DECISION DU COMMISSAIRE
Evidence: Portable Resuscitator
Les revendications 1, 2 et 4 ont été refusées parce qu'elles ne représentaient
pas un progrès technique brevetable. Elles ne différaient de l'antériorité que
par des variations de forme ou de conception sans intérêt fonctionnel évident.
Rejet: Confirmé
La présente décision porte sur une demande de révision par le Commissaire des
brevets de la décision de l'examinateur datée du 11 fébrier 1975 au sujet de la
demande n 140,805 (Catégorie 137-1.50), déposée le 28 avril 1972 et intitulée
"Dispositif de réanimation". La Commission d'appel des brevets a tenu une
audience le 3 décembre 1975, à laquelle M.S. Rogers représentaient le demandeur.
La demande porte sur un appareil contenant un mélange d'air respirable pour
une période prolongée. Lorsqu'il est actionné, l'usager peut s'en servir pendant
une dizaine de minutes. Le gaz est emmagasiné sous pression dans un tube long
et léger enroulé autour d'une soupape d'admission, d'un régulateur de pression
pour le contrôle du débit, d'un manomètre et d'un mécanisme de mise en marche.
En rendant sa décision, l'examinateur a refusé les revendications 1, 2 et
4 (partiellement) parce qu'elles ne représentaient pas un progrès technique
brevetable par rapport aux brevets américains suivants:
3,505,997 le 14 avril 1970 Cowley
2,502,075 le 24 mars 1970 Cowley
2,697,538 le 21 décembre 1954 Seeler
2,380,372 le 31 juillet 1945 Alderfer
L'examinateur déclarait notamment dans sa décision:
Les brevets précédents portent sur un appareil respiratoire
contenant un réservoir d'air respirable en forme de long tube.
...
La principale différence entre l'objet des revendications 1 et 2
et celui des brevets Cowley est que le premier porte sur un
enroulement constitué d'une spirale aplatie latéralement tandis
que le brevet Cowley porte sur un enroulement de forme circulaire.
On estime que cette unique modification n'est pas suffisamment
importante pour être brevetable, puisque les enroulements aplatis
latéralement figurent dans le brevet Alderfer.
En raison de l'objet des antériorités, on juge que les revendications
1 et 2 ne divulguent rien qui ne soit déjà évident pour un spécialiste
du domaine, et que lesdites revendications ne constituent donc pas
une amélioration brevetable.
En outre, les revendications 1 et 2 sont également rejetées
du fait qu'elles sont inspirées d'un vieil ensemble d'enroulement
creux de tuyautage résistant à la pression, contenant du
gaz respirable sous pression et muni d'un manomètre et autres
dispositifs permettant de contrôler l'arrivée d'air à l'usager.
Les brevets Cowley démontrent que cet ensemble n'est pas
nouveau puisqu'ils divulguent, grosso modo, les mêmes éléments
en leur attribuant les mêmes rapports fonctionnels de façon à
obtenir essentiellement les mêmes résultats. L'ensemble que
révèle les revendications 1 et 2 diffère de celui des brevets
Cowley en ce sens que l'enroulement du réservoir est rectangulaire
au lieu d'être circulaire. Cette modification ne change rien
au fonctionnement des autres éléments, par conséquent, aucun
nouvel ensemble ne se justifie. De plus, des enroulements
rectangulaires ne sont pas nouveaux dans la technique puisqu'ils
figurent dans le brevet Alderfer.
Dans sa réponse du 9 mai 1975 à la décision, le demandeur déclarait notamment:
(a) Le demandeur estime que le rejet par l'examinateur des reven-
dications 1 et 2 sous prétexte qu'elles sont évidentes pour les
experts de la technique en raison des antériorités, est injustifiée et
que ces revendications portent bien sur une amélioration brevetable.
(b) Le demandeur estime que le rejet par l'examinateur des
revendications 1 et 2, du fait qu'elles seraient inspirées d'un
vieil ensemble divulgué par les antériorités Cowley & Alderfer est
injustifié et que ces revendications portent effectivement sur
un ensemble nouveau et brevetable.
(c) Le demandeur estime que le rejet par l'examinateur de la
revendication 4 comme étant évidente pour un expert de la
technique en raison de l'objet des brevets cités est injustifié
et que la revendication divulgue bien une invention nouvelle
et brevetable. De plus, il s'agit de la première lettre officielle
faisant objection à la revendication 4 et l'on estime qu'elle
ne saurait faire partie de la Décision.
...
Il convient de souligner que le brevet Cowley porte sur un enroulement
creux en spirale, de forme circulaire, tandis que le brevet d'Alderfer
divulgue un enroulement en spirale, de forme rectangulaire. Seule
la présente demande expose un dispositif d'alimentation en gaz
employant un enroulement en spirale, creux et allongé, avec une
multitude de tournants, et ayant la forme d'une spirale aplatie
latéralement et, en coupe latérale, une paire de côtés droits et
parallèles.
Pour qu'un dispositif d'alimentation en gaz boit de faible
encombrement et parfaitement portatif, il doit répondre aux
critères suivants:
(a) Il doit être aussi léger et peu encombrant que possible compte
tenu de la capacité maximale le de gaz.
(b) Etre indéréglable et pouvoir résister aux abus puisqu'il est
transporté, in position de fonctionnement ou pas, sur le corps
de l'usager dans des passages étroits et au-delà d'obstacles.
(c) Etre d'un transport facile et confortable sur le personne de
l'usager, de façon à éviter que ce dernier ne s'en débarrasse parce
qu'il est trop encombrant.
(d) Avoir une forme qui le rende facile â saisir et à mettre en
marche, même pour une personne portant des gants protecteurs ou ayant
les mains mouillées par la transpiration ou un autre liquide, ou
qui soit totalement accablée par la fatigue, le choc, la chaleur,
les blessures, etc.
(e) En état de fonctionnement, reposer confortablement sur le corps
de l'usager.
Les' exposés antérieurs et le succès commercial prouvent que le
dispositif inventé répond effectivement à ces critères, ce qui
n'est sûrement pas le cas des antériorités.
Les brevets Cowley divulguent un appareil respiratoire muni d'un enroulement
creux constitué d'une multitude de tournants et contenant un gaz respirable.
Un manomètre, se trouvant à l'intérieur de l'enroulement, permet de contrôler
l'arrivée d'air à l'usager. La revendication 1 de Coqley (3,502,075) se lit
comme suit:
Un appareil de réanimation léger et portatif comprenant: un réservoir
de gaz sous pression composé d'un tuyautage enroulé sur lui-même;
un manchon recouvrant ledit réservoir sous-pression; un tube capillaire
d'échappement communiquant avec ledit réservoir; des dispositifs
délimitant sur ledit tube;, une zone d'étranglement du flux ayant une
section mince et aplatie,cet deux parois latérales aplaties, au moins
l'une d'elles pouvant être: rapprochée de l'autre; un siège de soupape
ditué entre lesdites parois qui se font face; un dispositif de réglage
lié audit étranglement afin de rapprocher l'une des parois de l'autre
et réglé afin de rétrécir le tube de façon à limiter le gaz qui s'y
écoule; une chambre de dilatation à côté du dispositif de rétrécissement,
à l'écart du réservoir; un autre tube sortant de ladite chambre de
dilatation; un robinet de contrôle fixé à ce tube; une forme
en pointe pour l'autre extrémité de ce tube; un dispositif de montage
creux et conique, que l'on peut enclancher sur l'extrémité en pointe
du tube, formant ainsi un sceau bien calé; des supports pour le
dispositif de montage; des mécanismes visant à faire dévier les
dispositifs de montage parvenant ainsi à les démonter; un tuyau
relié au robinet de contrôle; et un masque fixé au tuyau flexible.
Le brevet de Seeler porte sur un dispositif anéroîde d'échappement de pression à
employer principalement avec un masque et un régulateur de pression du mélange
d'oxygène.
Le brevet Alderfer porte sur un appareil respiratoire dont le réservoir tubulaire
a une forme de quadrilatère. L'appareil est spécialement conçu pour être employé
par les parachutistes qui doivent posséder, en raison de la très haute altitude,
une réserve d'air ou d'oxygène comprimé.
La présente demande touche un appareil qui contient un mélange d'air respirable
en réserve suffisante pour une durée prolongée et dont l'usager peut se servir
pendant une dizaine de minutes lorsqu'il est actionné. Le gaz est emmagasiné sous
pression dans un tube long et léger enroulé ressort autour d'une soupape
d'admission, d'un régulateur de pression afin de contrôler le débit, d'un manomètre
et d'un mécanisme de mise en marche. L'enroulement comporte une multitude de
tournants et a la forme d'une spirale aplatie latéralement qui possède, en coupe
latérale, une paire de côtés droits et parallèles, délimitant ainsi la partie centrale
et creuse de l'enroulement. La revendication 1 rejetée se lit comme suit:
Un réservoir peu encombrant de gaz respirable constitué d'un
enroulement creux de tuyautage résistant à la pression et destiné
à contenir sous pression un gaz respirable, l'enroulement étant
constitué d'une multitude de tournants dudit tuyau, chacun des tournants
ayant une paire de côtés droits et parallèles séparés par des
extrémitées courbées afin de marquer un tournant, avec une ouverture
centrale et les tournants étant placés côte-à-côte avec lesdites
ouvertures centrales afin de former un espace creux correspondant
à l'intérieur de l'enroulement au-delà de la multitude des tournants,
un régulateur à l'intérieur de l'espace creux de l'enroulement
auquel il est relié afin d'assurer un flux essentiellement constant
du gaz, à une pression réduite, dans le tube; un dispositif monté
à l'intérieur de l'espace creux de l'enroulement qui, une fois actionné,
provoque une alimentation en gaz pratiquement instantanée.
Le demandeur soutient que la forme de son appareil représente un progrès
brevetable par rapport à l'état de la technique. Toutefois, cette forme ne
peut être brevetable que si elle présente des applications pratiques cachées.
La question est de savoir si l'enroulement de l'invention en forme de "spirale
aplatie latéralement" présente quelques avantages pratiques cachés.
Le demandeur signale que le dispositif est léger et de faible encombrement; qu'il
peut résister aux abus puisqu'il est transporté sur le corps de l'usager; qu'il est
d'un transport facile et confortable lorsqu'il n'est pas en état de marche. Ce
sont là, néanmoins, les seules caractéristiques, dont tout bon dessinateur doit tenir
compte lorsqu'il conçoit un tel appareil. Mais, à notre avis, ce ne sont pas des
caractéristiques brevetables.
Le demandeur prétend que son invention connaît "un succès commercial important".
Lors de l'audience, le demandeur a produit "un échantillon commercial de son
dispositif qui est actuellement acheté par divers organismes". Il est
évident que le monopole des revendications 1 et 2 rejetées diffère de celui
qu'indique l'échantillon commercial, mais porte bien entendu sur un monopole
beaucoup plus vaste. Les revendications rejetées n'ont trait qu'à un appareil
respiratoire et non à l'ensemble complet comme la revendication 17, par exemple,
dont la description correspond bien à l'échantillon commercial".
Le demandeur soutient que son dispositif "présente des avantages suffisamment
importants sur le plan de l'invention pour que ces revendications soient brevetables"
A notre avis, ainsi qu'il l'a exposé à la Commission, le demandeur a simplement
fait une évaluation technique de la construction de son dispositif. Ainsi, il
déclare: "...avec ce mode de construction, le tube risque moins de s'aplatir
que lorsqu'il s'agit d'un enroulement circulaire, il y a donc moins de forces
Bourdon et cela réduit l'impact qu'aurait un tel aplatissement sur les réservoirs.
Dans la pratique, on peut obtenir environ 10% d'augmentation de volume..."
Pour commencer, le fait que le "tube risque moins de s'aplatir" est tout
relatif. Il est évident, néanmoins, que normalement, les coins du dispositif de
la présente application s'aplatiraient plus que si l'enroulement était de taille
identique mais circulaire, du fait que la courbe serait beaucoup plus forte. En
ce qui concerne "moins de forces Bourdon", ce cera le cas pour les tuyaux rectilignes
mais peut-être le contraire au niveau des courbes relativement fortes à la jonction
de ces tuyaux. Le demandeur indique bien que "le dispositif a une structure stable
et que cet ensemble très léger de sangles suffit amplement ". Par conséquent, les
forces Bourdon ne sont donc pas d'une importance très grande surtout, vraisemblement,
dans le cas du dispositif décrit dans la revendication 3 qui a été acceptée. Quant
aux "10% d'augmentation du volume", n'importe quel spécialiste dans le domaine
le sait ou peut le calculer.
Les revendications 1 et 2 rejetées portent essentiellement sur un enroulement
creux a~ tuyautage résistant à la pression et contenant sous pression un gaz
respirable, ainsi qu'un manomètre et des dispositifs pour contrôler l'arrivée
d'air à l'usager. Les brevets de Cowley démontrent que cet ensemble n'est pas
nouveau puisqu'ils divulguent, grosso modo, les mêmes éléments en leur attribuant
les mêmes rapports fonctionnels de façon à obtenir essentiellement les mêmes
résultats. L'ensemble que révèle la divulgation 1 rejetée diffère uniquement de
l'antériorité dans le sens que l'enroulement creux en spirale allongée a "la forme
d'une spirale aplatie latéralement et, en coupe, une paire de côtés droits et
parallèles". On a vu que l'enroulement du réservoir de forme rectangulaire avait
déjà été exporé par Alderfer et que l'enroulement circulaire se retrouvait dans
les brevets de Cowley. Comme il a déjà été dit, il faudrait que la forme de
la configuration précise revendiquée offre un avantage pratique caché. Après
avoir analysé intégralement les faits, nous avons le certitude que cette forme
particulière n'offre aucun intérêt pratique caché. Nous estimons que les
revendications 1 et 2 doivent être rejetées.
La revendication 4, qui dépend de la première et de la troisième (l'une étant
rejetée et l'autre acceptée), porte sur un diaphragme qui peut ne pas marcher
sous la pression du gaz. L'emploi de tels diaphragmes est connu (voir brevet
canadien 612,722 de Coffman). Naturellement, on ne saurait admettre l'ensemble
à cause de cette adjoinction à la revendication 1 rejetée. La revendication 4
est acceptable si elle dépend de la troisième.
Les commentaires de la Cour, dans Lowe Martin c. Office Specialty Manufacturing
Co. Ltd. (1930) D.C.E. 181, s'appliquent: "L'unique fait de perfectionner un
original, une simple modification de forme, de proportion ou de degré, si le
procédé est le même, en utilisant essentiellement les mêmes moyens pour obtenir
de meilleurs résultats ne constitue pas une invention qui justifie un brevet"
(page 187, ligne 9), et "Il faut toujours tenir compte des droits du grand public
pour éviter que des monopoles ne s'appliquent à des dispositifs si simples qu'ils
paraîtraient évidents à n'importes quel spécialiste en la matière."
La Commission s'est dite d'avis que les revendications 1, 2 et 4, dans la
mesure où celle-ci dépend de la première, ne constituent pas un progrès brevetable
par rapport à l'état de la technique. Le demandeur n'est parvenu qu'à un
changement de forme, arrivant aux mêmes résultats par les mêmes moyens, ou
presque, tels que décrits dans les cas d'antériorité. (Vide, Lowe Martin c.
O.S.M., supra).
La Commission recommande par conséquent que le rejet des revendications
1, 2 et 4 soit confirmé; la revendication 4 sera toutefois acceptée si elle
est modifiée de façon à dépendre uniquement de la revendication 3.
Le Président adjoint,
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets. Par
conséquent, je refuse les revendications 1, 2 et 4, mais accepterai cette
dernière si elle est modifiée de façon à dépendre de la revendication 3.
Le demandeur a six mois pour annuler les revendications 1 et 2 et modifier
la revendication 4, ou pour interjeter appel de la présente décision en vertu
de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
Le Commissaire des brevets par intérim
J.A. Brown
Fait à Hull (Québec)
ce l8ème jour de décembre 1975