DECISION DU COMMISSAIRE
EVIDENCE: Production d'une argile kaolinique.
Lors d'une démission rendue antérieurement par le Commissaire, la présente
demande avait été rejetée et retirée. Cette décision se rapporte à d'autres
revendications rejetées subséquemment parce qu'elles étaient évidentes par
rapport à la pratique citée.
DECISION FINALE: Confirmée:
La présente décision concerne une requête de révision, par la Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur datée du 15 octobre 1975 au
sujet de la demande 901,145. Cette demande a été déposée aux noms de William
Windle et Reginald T. Bailey et porte sur "Une méthode pour produire une argile
réfractaire kaolinique blanche".
Antérieurement, la demande entrait en conflit avec deux autres demandes au
cours desquelles une des revendications, C5, a été rejetée pour motif d'évidence
par rapport à une certaine pratique dont il est fait mention. Le demandeur
a réclamé que la décision finale soit révisée et le Commissaire a maintenu ladite
décision le 8 mai 1973. Un appel a par la suite été interjeté à la Cour fédérale
du Canada, amis il a été retiré subséquemment, de même que la revendication C5.
L'examinateur a alors étudié les autres revendications, à savoir, les revendications
1 à 5 actuelles. Lois de l'instruction précédente, l'examinateur avait indiqué que
les présentes revendications ne comportaient aucune différence brevetable par
rapport à la revendication C5, qu'elles n'étaient pas brevetables par rapport à
la pratique antérieure, et qu'elles seraient rejetées dès la fin du conflit (en
assumant, évidemment, que le rejet de la revendication C5 serait justifié). Il a
ensuite rejeté les revendications 1 à 5 parce qu'elles portaient sur un sujet
évident, par conséquent, non brevetable. C'est cette décision qui est maintenant
soumise à l'étude de la Commission d'appel des brevets.
La présente demande porte sur un procédé pour purifier une argile réfractaire
blanche pour la fabrication de produits de céramique, en extrayant les
impuretés par électromagnétisme. Lors de l'instruction qui s'est terminée par
la deuxième décision finale, l'examinateur a refusé les revendications 1 à 5
parce qu'elles étaient évidentes par rapport aux références suivantes.
Brevet américain
90,565 25 mai 1869 Lynd
"Wet magnetic Separator for Feebly Magnetic Minerals, 1ère
partie par G.H. Jones et 2e partie par W.J.D. Stops, publication
présentée à l'International Mineral Processing Congress, à
Londres en 1960 et publiée en juin 1962 dans le Bulletin of
the Canadian Department of Mines and Technical Surveys, Group
VI, Paper No. 34.
Dans sa décision, l'examinateur a notamment déclaré:
Le brevet de Lynd est cité uniquement pour établir que les aimants
sont utilisés depuis longtemps dans la pratique pour extraire
le fer et d'autres matières colorantes du mortier d'argile. Il
est reconnu, comme le soutient le demandeur, que Lynd utilise des
aimants permanents pour extraire des particules relativement
grosses.
Cependant, lorsqu'il est courant d'utiliser un aimant pour
extraire des impuretés colorantes magnétiques de l'argile,
et que par la suite un aimant plus puissant est inventé, il n'y
a pas d'invention dans le fait d'utiliser le nouvel aimant de
la même manière et dans le même but que Lynd.
Cette affirmation est particulièrement vraie dans le cas de
l'aimant de Jones, décrit dans la publication citée, pouvant produire
une induction magnétique d'au moins 10,000 gauss. Dans cette
publication, l'auteur déclare (page 717]: "l'auteur s'est donc
efforcé de mettre au point une machine pour séparer, par voie humide,
les minerais faiblement magnétiques et même les moins magnétiques
d'entre eux, comme la muscovite et la tourmaline".
...
Le demandeur soutient qu'il y a nouveauté dans l'enlèvement de la
muscovite et la finesse des particules séparées. Ces arguments sont
réfutés par les citations ci-dessus. Le demandeur n'a pas développé
ni ajouté une idée ingénieuse au procédé exposé dans la publication
citée, mais soutient que ses particules sont plus fines. La déclaration
de Jones, à la page 733, couvre la gamme des dimensions du demandeur et,
par conséquent, la référence à la dimension des particules ne constitue
donc pas une invention.
Les revendications 1, 2 et 3 sont rejetées parce qu'elles sont jugées
non brevetables par rapport aux références.
La revendication 4 est rejetée parce qu'elle est jugée non brevetable
par rapport aux connaissances générales relatives à 1a technique de
séparation. Il est courant dans la technique de séparation des minerais
de faire passer de nouveau les matériaux dans n'importe lequel des
dispositifs de séparation jusqu'à ce qu'on obtienne le degré de séparation
voulu.
La revendication 5 est également rejetée parce qu'elle est
jugée non brevetable par rapport aux références. Le demandeur
divulgue une induction magnétique d'au moins 10,000 gauss, 15,000
gauss, de préférence. L'aimant de Jones produit une induction
magnétique d'au moins 10;000 gauss. On n'obtient aucun résultat
inattendu en augmentant l'induction magnétique à 15,000 gauss. Le
résultat attendu n'est qu'une question d'intensité.
Dans sa réponse à la décision finale du 15 janvier 1975, le demandeur a dit
notamment:
Les demandeurs regrettent de ne pas bien comprendre la façon dont
la présente décision finale est exprimée. Il semble que la décision
finale repose six le fait que les revendications soumises maintenant
au Bureau ne sont pas brevetables parce qu'elles ne contiennent aucune
différence brevetable par rapport à la revendication C5 qui a été
rejetée pour éviter un conflit. Il semble que 1a présente décision
est fondée sur le règlement 69 énoncé ci-dessous.
69. (1) Un demandeur ne peut réaffirmer une revendication qui
a été modifiée ou annulée pour éviter un conflit, ni
affirmer une revendication à l'égard d'une matière
qui ne comporte pas de différence brevetable par
rapport à celle qui est définie dans toute revendication
ainsi modifiée ou annulée.
(2) Lorsqu'un demandeur omet de contester la priorité à
l'égard d'une matière en conflit revendiquée dans une
autre demande ou que la priorité est accordée à une
partie opposante, le demandeur ne peut conserver dans
sa demande ni y introduire des revendications à l'égard
d'une matière qui ne comporte pas de différence
brevetable par rapport à la matière en conflit.
En considération du règlement énoncé ci-dessus, les demandeurs ne
peuvent réaffirmer ou maintenir une revendication à l'égard d'une
matière qui ne comporte pas de différence brevetable par rapport
à la matière définie dans une revendication qui a été modifiée ou
annulée pour éviter un conflit. Comme le souligne la réponse
précédente, la revendication C5 n'a pas été annulée ou modifiée pour
éviter un conflit; elle a plutôt été annulée à la suite de rejet
final de ladite revendication.
La présente demande porte sur une méthode pour traiter l'argile kaolinique
qu'on utilise pour fabriquer des produits de céramique. Le Kaolin (argile
chinoise) extrait du sol contient des impuretés à base de fer qui produit
des petites taches ou appauvrit la couleur de l'argile lorsqu'on la chauffe.
Le demandeur fait une boue avec l'argile kaolinique et la soumet à un champ
magnétique non homogène afin d'en extraire les particules minérales paramagnétiques.
Le brevet de Lynd établit qu'il est courant dans la pratique d'utiliser
des aimants artificiels ou naturels pour extraire le fer et d'autres
matières colorantes de solutions argileuses qu'on doit utiliser pour fabriquer
de la porcelaine.
La publication Wet Magnetic Separator For Feebly Magnetic Minerals (celle de
Jones et Stone), dit à la page 717:
...l'auteur s'est donc efforcé de mettre au point une machine
pour séparer, par voie humide, les minerais faiblement
magnétiques, même les moins magnétiques d'entre eux, comme
la muscovite et la tourmaline.
et à la page 733:
Bien que la séparation magnétique ait longtemps été un outil
utile à l'Ingénieur en préparation des minerais, jusqu'à maintenant
le matériel disponible n'a été qu'assez peu efficace pour la
séparation de matières dont la dimension des particules varie de
100 mailles à quelques microns seulement, particulièrement pour
les minerais faiblement magnétiques.
En faisant l'acquisition, au printemps 1959, d'un séparateur
magnétique à voie humide pour minerais (celui de Jones), la
Direction des Mines mettait en exploitation le seul modèle pilote
de cette machine. Le séparateur magnétique à voie humide, de
forte intensité, diffère par sa conception des machines existantes,
et a été particulièrement conçu pour les fines particules contenues
dans les minerais faiblement magnétiques.
Figurent également à la page 743 une série de conclusions:
(3) L'appareil de Jones effectue des séparations efficaces
des matières fines contenant des minerais considérés
comme faiblement magnétiques ou inadaptés à la séparation
magnétique.
(5) La susceptibilité de certaines muscovites dans le
séparateur de Jones laisse entrevoir une application
possible dans l'industrie de l'argile.
(6) L'appareil de Jones peut servir à séparer des minerais
de différentes susceptibilités magnétiques, de faibles
dimensions.
Dans sa réponse, le demandeur dit qu'il "ne comprend pas bien la façon
dont la présente décision finale est exprimée" et présume qu'elle est
fondée sur le règlement 69. Cependant, on note, à la page 1 de la décision
finale, que le deuxième paragraphe précise que "les présentes revendications
et la présente demande sont rejetées par rapport aux références suivantes"
et que les quatre derniers paragraphes expliquent en détail les motifs du
rejet par rapport à la pratique antérieure.
Par conséquent, nous sommes convaineus que le motif du rejet est
l'évidence par rapport à la pratique antérieure, et ne voyons pas le
besoin de prendre le règlement 69 en considération. Nous partageons
l'avis du demandeur qui prétend que, dans le cas présent, la règlement 69
n'est pas impliqué.
Le demandeur réclame "une révision du motif du rejet des revendications
soumises maintenant au Bureau pour des raisons indiquées en détail dans
l'instruction de la présente demande". Un des arguments avancés précédemment
est que la référence à Jones et Stone n'est pas une citation pertinente car
la première date de publication remonte à juin 1962, tandis que la présente
demande a été déposée le 24 avril 1964, soit moins de deux ans après ladite
date de publication.
Bien qu'il est vrai que le rapport de l'examinateur réfère à une date de
publication en 1962, les délibérations de la réunion ont également été publiées
en 1960, et les arguments fondés sur l'inexactitude de l'âge de la citation
doivent être retirés. Toute date de publication fixée au cours de l'année
1960 précéderait, évidemment, celle du dépôt de la présente demande par plus
de deux ans.
La question est de savoir s'il y a eu progrès brevetable par 1e demandeur par
rapport à la pratique. La revendication 1 se lit comme suit:
Une méthode pour produire une argile réfractaire kaolinique
blanche dont une étape conciste à faire une boue avec de
l'argile kaolinique et à la soumettre à un champ magnétique
non homogène dont l'intesnité est en moyenne d'au moins 10,000
gauss, afin d'en extraire les particules minérales paramagnétiques.
Lynd traite de l'emploi d'aimants naturels ou artificiels pour extraire des
matières colorantes de solutions argileuses qu'on doit utiliser pour fabriquer
de la porcelaine. Les limites indiquées dans la revendication 1 concernant
le brevet de Lynd sont que l'argile est définie comme "argile kaolinique" et
que l'intensité du champ magnétique est en moyenne d'au moins "10,000 gauss".
La publication de référence traite de l'utilisation du séparateur magnétique
à vais humide, de forte intensité, de Jones et fait allusion, notamment, à son
application dans l'industrie de l'argile. Cette publication précise spécifique-
ment que "l'appareil de Jones peut servir à séparer des minerais de différentes
susceptibilités magnétiques, de faibles dimensions". Par ailleurs, les
séparateurs magnétiques utilisant des aimants à forte intensité sont également
bien connus comme l'indique le passage suivant à la page 2, ligne 14, du mémoire
en instance: "...un séparateur avec une intensité de champ d'au moins 10,000
gauss, et un séparateur prioritaire est décrit dans le mémoire du brevet britannique
no. 768,451".
Le demandeur a également avancé l'argument que la page 743 de la référence
Stone dissuaderait un homme du métier de mettre en application la séparation
complexe proposée. La Commission ne peut admettre cet argument étant donné
que ce paragraphe dit: "La matière très fine utilisée lors des expériences
11, 12 et 13, où il est question de l'extraction de chlorites, très faiblement
magnétiques, du talc, n'était pas considérée comme propice à la séparation
magnétique. Néanmoins, de très bons résultats ont été obtenus." Si de très
bons résultats ont été obtenus en dépit de la résistance des matières aux
séparations magnétiques, cela peut avoir pour effet d'encourager plutôt que
de décourager l'essai ou l'utilisation du procédé magnétique dnas d'autres cas.
Les limites indiquées dans la revendication 1, comme la restriction à des
matières kaoliniques et la référence à l'intensité du champ magnétique sont des
modifications mineures. De plus, il est soutenu que la modification du procédé
de Lynd par l'utilisation d'aimants plus puissants, lorsqu'ils deviendraient
disponibles, avec différents types d'argile est une évidence.
La Commission est donc convaincue que la revendication 1 ne représente pas
un progrès technique par rapport aux références citées, ou même par rapport
au brevet de Lynd lui-même, lorsqu'on y ajoute la référence faite dans le
mémoire au brevet britannique no. 768,451.
Les revendications 2 à 5 qui dépendent directement ou indirectement de la
revendication 1 comportent de nouveaux éléments tels un séparateur magnétique,
l'intensité du champ et la dimension des particules. Cependant, ces éléments
n'apportent aucune nouvelle signification brevetable à la revendication 1 qui a
été rejetée. Nous sommes également convaincus qu'il n'y a pas d'objet
brevetable dans la divulgation.
La Commission recommande que la décision finale de refuser la demande pour
manque de divulgation d'un objet brevetable soit confirmée.
J.F. Hughes
Président adjoint de la
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux recommandations de la Commission d'appel des brevets et
refuse d'accorder un brevet pour la présente demande. Le demandeur a six
mois pour interjeter appel de cette décision, en vertu de l'article 44 de la
Loi sur les brevets.
J.A. Brown
Commissaire par intérim
des brevets
Fait à Hull (Québec)
1e 3 octobre 1975
Mandataires du demandeur
Fetherstonhaugh & Co.,
Ottawa (Ontario).