 et 3 qui précisent que des trous dentés en forme de U
et des pattes de retenue sont utilisés n'ajoutent rien de nouveau à la
revendication 1 et son également rejetées.
On maintient qu'en éliminant l'étape du découpage de la
machine de Sherman conçue pour effectuer d'innombrables opérations, le
demandeur crée un problème du fait que son instrument modifié ne fonctionnera
pas avec la bande continue de Sherman. C'est le seul "problème" que résoud
le rouleau coupé à l'avance. De plus, on prétend que le fait de couper à
l'avance une bande destinée à servir dans un dispositif Sherman dont le
couteau a été éliminé, manque d'ingéniosité par rapport au brevet Sherman.
Que le découpage se fasse dans la machine comme dans Sherman, ou qu'il se
fasse indépendamment comme dans la divulgation, est essentiellement une
question de choix. Cependant, une fois le choix fait, il est non seulement
évident mais essentiel pour le fonctionnement de la machine à étiqueter
modifiée que la bande soit précoupée. Dans un cas, comme celui-ci où il
ne se produit rien de non évident, la bande préoccupée n'est en soi-même
ni évidente, ni de caractère inventif.
Compte tenu des contraintes structurales décrites dans les
revendications, par opposition aux limites de l'appareil et des opérations
précitées, les seules caractéristiques définies dans les revendications
1 et 4 à 7 qui ne figurent pas dans Sherman sont la largeur des espaces
qui séparent les étiquettes et la forme en "rouleau" du dispositif. Comme
on l'a mentionné plus haut, le simple fait que l'invention comporte une
bande coupée à l'avance conçue pour s'adapter à la machine à étiqueter sans
couteau et modifiée ne constituer pas un progrès brevetable. De plus, le
fait que le dispositif ait la forme d'un rouleau constitue un fait notoire et
sa répétition n'ajoute rien de nouveau à ces revendications.
Il est évident que le couteau à crans de la matrice à
découper 28, comme le démontre l'illustration 6 de Sherman, coupera de façon
non continue, exac tement comme le décrivent les revendications. Ainsi, à
l'exception de la largeur des espaces entre les étiquettes et de la forme
ronde de la bande, le brevet Sherman comporte tous les détails de structure
définis dans les revendications 1, 4, 5, 6 et 7. Dans la divulgation
originale, le demandeur déclare que "bien qu'on puisse employer un plongeur
à piston ... divers autres types d'appareils peuvent également faire l'affaire...
ou un jet d'air peut être utilisé pour détacher l'étiquette de la pellicule
de support". La bande du demandeur n'est pas, par conséquent, exclusivement
conçue pour s'adapter à un plongeur comme l'indiquent les revendications 1 et
7. De plus, la divulgation originale précise simplement que la bande est
faite de papier ordinaire et que les espaces entre les étiquettes forment
des ponts 122, qui ont chacun une largeur W. Il n'est pas indiqué non plus
qu'une des surfaces du papier est spécialement "adaptée pour recevoir un
produit adhésif" ou que la largeur des "ponts" est prédéterminée ou
choisie de quelque façon que ce soit pour s'adapter à un genre particulier
d'appareil, comme le suggérent les revendications 1 et 7. Par conséquent,
on ne peut se fonder sur ces caractéristiques, soit individuelle ou combinées
à d'autres, pour définir l'invention.
Ni le fait que la bande coupée à l'avance s'adapte à la machine
à étiqueter modifiée comme on l'a fait remarquer plus haut, ni le fait que le
dispositif ait la forme d'un rouleau ne constituent des éléments brevetables.
Dans sa réponse du 2 février 1975 à la décision finale, le demandeur a déclaré
(en partie):
Dans la revendication 1, le demandeur ne s'est pas spécifi-
quement fondé sur les caractéristiques de l'appareil dans lequel le dispositif
d'étiquettes est employé ou sur le fonctionnement de cet appareil. Bien
au contraire, la revendication porte sur un dispositif d'étiquettes reliées
par des ponts qui les rattache à la pellicule de support. Ces ponts sont
simplement définis en fonction du plongeur élastique de l'appareil dans lequel
le dispositif d'étiquettes est censé servir, que le plongeur élastique sont
employé ou non. Ainsi, la revendication ne décrit pas les caractéristiques
de l'appareil avec lesquelles la pellicule est utilisée comme étant des
éléments indépendants de l'appareil mais plutôt comme ses composants.
Le demandeur estime que cette forme est tout à fait convenable.
En effet, l'invention est essentiellement fondée sur le fait
que les ponts des étiquettes sont définies en fonction de la nature du
plongeur-applicateur. Par conséquent, il est extrêmement important, non pas
qu'on puisse employer un plongeur élastique, mais que les ponts aient une
certaine largeur, spécifiquement définie comme étant celle qui permet le
détachement des étiquettes au moyen d'un plongeur élastique. Le fait qu'on
ait fait appel à un plongeur en ce genre n'est pas sans importance, mais
permet plutôt de fournir une description précise d'un élément indépendant de
la revendication. La phrase définit plus particulièrement la largeur des
ponts qui relient les étiquettes en des termes qui portent sur l'essence
même de l'invention. La largeur des ponts est exactement celle qui permet
aux étiquettes d'être retirées au moyen d'un plongeur élastique. Quant à
la présente invention, il s'agit dans une grande mesure de définir les
paramètres d'un composant structural de la combinaison revendiquée en fonction
de ce qu'il est capable de faire. Le composant ainsi défini, est structural
dans la mesure de ses capacités et l'on estime que la phrase précitée
combinée avec d'autres caractéristiques de la revendication, constitue un
élément brevetable très important. Ainsi, cette phrase n'est pas
considérée comme étant différente des termes normalement employés pour
décrire un brevet, tel que par exemple monté avec mouvement "rotatif"
ou de "glissement".
et
Un certains nombre des avantages qu'offrent le dispositif d'étiquettes
revendiqué ont déjà été signalés au Bureau des brevets, Il faudrait,
cependant, faire remarquer à nouveau qu'en ce qui concerne des étiquettes
coupées au moyen d'une matrice, l'objet revendiqué permet de faire des
étiquettes de toutes les formes possibles et que les dispositifs d'étiquettes
ne comportent pas cet avantage. De plus, la pellicule d'étiquettes revendi-
quée permet de se servir d'un produit adhésif sur la surface des étiquettes.
Etant donné que les pellicules existantes devait être coupées à l'atelier
de découpage, au moyen d'un mécanisme quelconque, il n'était pas pratique
d'appliquer un produit adhésif sur les extrémités des étiquettes étant donné
que ce produit pourrait coller ou bloquer l'appareil à découper. Etant donné
que l'invention du demandeur ne comporte pas d'appareil à découper grâce
au concept des ponts tel que revendiqué, les extrémités des étiquettes
peuvent être recouvertes d'un produits adhésif. Effectivement la matrice
à découper qui risquerait d'être bloquée, n'existe pas.
Le dispositif d'étiquettes revendiqué comporte un autre avantage important:
il permet l'élimination de tout équipement à découper intervenant dans
l'étiquetage proprement dit. Cet équipement augmentait non seulement le
coût de l'étiquetage, mais devait également être entretenu et manipulé par des
personnes qualifiées. Etant donné que le rouleau d'étiquettes revendiqué est
coupé à l'aide d'un appareil distinct, les pellicules d'étiquettes peuvent
être empilées et il n'est pas nécessaire d'interrompre complètement l'opération
d'étiquetage à chaque fois que les dispositifs de découpage tombent en panne.
Ces avantages s'appliquent certainement à tout le système d'étiquetage, mais
ils sont également tous fondés sur une théorie fondamentale: la structure
de la pellicule.
et
Le demandeur prétend qu'il n'y a aucune antériorité révélant ou laissant
entendre la nécessité d'un dispositif d'étiquettes comme l'indique les
revendications 1 ou 7 et il estime que l'objet revendiqué ne peut être jugé
évident, puisque le concept voulant que l'étiquette soit enlevée de la
pellicule et appliquée à un objet au moyen du même plongeur élastique était
inconnu jusqu'à ce que le demandeur présente sa propre divulgation. Dans
l'antériorité, on ne dit pas qu'il faut ou faudrait une pellicule d'étiquettes
reliées par des ponts dont la largeur est déterminée afin de permettre
l'enlèvement des étiquettes de la pellicule à l'aide d'un plongeur élastique,
sans que celles-ci se déchirent. Par conséquent, le demandeur croit que la
suggestion de l'examinatuer, à savoir que la structure revendiquée est
évidente en fonction de Sherman, ou de toute autre référence, ne peut être
qu'à la lumière de l'expérience et grâce à la divulgation du demandeur.
Le brevet Sherman concerne un appareil à adresser les enveloppes et les
paquets et à coller les étiquettes aux enveloppes et aux petits paquets de
façon successive. Une pellicule non coupée et pliée (ou bande de papier)
portant des étiquettes adressées est alimentée vers un couteau à mouvement
alternatif qui découpe l'étiquette sur la pellicule. Ensuite, l'étiquette
adressée est chauffée et collée à l'enveloppe qui se déplace avec la
pellicule jusqu'à ce qu'elle atteigne le poinçon. Celui-ci détache
l'étiquette ainsi que l'enveloppe qui y est jointe de la pellicule. La
revendication 1 du présent brevet se lit comme suit:
Dans un appareil à étiqueter, le dispositif d'alimentation de
la bande fait avancer l~ bande portant une légende par
mouvement progressifs et successifs; elle passe dans une
chambre de reproduction et un entrepôt et est découpée en partie
seulement au moyen d'une matrice, le long des lignes qui
divisent les portions imprimées de la bande devant être
détachées. Un applicateur qui fonctionne en relation avec
la chambre de reproduction entre en contact avec la bande et
retient sur la partie supérieure de la chambre une portion de
la bande imprimée; dispositif de détachement fonctionnant en
relation avec l'entrepôt fait avancer la bande pour enfin en
détacher la portion imprimée.
Les brevets de Metzner, Templeton et Burgner divulguent des trous dentés
qui sont disposés longitudinalement le long de la pellicule. Les brevets
Metzner et Burgmer ont des trous denté en forme de U sur la pellicule qui
forment des étiquettes ou des pattes entre les découpures. Ces pattes sont
repoussées de côté lorsque la roue dentée se met en marche mais sont
maintenues à la pellicule. Par ailleurs, Templeton emploie des trous dentés
en forme de T. Chacune de ces citations démontre que les pattes de retenue
sont la solution au problème des confétis provenant des trous dentées et qui
bloquent les appareils.
Comme on l'a déjà mentionné, le rouleau d'étiquettes du demandeur comporte
une pellicule composée d'étiquettes coupées à l'avance, et de trous dentés
espacés de chaque côté du rouleau. En employant des étiquettes ou découpures
en forme de U pour les trous, les confettis provenant des trous dentés ne
bloqueront plus l'appareil.
La revendication 1 se lit comme suit:
Un rouleau d'étiquettes imprimées et coupées à l'avance
comprenant une pellicule allongée supportant les dites
étiquettes destiné à servir dans un appareil adapté à
l'application d'étiquettes aux produits; cet appareil comporte
un dispositif pour étendre la colle sur un côté desdites
étiquettes, une sorte de plongeur élastique à mouvement
alternatif pour coller les étiquettes, pour passer au
travers de ladite pellicule et en détacher les étiquettes,
pour prendre les étiquettes et les apposer aux produits et
ensuite se retirer au-travers du coupon de la pellicule;
ledit plongeur élastique a une surface de forme déterminée
destinée à apposer les étiquettes, comporte un dispositif denté
pour déplacer ladite pellicule au-travers dudit appareil à
étiqueter; ce dispositif d'étiquettes imprimées et coupées à
l'avance comprend une pellicule allongée d'une seule
épaisseur, en forme de rouleau, ainsi que plusieurs
étiquettes et un coupon de pellicule auquel les étiquettes
sont rattachées; lesdites étiquettes sont disposées dans
ledit coupon d'un bout à l'autre de ladite pellicule, partiel-
lement coupées des ladite pellicule et espacées de façon à
laisser un pont entre lesdites étiquettes dans ledit coupon;
lesdits ponts sont de largeur déterminée afin de permettre le
déplacement desdites étiquettes au moyen dudit plongeur
élastique, en travers jusqu'au dit coupon de la pellicule
sans toutefois déchirer l'étiquette; ces étiquettes ont deux
côtés non recouverts d'un produit adhésif, dont l'un est
adapté pour en recevoir et l'autre porte des indications
imprimées; les trous dentés se prolongent tout au long du
coupon de la pellicule et sont disposés dans ledit coupon de
façon à permettre un enregistrement exact dudit coupon et
desdites étiquettes par rapport au plongeur élastique.
La question à déterminer est de savoir si la demande constitue un progrès
brevetable compte-tenu de l'antériorité.
La présente demande est une division du Brevet No 860,753 qui comprend 19
revendications pour l'appareil à étiqueter. Pour que l'appareil fonctionne,
les étiquettes doivent être disposées de façon bien déterminée et est,ce~e
qui constitue le fondement de la présente demande.
Dans la décision finale, l'examinateur a maintenu qu'en enlevant le couteau
du dispositif de Sherman, le demandeur "crée un problème étant donné que son
dispositif modifié ne fonctionnera pas avec la bande non coupée de Sherman."
Sherman emploie une pellicule pliée qui comporte des légendes imprimées sur
sa surface. A la première étape de son opération, Sherman utilise un couteau
à mouvement alternatif pour inciser la partie imprimée de la pellicule.
Ensuite la pellicule avance à l'étape du chauffage, où la légende est
rattachée à l'enveloppe; la pellicule continue avec l'enveloppe et l'éti-
quette collée au pressoir qui sépare la légende de la pellicule. Sherman
s'intéressait à l'étiquetage des enveloppes ou des petits paquets en une
seule opération de la machine. Afin d'effectuer cette opération, Sherman
attache l'article à la pellicule, et le fait avancer jusqu'au poinçon. A
notre avis, rien n'indique que Sherman envisageait de se servir d'une roue
poinçonnée à l'avance, ou qu'il appliquerait l'étiquette sur un article sans
le faire passer dans la pellicule jusqu'à l'étape suivante de l'opération.
Au cours de l'audience, le personnel examinateur a fait remarquer que dans
l'illustration 5 de Sherman, le dispositif d'application des étiquettes est
presque identique à celui du demandeur. L'illustration 5 de Sherman présente
une vue en perspective de la pellicule alors qu'elle se déplace dans l'appareil;
Au point de départ (3) la pellicule est imprimée d'une légende, ensuite (36)
il y a un espace hachuré illustrant ce qui se passe au point de découpage;
puis (35) une représentation d'une étiquette détachée, collée à une enveloppe
située en-dessous de la pellicule qui avance. En comparant l'illustration
5 de Sherman (qui présente une étiquette coupée seulement et la présente
demande, on note que l'illustration 5 ne présente pas de "rouleau d'étiquettes
coupées à l'avance" tel que l'a prévu le demandeur. Dans Sherman, il ne
passe qu'une étiquette précoupée à la fois et ce, juste avant qu'elle soit
apposée à l'enveloppe.
En mettant au point son invention, le demandeur a prévu un appareil à
étiqueter, et un distributeur d'etiquettes. L'appareil exigeait un
dispositif spécial et c'est pour cela que le demandeur a conçu un rouleau
d'étiquettes coupées à l'avance. Son dispositif ne comprenait pas de
dispositif pour faire avancer la pellicule avec l'article 6 attaché en une
seule opération, comme dans le cas de Sherman. Par conséquent, il a employé
un dispositif d'étiquettes poinçonnées à l'avance, dans lequel l'espace
poinçonné à l'avance représentait une partie de la pellicule relativement
importante, ce qui signifie qu'elle ne serait pas assez forte pour
transporter un article qui y serait attaché. Le demandeur a donc conçu un
nouveau rouleau d'étiquettes poinçonnées à l'avance afin de compléter
le travail de l'appareil à étiqueter.
Dans sa décision finale, l'examinateur s'en est également reporté au
brevet canadien No 761,791 et 728,557 respectivement concédés à Huffman
et Sonenberger et qui sont pertinents dans le cadre de la procédure d'examen
de la demande. Huffman décrit un procédé de déroulement continu de cartes
de données. La pellicule se déplace rapidement en passant par une machine
à poinçonner et à découper au moyen de rouleaux à poinçon rotatif.
L'invention de Sonrenberger concerne des cartes pouvant être alimentées dans
des imprimeurs à grande vitesse. La carte est fabriquée à partir de deux
rouleaux déroulés et fixés l'un à l'autre pour former les couches de la
carte tabulatrice. A notre avis, ni l'une ni l'autre de ces références ne
présentent un rouleau d'étiquettes poinçonnées à l'avance, tel que prévu
par le demandeur.
Le demandeur a soumis des affidavits témoiggant du succès commercial de
l'invention, lesquels semblent également démontrer que les personnes du
métier considèrent que l'invention est non évidente. De plus, nous remarquons
que certaines des déclarations contenues dans les affidavits se rapportent
au système d'étiquetage de La Mers, et nous sommes convaincus que le concept
inventif est brevetable dans son ensemble. Compte-tenu de l'antériorité,
il constitue un progrès brevetable d'assez grande envergure pour justifier
l'octroi d'un brevet pour un appareil à étiqueter. Il faut préciser,
toutefois, que la loi prescrit que le succès commercial ne prouve pas
nécessairement qu'il y a invention, mais elle. peut soulever certaines
présomptions quant à l'invention lorsque la demande est enfin satisfaite.
Au cours de l'audience, on nous a donné deux autres affidavits apportant
de nouveaux éléments de preuves assez importants et dont ne disposait pas
l'examinateur lorsqu'il a fait son rejet. Premièrement, M. Thomas Keuper,
spécialiste de l'étiquetage, a déclaré, en plus d'avoir témoigné du succès
commercial de l'invention Le Mers, que le dispositif d'étiquettes est un
élément important servant à apposer les étiquettes convenablement et
rapidement sur les contenants en raison de la façon dont elles sont
soutenues par les coupons de la pellicule. Il déclare: "Le dispositif
d'étiquettes lui-même assure l'apposition très précise des étiquettes."
A~paremment, les rejets à la suite d'étiquetage incorrect ont été considé-
rablement réduits". M. Keuper signale également certains des avantages de
l'application d'un produit adhésif à ce genre d'étiquette: "L'application
d'un produit adhésif n'a pas réussi sur d'autres pellicules allongées de
longueur indéterminée, desquelles on doit couper les étiquettes au moyen
du dispositif d'étiquetage après avoir enduit l'étiquette d'un produit
adhésif, étant donné que l'appliquer sur les bords de l'étiquette aurait
tendance à bloquer la matrice de découpage et à former des agglutinations
de colle dans l'appareil." C'est ce qui distingue la présente invention de
celle de Sherman.
Dans son affidavit, M. Arthur R. Johnsen, un autre spécialiste, témoigne que
l'invention de LaMers a amélioré le procédé d'application du produit adhésif,
il attribue cette amélioration en partie à la construction du rouleau
d'étiquettes. Il se fonde sur le fait qu'antérieurement "on croyait toujours
nécessaire d'enlever les étiquettes des pellicules en les coupant à l'intérieur
de la machine, et on ne savait pas qu'elles pouvaient être enlevées
intactes sans les couper de cette façon."
En évaluant une invention, il est important d'éviter de faire une analyse
ex post facto. Ce point a été souligné à plusieurs reprises, et plus
récemment par la Cour fédérale du Canada dans la décision qu'elle a prononcée
le 5 novembre 1975, et qui n'a pas encore été communiquée, dans Pre-formed
Line Products and Slater Steel c. Payer and Co. Et je cite:
Pour ce qui est du caractère inventif, il est quelquefois difficile
de distinguer un procédé vraiment inventif d'une simple amélioration
apportée à une invention. Pour qu'il y ait invention, il doit y
avoir progrès important. Par contre, il faut examiner très atten-
tivement une invention e~ post facto afin de déterminer si elle
comporte l'élément inventif requis, car un grand nombre d'inventions
extrêmement utiles et vraiment ingénieuses semblent souvent être
parfaitement évidentes et démunies de toute originalité lorsqu'on
les examine après qu'elles aient été inventées. Voir Appliance
Service Co Ltd. c. Sarco Canada Ltd. (14 R. B. C. 2d, 59 à 69),
Farbwerke Hoechst AG., vormals Meister Lucius & Bruning c. Halocarbon
(Ontario) Ltd. et al. (15 R.B.C. 2d, 105 à 124 & 125) ou l'on
reprend les autorités compétentes citées dans The King c. Uhlemann
Optical Co., (1950 C. Ech. 142 à 157 affirmé 1952 B.R.C. 143).
Le fait qu'un dispositif soit simple ne prouve pas qu'il était
évident et que l'ingéniosité inventive n'était pas requise pour y
arriver; et si des petites différences créent de gros résultats,
le degré de valeur inventive prescrit par la loi est en fait
présent. Voir O'Cedar of Canada Limited c. Mallory Hardware
Products Limited (1956 C. de l'Ech. 299 à 317 et 318).
Dans ce cas, nous savons que si ce n'était de l'antériorité sur laquelle s'est
fondé l'examinateur, il y aurait eu peu d'ingéniosité dans l'élaboration
du rouleau d'étiquettes revendiqué ici, une fois que l'ensemble du système
d'étiquetage est connu que l'on voit à la nécessité du rouleau en question.
Cependant, il reste que le système d'étiquetage n'était pas connu avant
l'invention de LaMers. Le rouleau d'étiquettes spécial requis pour le
système fait partie intégrante de l'ensemble du concept inventif, et
l'apport nécessaire d'ingéniosité découle de cette intercation. Nous
croyons que le fait de combiner le concept inventif de demandeur avec des
éléments de l'antériorité pour rendre l'invention évidente est de pratiquer
le genre d'analyse ex post facto, pratique que les tribunaux désapprouvent.
Il est facile, après avoir fait une découverte, de dire qu'elle est évidente.
Dans beaucoup de cas, le bien fondé de l'invention repose sur le fait de
reconnaître qu'un problème existe, et si le bien fondé repose sur le concept
lui-même, il n'est pas atténué par le fait que l'application pratique de
l'idée, une fois conçue, présente peu de difficultés. (Reliable Plastics c.
Louis Marx et al, F.P.C. 184 à 198).
Après avoir étudié ces questions et les avantages qu'offrent la présente
invention, nous convenons que le Commissaire ne devrait pas refuser le brevet,
et que les revendications constituent une invention brevetable.
Dans sa décision finale, l'examinateur s'est opposé à ce que les limitations
de l'appareil soient comprises dans les revendications. Nous sommes d'accord
avec lui que les limitations de l'appareil contenues dans les revendications
1, lignes 3 à 10 sont sans rapport avec l'objet revendiqué. La revendication
concerne un dispositif d'étiquettes et, dans ce cas, nous ne voyons pas
comment le fait de décrire les pièces de l'appareil dans lequel il est
employé permette de définir ce dispositif. En fait, nous croyons que cette
pratique va à l'encontre des prescriptions de l'article 36 de la Loi sur les
brevets, étant donné qu'elle obscurcit la définition de l'invention devant
être protégée. D'après les observations qu'il a faites au cours de l'audience,
M. O'Gorman n'avait aucune objection à ce que soit omise la partie de la
revendication 1 suivante: "ledit; appareil comprenant un dispositif...
d'alimentation d'étiquettes imprimées et coupées à l'avance", et nous
estimons qu'il devrait en être ainsi dans le but de rendre la revendication
plus claire. Le titre du brevet aussi ne correspond pas à ce qui est
revendiqué dans la présente demande.
Au cours de l'audience, l'examinateur s'est également opposé à ce que les
revendications comportent des caractéristiques qui ne figurent pas dans la
divulgation déposée à l'origine. Par exemple, il a fait allusion à des
termes tels que "ponts", "élasticité du plongeur" et papier "conçus pour
recevoir un produit adhésif". Cependant, ces termes ont été acceptés le
4 avril 1974, date à laquelle ils ont été présentés et incorporés à la
demande. Un des termes qui réussit le mieux à distinguer la présente
invention de toute autre, soit l'élasticité du plongeur, est, en fait,
soutenu dans la divulgation originale (ill. 5) et au bas de la page 8
(autrefois page 9). Dans celle-ci, il est écrit: "La plaque avant 99 est
recouverte d'une couche 105 de matériau élastomérique tel que du caoutchouc
souple." Etant donné que les étiquettes sont destinées à être apposée à
des surfaces arrondies, et sur des bouteilles en verre, nous estimons qu'il
est raisonable d'inférer que les personnes qui ont lu la présente divulgation
lorsqu'elle a été déposée, admettraient que divers types de matériaux
élastiques peuvent être utilisés.
Par conséquent, la Commission recommande que le rejet soit retiré pour
évidence. Si les revendications. étaient modifiées comme on l'indique
ci-dessus, l'examen de la demande devrait pouvoir être poursuivi.
Gordon Asher
Président
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux constatations de la Commission d'appel des brevets, et
conssents à retirer le rejet des revendications pour évidence. La demande
est donc renvoyée à l'examinateur pour qu'il ordonne qu'on y apporte
les modifications susmentionnées.
J. H. A. Gariépy
Commissaire des brevets
Daté à Hull (Québec)
ce vingt-neuvième jour de mars 1976
Représentant du demandeur
Smart & Biggar
70, rue Gloucester
Ottawa (Ontario)