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                  DECISION DU COMMISSAIRE

 

DIVISION - Article 38 - Joint d'étanchéité pour arbre tournant.

 

Deux revendications, entièrement indépendantes l'une de l'autre, s'appliquent

au principe bien connu qui consiste à pomper de l'huile afin d'assurer l'étan-

chéité d'un élément et d'empêcher toute fuite; cependant, elles ne cernent pas

le problème de la même façon: on se retrouve donc devant deux inventions

différentes.

 

Rejet - Confirmé

 

La présente décision porte sur une demande de révision, par le Commissaire des

brevets, de la décision finale de l'Examinateur rendue le 10 janvier 1975,

concernant la demande numéro 139,009 (classée 277-20.5), déposée le 6 avril 1972

au nom de James D. McHugh et intitulée "Joint d'étanchéité autopressuriseur pour

arbres tournants".

 

Lors de l'instruction, qui s'est terminée par le rejet final, l'Examinateur a

refusé de poursuivre l'étude de la présentée demande jusqu'à ce que les revendica-

tions du demandeur portent toutes sur une seule et même invention. L'Examinateur

est d'avis que le demandeur revendiques deux inventions différentes, ce qui est

contraire aux dispositions de l'article 38 de la Loi sur les brevets.

 

L'objet de l'invention consiste en un joint d'étanchéité pour arbre de moteur

immergé; ce joint comporte une garniture intérieure permettant de pomper le liquide

d'étanchéité et de le refouler vers une autre garniture, celle-ci située à

l'extérieur.

 

Dans sa décision finale, l'Examinateur déclarait (en partie):

 

Le rejet de la demande est maintenu à cause du manque

d'unité entre les différentes revendications, objection

dont il est question dans les lettres officielles précé-

dentes. Il a été établi, dans chacune des lettres officielles

que la revendication 1 différait de la revendication 7, puisque

celles-ci, prises séparément, ne présentaient aucune "caracté-

ristique de contrefaçon". Le demandeur allègue que la reven-

dication 1 est la revendication la plus générale. Elle ne peut

donc être contrefaite par la revendication 7. Il n'y a pas de

limites précises en ce qui a trait aux rainures servant au

passage de l'huile, lesquelles se prolongent sur toute la rive

périphérique de l'élément et se terminent en une plage unie

située le long d'une des faces planes dudit élément. La

revendication 7 a trait à un flan d'obturation à rainures

hélicoïdales. Le flan d'obturation, situé à l'extérieur, est

constitué des éléments habituels, à savoir, un élément tournant

et un élément fixe. La revendication 1 s'applique toutefois

à un joint comportant un élément fonctionnant sous l'effet

de la pression du liquide" avec dispositif servant à en-

traîner ledit élément et le flan d'obturation intérieur en

contact réciproque, alors que la revendication 7 traite

d'un joint comportant un flan d'obturation, lequel est

l'élément qui, dans ce cas-ci, est assujetti à la pression

du liquide. De plus, la revendication 7 traite d'un dispo-

sitif servant à déplacer l'un des éléments de la garniture

intérieure, ainsi que d'un. épaulement rainuré dans 1e cas de

l'élément coulissant axialement. Par conséquent, la reven-

dication 7 n'est pas plus générale que toute autre revendication

de la demande. Puisqu'aucune revendication n'est plus générale

que les autres, quant à la portée, nous jugeons que les dispo-

sitions de l'article 38(1) ne sont pas respectées. (se reporter

au Recueil des pratiques du Bureau des brevets, paragraphe 10.02).

 

Dans sa réponse à la décision finale, datée du 8 avril 1975, le demandeur

déclarait (en partie):

 

Dans sa décision finale, l'Examinateur déclare: "Puisqu'aucune

revendication n'est plus générale que les autres, quant à la

portée, nous jugeons que legs dispositions de l'article 38(1) de

la Loi sur les brevets ne sont pas respectées". Par cette

affirmation, l'Examinateur semble vouloir dire que, parce qu'aucune

revendication n'est plus générale que toutes les autres revendi-

cations de la demande, quant à la portée, les revendications

portent incontestablement sur plus d'une invention.

 

Nous croyons que ceci est une épreuve normalisée que le Bureau

fait subir à chaque demande afin d'en faciliter et d'en accélé-

rer l'étude, et cette épreuve est sans doute suffisante dans

nombre de cas. Il n'est cependant pas prouvé qu'une telle

épreuve puisse s'appliquer dans tous les cas - la demande numéro

139,009, présentement à l'étude, étant un exemple d'une demande

qui ne peut être soumise à une telle épreuve.

 

On peut très bien imaginer une demande dont les revendications

seraient rédigées et concues de facon à pouvoir réussir "l'épreuve",

à savoir, "une revendication étant plus générale, quant à la portée

que toutes les autres revendications de la demande". Sans doute,

la plupart des brevets canadiens contiennent des revendications

rédigées et conçues exactement de cette façon. Cependant, si on

supprimait la revendication la plus générale d'un ensemble de

revendications ayant réussi "l'épreuve", il est difficile de com-

prendre comment un changement de ce genre pourrait occasionner une

telle division au niveau de la demande. Bien sûr, les revendica-

tions ne correspondraient plus à ce que le Bureau des brevets avait

établi, mais le changement ne serait sûrement pas assez important

pour que les revendications, qui portaient sur une seule invention,

portent maintenant sur plusieurs inventions.

 

De plus, nous ne savons pas du tout comment l'Examinateur en est

arrivé à une "épreuve" ou un critère de sélection du genre en ce

qui a trait à l'unité d'invention des revendications d'une demande.

Dans toutes les lois et tous les règlements portant sur les brevets,

ce qui ressemblerait le plus à cette "épreuve", serait le règlement

numéro 60(1) des Règlements régissant les brevets. Il est dit (en

partie), dans le règlement 60(1), "qu'une demande qui ne comporte

aucune revendication plus générale que les autres, quant à la

portée, doit être considérée comme étant une demande portant sur

plus d'une invention". Ce règlement n'est pas très clair puisque,

d'après ce qui y est énoncé, tout ensemble de revendicatins compor-

tant une revendication indépendante et une revendication dépendante

semblerait conforme audit règlement.

 

Si le règlement 60(1) des Règlements régissant les brevets ne

semble pas pouvoir donner une définition claire et précise de

l'"unité d'invention", nous rie voyons pas comment la définition

donnée par l'Examinateur, énoncée en ces mots: "une revendication

plus générale que les autres, quant à la portée", peut, quant à elle,

être plus explicite, moins encore si elle est basée sur

un droit écrit.

 

Il est clairement établi, dans la Loi sur les brevets, qu'une

seule demande peut contenir plusieurs revendications et, si

l'on veut tirer quelque avantage de ceci, toutes les reven-

dications doivent, en principe, différer l'une de l'autre. Il

incombe au mandataire du demandeur de rédiger les revendications

non seulement de façon qu'elles décrivent clairement l'objet de

l'invention mais également: de façon que l'inventeur et son

invention soient protégés (c'est-à-dire que les revendications

doivent contenir juste assez de renseignements pour être suffi-

samment explicites) ce, tout en respectant les dispositions des

lois et des règlements qui régissent les brevets. Le fait que

plusieurs cas doivent être étudiés devant la Cour prouve que ceci

n'est pas un travail facile.

 

La revendication 1 se lit comme suit:

 

Un joint d'étanchéité pour arbre tournant, servant à empêcher

le liquide ambiant d'entrer dans ladite machine; ledit joint

comporte une garniture de pompage intérieure constituée d'une

bague mobile montée sur un arbre tournant, justaposée à une bague

fixe disposée vis-à-vis de ladite bague mobile; au moins l'un des

deux éléments susmentionnés doit être pourvu de rainures servant

au passage de l'huile, ces rainures se prolongeant sur l'une des

rives périphériques de l'élément et se terminant en une plage

unie le long d'une des faces planes dudit élément; ladite garni-

ture intérieure sert à pomper le liquide d'étanchéité contenu à

l'intérieur de ladite machine et à le refouler dans une zone

relativement restreinte, ce afin d'augmenter considérablement la

pression dudit liquide d'étanchéité à l'intérieur de ladite zone,

comparativement à la pression dudit liquide à l'intérieur de

ladite machine. Le point comporte également un flan d'obturation

monté sur ledit arbre et situé à l'extérieur, relativement à

ladite garniture intérieure, servant à empêcher le liquide d'étan-

chéité de s'écouler hors de la zone restreinte; ledit flan d'ob-

turation comporte un élément tournant, un élément fixe juxtaposé

à l'élément tournant et situé dans le même plan que celui-ci, et

un dispositif fonctionnant sous l'effet de la pression et permet-

tant d'entraîner l'élément tournant et l'élément fixe en contact

réciproque.

 

La revendication 7 se lit comme suit:

 

Un joint d'étanchéité pour arbre tournant, servant à empêcher le

liquide ambiant d'entrer dans ladite machine; ledit joint comporte

un flan d'obturation à rainures hélicoïdales situé à l'intérieur,

monté sur l'arbre, servant à pomper le liquide d'étanchéité contenu

dans ladite machine et à le refouler dans une zone plus restreinte,

ce afin d'augmenter la pression du liquide d'étanchéité à l'intérieur

de ladite machione; ledit flan d'obturation est constitué d'un

élément tournant et d'un élément fixe, juxtaposés l'un à l'autre et

situés dans un même plan; l'un de ces deux éléments au moins doit

pouvoir se déplacer le long dudit arbre, afin d'augmenter ou de

réduire l'écard entre les deux éléments, un mécanisme permettant

de déplacer, le long dudit arbre, l'élément mobile vers ledit

élément fixe; un épaulement rainuré pratiqué à la face de l'élément

mobile la plus éloignée dudit élément fixe, et qui vient en contact

avec le fluide d'étanchéité contenu dans la zone restreinte, permet

de déplacer ledit élément mobile vers ledit élément fixe du flan

d'obturation, ceci étant provoqué par la pression, beaucoup plus

élevé, du liquide d'étanchéité confiné dans la zone restreinte. Le

joint comporte également un second flan d'obturation situé à

l'extérieur, également monté sur ledit arbre, fonctionnant sous

l'effet de la pression du liquide d'étanchéité refoulé dans la zone

restreinte, et servant à empêcher ledit liquide d'étanchéité de

s'écouler hors de ladite zone restreinte.

 

Il s'agit donc, ici, de déterminer si les revendications portent sur plus d'une

invention.

 

Dans sa réponse, le demandeur déclare qu'il ne sait pas du tout comment l'Exami-

nateur en est arrivé à juger sa demande en ce basant sur le critère d'"unité

d'invention". Dans sa décision finale, l'Examinateur se reporte au chapitre 10.02

du Recueil des pratiques du Bureau des brevets, dans lequel on souligne la

relation qui existe entre l'article 38 de la Loi sur les brevets et les règlements

58, 59 et 60. On trouvera d'autres renseignements sur la pratique utilisée en

pareil cas aux paragraphes 10.07.01 et 10.07.02 du Recueil.

 

Nous sommes d'accord avec le demandeur lorsque celui-ci déclare qu'il est établi,

dans la Loi sur les brevets, qu'une demande peut comporter plusieurs revendications.

Même si une demande peut comporter plusieurs revendications, celles-ci doivent

cependant toutes porter sur une seule et même invention.

 

Il est dit, dans la revendication 1, que la garniture intérieure comporte une

bague mobile juxtaposée à une bague fixe, l'un de ces deux éléments se terminant en

une plage unie, et permettant de pomper le liquide d'étanchéité et de le refouler

dans une zone restreinte; cette garniture est utilisée conjointement avec un flan

d'obturation situé à l'extérieur, comportant un élément tournant monté sur un

arbre tournant, un élément fixe juxtaposé à l'élément tournant et situé dans le

même plan que celui-ci, et un dispositif fonctionnant sous l'effet de la pression

et servant à entraîner les deux éléments en un contact réciproque.

 

D'autre part, la revendication 7 porte sur un flan d'obturation à rainures héli-

coïdales situé à l'intérieur, et comportant un élément tournant et un élément fixe

montés sur un même axe; un mécanisme assujetti à une force hydraulique permet de

déplacer l'un de ces éléments le long de l'axe. La garniture extérieure est

considérée comme une "garniture fonctionnant sous l'effet de la pression".

 

Si l'on considère les différences qui existent entre la revendication 1 et la

revendication 7, on peut se rendre compte que la revendication 1 porte sur la

garniture illustrée à la figure 1, et que la revendication 7 porte sur le dispo-

sitif illustré à la figure 3. Il est dit, dans la revendication 1, que les

rainures servant au passage de l'huile se terminent en une plage unie située le

long d'une des faces planes d'un des éléments; la revendication 7 ne prescrit que

l'utilisation d'un flan d'obturation à rainures hélicoïdales. Dans la revendica-

tion 1, la garniture extérieure comporte un élément tournant, un élément fixe

juxtaposé au premier et situé dans un même plan, et un dispositif servant à

entraîner les deux éléments en un contact réciproque. Dans la revendication 7,

la garniture extérieure est, en fait, un flan d'obturation dont le fonctionnement

est assujetti à la pression, beaucoup plus élevée, du liquide refoulé dans la zone

restreinte. De plus, il est dit, dans la revendication 7, qu'un des éléments

de la garniture intérieure peut être déplacé au moyen d'un dispositif à la fois

mécanique et hydraulique, alors que, dans la revendication 1, les deux éléments

sont montés sur un arbre tournant et sont juxtaposés l'un à l'autre.

 

Les éléments essentiels décrits dans la revendication 1 sont une garniture inté-

rieure constituée d'une bague mobile et d'une bague fixe, l'un de ces éléments

étant pourvu de rainures servant au passage de l'huile et se terminant en une plage

unie, et un flan d'obturation situé à l'extérieur comportant un élément tournant, un

élément fixe et un dispositif servant à entraîner ces deux éléments en un contact

réciproque. Dans la revendication 7, les éléments essentiels sont une garniture

intérieure à rainures hélicoïdales, constituée d'un élément fixe et d'un élément

tournant juxtoposés l'un à l'autre et situés sur un même axe, l'un de ces éléments

pouvant être déplacé au moyen d'un dispositif à la fois mécanique et hydraulique,

et un flan d'obturation extérieur fonctionnant sous l'effet de la pression du liquide.

 

Selon le mémoire descriptif, le principe qui consiste à utiliser la vitesse de

rotation de l'arbre tournant pour pomper l'huile, ceci afin de résuite les fuites

au niveau de la pompe, est déjà connu. La solution à ce problème, donnée dans la

revendication 1, n'est pas la même que celle donnée dans la revendication 7. Si les

revendications portaient sur une seule et même invention, la solution au problème de

l'étanchéité serait sensiblement la même dans les deux cas. A notre avis, l'invention

décrite dans la revendication 1 ne peut être considérée comme la même invention que

celle décrite dans la revendication 7.

 

Le demandeur allègue que sa demande n'est est pas une qu'on peut soumettre à "l'épreuve"

de contrefaçon qui dit "qu'une des revendications doit être plus générale, quant à

la portée, que toutes les autres revendications de la demande". Il ajoute que, si

      quelqu'un supprimait ladite revendication générale d'un ensemble de revendications

 ayant réussi "l'épreuve", il serait difficile de comprendre comment un changement

 du genre pourrait provoquer une telle division au niveau de la demande. Nous sommes

 d'accord sur le fait qu'un demandeur peut décrire et revendiquer plus d'une conception

 d'un objet. Dans la présente demande, il est évident, d'après le mémoire descriptif

 de la page 1, que le principe qui consiste à pomper de l'huile afin d'obtenir une

 étanchéité appropriée était déjà connu. Les deux revendications portent sur ce même

 principe: dans la revendication 1, il s'agit d'une garniture de pompage intérieure

 pourvue de rainures servant au passage de l'huile et se terminant en une plage unie;

 dans la revendication 7, il s'agit d'une garniture de pompage intérieure à rainures

 hélicoïdales, celle-ci comportant un élément tournant et un élément fixe, l'un de

 ces éléments pouvant être déplacé au moyen d'un dispositif à la fois mécanique et

 hydraulique. Même si les deux revendications portent sur le même principe, qui

 consiste à pomper de l'huile afin d'assurer l'étanchéité d'une machine, elles ne

 cernent pas le problème de la même façon.

 

 La Commission d'appel recommande donc que la demande soit refusée selon les disposi-

 tions de l'article 42, puisque ladite demande porte sur plus d'une invention, ce

 qui est contraire aux dispositions de l'article 38 de la Loi sur les brevets.

 

 Le Président

 Commission d'appel des brevets

 

 G. Asher

 

 Je me rallie aux conclusions de la Commission d'appel et refuse d'accorder un

 brevet au demandeur. Le demanderu dispose d'une période de six mois au cours de

 laquelle il pourra interjeter appel de la présente décision aux termes de l'article

 44 de la Loi sur les brevets, ou encore réviser sa demande et faire en sorte que

 ses revendications ne portent que sur une seule et même invention.

 

 Le Commissaire des brevets par interim.

 

 J.A. Brown

 

Fait et signé à Hull, Québec                     Mandataire du demandeur

 le 5 décembre 1975

                                                  R.A. Eckersley

                                                  214 King St. W.

                                                  Toronto, Ontario

 

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