DECISION DU COMMISSAIRE
MATIERE NON CONFORME AUX STATUTS: en vertu des articles 2 et 41 (1):
Traitement médical pour animaux, y compris les humains.
A strictement parler, le traitement qui utilise un médicament pour traiter,
soigner et prévenir une maladie constitue une invention qui ne peut pas être
revendiquée, en vertu des dispositions des articles 2 et 41(1) de la Loi,
même si une telle utilisation nouvelle d'une substance connue est une techni-
que ou un procédé dénotant, au sens de l'article 2, une "application pratique".
L'exposé ne fait aucune distinction entre le traitement des humains et celui
des animaux, distinction qui pourrait annuler les dispositions restrictives
de l'article 41.
DECISION FINALE: Confirmée
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La présente décision a trait à une demande de révision, par le Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur, datée du 19 juin 1973,
au sujet de la demande no 947,803. Cette demande a été déposée le 14
décembre 1965 et porte sur un "composé de sulfoxyde d'alcoyle pour pénétrer
une membrane, sur le procédé de préparation de ce composé et sur son mode
d'emploi." La Commission d'appel des brevets a tenu audience le 27 mars 1974,
à la quelle M. R. Fuller représentait le demandeur.
La demande a trait à un composé pour pénétrer les tissus animaux (une quantité
valable d'un agent physiologique actif, une quantité valable de sulfoxydes de
diméthyle et un diluant aqueux acceptable) et à l'application de composé
sur les animaux, y compris les humains .
Au cours de l'instruction qui s'est terminée par la décision finale, l'exami-
nateur a rejeté les revendications 8 à 16 parce que les méthodes de traitement
médicaux ne constituant pas un objet brevetable, aux termes de l'article 2
de la Loi sur les brevets.
Dans la décision finale, l'examinateur a déclaré (notamment):
La non brevetabilité de ce genre de revendication
(méthode de traitement médical) se base sur le jugement
de la Cour suprême dans "Tennessee Eastman Co. c. Le
Commissaire des brevets" rendu en décembre 1972. Dans
sa réponse à la question posée à la page 6 (dernier
paragraphe)
"une telle méthode est-elle une "technique" ou
un "procédé" selon la définition du terme "invention"?"
M. le juge Pigeon répond que les méthodes portant sur un
traitement médical ne constituent pas des procédés au sens
du terme "invention" donné par l'article 2 de la Loi sur
les brevets, comme on peut le voir dans la phrase qui suit:-
"Ayant conclu que les méthodes de traitement
médical ne sont pas considérées comme un genre
de "procédé" dans la définition du terme
"invention" . . "
Dans sa lettre du 2 mai 1973, le demandeur demande qu'une
décision finale soit rendue au sujet de la présente
demande en vertu de l'article 46 du Règlement régissant
les brevets "afin que cette question puisse être reconsi-
dérée par la Commission d'appel des brevets pour voir si
elle est d'accord avec la position de l'examinateur selon
lequel le jugement de la Cour suprême a d'importantes
répercussions sur la politique à suivre par le Bureau des
brevets".
La principale différence entre les jugements de la Cour
de l'Echiquier et de la Cour suprême ne réside pas dans le
fait que le Bureau des brevets était appuyé dans l'un des
jugements et non dans l'autre, car le Bureau des brevets
était appuyé dans les deux jugements.
La présente demande comprend une limitation dans les reven-
dications portant sur la méthode de traitement médical de
façon à exclure le traitement des humains, alors que les
revendications de la demande de Tennessee n'excluaient pas
le traitement des humains, ce qui fait la différence entre
les deux demandes.
La présents demande et celle de Tennessee font mention de
méthodes de traitement médical pouvant servir au traitement
des humains et des animaux.
La principale différence entre les deux jugements est que le
jugement de la Cour de l'Echiquier a mis l'accent sur une
raison de refus à peine mentionnée dans le jugement de la
Cour suprême. La question qui nous intéresse et que nous
étudierons maintenant en détail est de savoir si cette
raison de refus s'applique toujours, après l'ordonnance de
la Cour suprême.
Dans sa réponses du 31 octobre 1973, le demandeur déclare (notamment):
Comme il a déjà été dit dans cette cause, les demandeurs ne
considèrant pas que ces revendications ont trait à une méthode
de traitement médical qui constitue un objet non brevetable,
aux termes de l'article 2 de la Loi sur les brevets. D'autre
part, l'examinateur prétend que les revendications 8 à 16 ne
sont pas brevetables, d'après le jugement rendu en décembre
1972 par la Cour suprême dans la cause Tennessee Eastman c. Le
Commissaire des brevets...
...
Il y a donc lieu de croire que l'examinateur soutient que le
jugement de la Cour suprême dans la cause Tennessee Eastman
Company c. le Commissaire des brevets établit, hors de tout
doute, et contrairement au jugement correspondant de la Cour
de l'Echiquier, que des revendications comme les revendications
8 à 16 qui se trouvaient dans la présente demande avant la
rectification actuelle, ne sont pas brevetables en vertu du
droit canadien. Les demandeurs soutiennent respectueusement
que ce n'est pas le cas.
Las demandeurs doivent donc conclure que ce jugement établit
maintenant que la découverte d'une deuxième utilisation d'une
ancienne substance, si cette deuxième utilisation comprend des
données cliniques en soi, ne peut constituer un objet breve-
table si elle ne constitue "qu'un moyen habile de contourner
les dispositions restrictives de l' article 41 (1)". Un raison-
nement semblable a probablement été suivi dans le jugement de
la cause Le Commissaire des brevets c. Farbwerke Hoechst 41
C.P.R. 9 (1964), d'après lequel un deuxième brevet ne peut pas
être délivré pour un composé pharmaceutique contenant l'anti-
diabétique tolbutamide alors que la tolbutamide fait déjà
l'objet d'un brevet; ainsi que dans la cause Gilbert c. Sandoz
64 C.P.R. 14, confirmée par la Cour suprême dans le
jugement 8 C.P.R. (2d) 210, où les tribunaux ont déclaré
que les revendications qui portent sur un simple mélange
d'une substance active et d'un vecteur sont nulles. lorsqu'elles
sont présentes dans le même brevet que les revendications
portant sur la substance active seule. Toutes ces revendica-
tions pourraient constituer "un moyen habile de contourner
les dispositions restrictives de l'article 41(1)" Dans le
cas présent, un tel problème n'existe pas puisque l'inventeur
est le premier à formuler certains composés contenant du
sulfoxyde de diméthyle et à trouver une utilité pratique à
son action physiologique nouvellement découverte et probablement
unique. Puisque le sulfoxyde de diméthyle est une substance
connue des chimistes depuis bien des années, il n'existe
aucun brevet qui contienne des revendications portant sur le
sulfoxyde de diméthyle en soi, basées sur une utilisation
médicale ou autre, et qui serait ainsi régi par les dispositions
de l'article 41(1). La présente invention de composés multiples
nouveaux et utiles contenant du sulfoxyde de diméthyle et leur
méthode d'emploi ne peuvent pas être considérées comme "un
moyen habile de contourner les dispositions restrictives de
l'article 41(1)" puisque l'article 41(1) ne s'applique pas dans
le cas présent, parce que la présente demande porte clairement
sur une invention qui va bien au-delà de celle de la substance
même (le sulfoxyde de diméthyle).
L'invention alléguée est essentiellement l'application d'un composé contenant
une quantité valable d'un agent physiologique actif, une quantité valable de
sulfoxyde de diméthyle et un diluant aqueux acceptable, au traitement des
animaux, y compris les humains. Le composé peut être administré par diverses
voies, y compris par voie buccale, localement ou encore par injection. C'est
l'utilisation ou l'application de ce composé qui a été refusée dans la décision
finale parce qu'il s'agit "d'une méthode de traitement médical".
La question est de savoir si une nouvelle utilisation du nouveau composé de
la revendication no 1, pour les besoins médicaux, peut âtre revendiquée à titre
d'invention. La revendication no 1, qui n'a pas été rejetée dans la décision
finale, se lit comme suit:
Un composé pour pénétrer les tissus, comprenant une quantité
valable d'un agent physiologique actif, ledit agent étant un
stéroide physiologique actif, un agent antinéoplastique, un
antigène, un agent antibactérien., un agent antihistaminique,
un agent neuropharmacologique, un agent anti -inflammatoire,
un anticoagulant, un vaso-dilatateur, un agent qui arrête
les rayons ultra-violets, un colorant diagnostique, un agent
diagnostique radio-opaque, une vitamine, de l'insuline, un
anesthésique général, un anesthésique local, ou un analgésique,
une quantité valable d'un sulfoxyde de diméthyle de qualité
acceptable du point de vue pharmacologique et d'us diluant ou
d'un vecteur aqueux pharmacologiquement acceptable.
La revendication no 8 rectifiée, déposée après la décision finale, porte sur
"une méthode pour utiliser le composé de la revendication no 1" et se lit
comme suit:
Une méthode pour améliorer la pénétration des tissus par un
agent physiologique actif choisi dans un groupe composé de
stéroides physiologiques actifs, d'agents antinéoplastiques,
d'antigènes, d'agents anti-micro-organismes unicellulaires,
d'agents antihistaminiques, d'agents neuropharmacologiques
d'agents anti-inflammatoires, d'anticoagulants, de vaso-
dilatateurs, d'agents qui arrêtent les rayons ultra-violets,
de colorants diagnostiques, d'agents diagnostiques radio-
opaques, de vitamines, d'insulines, d'anesthésiques géné-
raux, d'anesthésiques locaux et d'analgésiques, qui comprend
l'application dudit agent physiologique actif avec du
sulfoxyde de diméthyle et un diluant aqueux ou un vecteur
acceptable du point de vue pharmacologique.
Il a été remarqué que la revendication no 8 ci-dessus a une plus grande portée
que les revendications rejetées, parce qu'elle ne contient pas la restriction
"pour les animaux, à l'exclusion des humains".
Il est intéressant de remarquer que le 6 octobre 1972, le Commissaire des
brevets a rendu une décision par laquelle il acceptait une méthode de traite-
ment médical pour les animaux à l'exclusion des humains. Cette décision était
fondé sur ce qui était considéré comme l'interprétation de la Loi à l'époque,
d'après le jugement de la Cour de l'Echiquier dans la cause Tennessee Eastman
c. le Commissaire des brevets (1970) 62 CPR 117 dans laquelle le juge Kerr a
déclaré, après une étude approfondis des cas de jurisprudence:
A mon avis, la méthode exposée ici n'appartient pas au
domaine des arts manuels ou industriels et elle ne
produit pas non plus, lorsqu'elle est appliquée au
corps humain, un résultat qui se rapporte au commerce
ou à l'industrie ou encore un résultat essentiellement
économique. L'adhésif en soi peut constituer un objet
commercial, et le brevet pour le procédé, une fois
accordé, peut aussi se vendre et son utilisation peut
faire l'objet d'une licence pour des considérations
financières, mais il ne s'ensuit pas que la méthode et
son résultat constituent un objet commercial ou qu'ils
sont essentielle économiques dans le sens où ces
expressions ont été utilisées dans les jugements de
causes relatives à des brevets. La méthode en question
est essentiellement du domaine de la chirurgie et du
traitement médical du corps humain même si elle peut être
employée quelquefois par des hommes qui ne sont pas du
métier. Par conséquent, j'en conclus que d'après l'in-
terprétation actuelle du droit canadien en matière de
brevets et la portée de l'objet du brevet, telles qu'indi-
quées par les cas de jurisprudence que j'ai cités, la
méthode n'est pas une technique ou un procédé, ou encore
une amélioration d'une technique ou d'un procédé, aux
termes de l'article 2(d) de la Loi sur les brevets. (C'est
nous qui soulignons).
La présente décision porte sur "une nouvelle utilisation des esters d'un acide
a-cyanoacrylique, et particulièrement sur une méthode chirurgicale pour joindre
des tissus animaux en utilisant des esters en tant qu'adhésifs", qui a été
portée en appel devant la Cour suprême. C'est le jugement de la C.S.C. qui est
le fondement de la présente décision finale.
Ce qui est donc important dans cette détermintion, c'est le raisonnement de
la Cour suprême dans la cause Tennessee Eastman c. Le Commissaire des brevets
(1973) 8 C.P.R., aux pages 206 et 207 où le juge Pigeon a déclaré:
Tout comme dans le cas du terme "technique", la portée du
mot "procédé" dasn l'article 2(d) est quelque peu restreinte
par la disposition de l'article 28(3) qui exclut "de simples
principes scientifiques ou conceptions théotiques". Rien
n'indique que l'invention alléguée est telle, Elle est
clairement du domaine de l'application pratique. En fait,
comme le démontre le dossier, "l'invention" consiste essen-
tiellement en la découverte qu'une substance adhésive connue
peut être adaptée à l'usage chirurgical. Autrement dit,
l'objet de l'invention revendiquée est la découverte que cet
adhésif particulier est non toxique et qu'il peut être utilisé
pour la soudure de tissus animaux vivants ainsi que pour celle
d'une grande variété de matières inertes. Dans ce cas, il est
clair que la substance en soi ne peut être revendiquée comme
invention, et les appelants s'en sont bien gardés. Les reven-
dications se limitent à une méthode, c.-à-d. à un procédé qui,
dans ce cas, n'est rien d'autre qu'une nouvelle utilisation
d'une substance connue. La seule question est donc de savoir
si une nouvelle utilisation à des fins chirurgicales d'une
substance connue peut être revendiquée comme invention.
Une telle méthode est-elle une "technique" ou-un "procédé" au
sens de la définition de "l'invention"?
Il est clair qu'une nouvelle substance qui est utile dans un
traitement médical ou chirurgical pour animaux ou humains est
une "invention". Il est également clair qu'un procédé de
fabrication d'une telle substance est aussi une "invention".
En fait, la substance peut être revendiquée comme invention
seulement "lorsqu'elle est préparée ou produite par" un tel
procédé. Mais qu'en est-il de la méthode de traitement médical
ou chirurgical utilisant cette nouvelle substance? Peut-elle
aussi être revendiquée à titre d'invention? Dans le but d'établir
l'utilité de la substance, cela doit être défini jusqu'à un certain
point. Dans le cas d'un médicament, les effets souhaitables doi-
vent être précisés autant que les réactions secondaires non
souhaitées. Les doses appropriées doivent être définies ainsi
que les méthodes d'administration et toutes les contre-indications.
Ces données thérapeutiques comme telles peuvent-elles être reven-
diquées à titre d'invention indépendante consistant en une méthode
de traitement comprenant l'utilisation d'un nouveau médicament?
Je ne le crois pas et il ne semble que l'article 41 indique très
clairement que tel n'est le cas. (C'est nous qui soulignons).
Il est aussi intéressant de noter la référence faite par la C.S.C. dans la cause
Tennessee Eastman c. Le Commissaire des brevets, citée ci-dessus, à la demande
de Schering AG 1971 RPC 337, décision portant sur une méthode de contraception,
en citant la conclusion du tribunal d'appel des brevets, à la page 345, qui se
lit comme suit:
Après due considération de la question, il semble que les
brevets portant sur un traitement médical dans le sens strict
du terme doivent être exclus en vertu de la présente Loi, les
revendications qui font l'objet de la demande ne semblent pas
tomber dans cette catégorie et , d'après l'interprétation
actuelle de la Loi, elles devraient, du moins selon notre jugement,
à ce stade-ci, être recevables... (C'est le tribunal qui souligne)
Ainsi, il est clair que, premièrement, une nouvelle utilisation chirurgicale ou
médicale d'une substance connue est une "technique" ou un "procédé", aux termes
de l'article 2, puisqu'elle a une "application pratique", et deuxièmement,
l'"utilisation médicale ou chirurgicale" d'un nouveau médicament régie par
l'article 41(1) ne peut pas être revendiquée en tant qu'"invention indépendante"
du médicament lui-même. Cependant, on peut conclure dans les deux cas que les
revendications portant sur "un traitement médical au sens strict du terme" ne
sont pas brevetables en vertu de la Loi sur les brevets.
Le demandeur a soutenu, particulièrement au cours de l'audience, que "le sulfo-
xyde de diméthyle en soi n'est pas une médication" et que "l'objet rejeté ne se
limite pas à un traitement médical". Nous avons dans nos archives, dans le
TAPPI de juin 1965, à la page 1, l'énoncé suivant: "Le DMSO (sulfoxyde de dimé-
thyle) a démontré les propriétés d'un analgésique, d'un agent anti-inflammatoire,
d'un diurétique, d'une substance collagène, d'un bactéricide, d'un fongicide..,"
Cependant, à notre avis, il n'est pas nécessaire d'étudier ce point plus à fond,
puisqu'il est établi en droit que ce qui est revendiqué doit être interprété
comme un tout. Nous devons déterminer si les composés faits de sulfoxyde de
diméthyle et d'agents physiologiques actifs de la revendication no 1 sont des
médicaments. Et plus particulièrement, nous devons décider si la demande portant
sur l'application du composé aux animaux (y compris les humains) constitue un
"traitement médical", selon la définition donnée dans la cause Tennessee Eastman
c. Le Commissaire (déjà mentionnée).
Dans Imperial Chemical Industries Ltd. c. Le Commissaire des brevets (1967) 51
C.P.R. 102, pages 105 à 119, il y a une longue discussion au sujet de la signi-
fication du terme "médication" tel qu'utilisé dans l'article 41(1), pour
décidet si un anesthésique est une substance utilisée comme médication. La
Cour de I'Echiquier a décidé, à la page 105, que le terme "médication" doit être
interprété dans son sens ordinaire, pour aboutir à cette conclusion, elle a
pris en considération un grand nombre de définitions de dictionnaires (pages
108 à 119). En général, le terme "médication" est défini comme "une
substance utilisée pour le traitement ou la prévention d'une maladie". Le
tribunal a soutenu que l'"halothane" qui est un "anesthésique par inhalation"
est une substance destinée à une "médication" au sens de ce terme dans
l'article 41 de la Loi sur les brevets. Selon la définition de la Communauté
économique européenne, est "médicament"; "toute substance ou composition
présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des
maladies humaines ou animales".
Mais dans la cause Tennessee Eastman c. Le Commissaire (C.S.C.) déjà citée,
le juge Pigeon a limité, pages 208 et 209, la portée de la définition du terme
médication. Il a approuvé le jugement Schering qui soutenait que: "une
méthode de contraception utilisant un médicament" n'est pas un "traitement
médical au sens strict du terme". Le juge Pigeon s'est aussi référé aux demandes
de Swift and Company (1962) R.P.C. 37) et de National Research Development
Corporations (1961 R.P.C. 134) comme étant des cas d'exception aux méthode de
traitement en général. La demande de Swift portait sur une méthode pour
attendrir la viande en injectant des enzymes dans l'animal avant l'abattage.
La demande de la N.R.D.C. portait sur une méthode pour arracher les mauvaises
herbes.
Dans le présent exposé, certaines applications du composé de la revendication
no 1 sont citées: pénétration de la pénicilline dans le traitement d'un ongle
incarné infecté; pénétration d'anesthésique locaux pour éliminer la douleur
dans la région lombaire du corps; pénétration d'un agent chimiothérapeutique
pour traiter une tumeur maligne; pénétration d'insuline pour le traitement de la
pancréatectomie chez les chiens; et pénétration d'insuline pour le traitement
du diabète. Ces traitements produisent apparemment d'excellents résultats, et
il ne fait aucun doute que le composé est utilisé pour le "traitement curatif
de la maladie".
Par conséquent, d'après la pleine signification du terme "médication" citée
plus haut, l'utilisation que font les demandeurs du composé devrait à notre
avis être considérée comme "un traitement médical au sens strict du terme",
comme dans le jugement rendu par la C.S.C. en cause Tennessee Eastman c. Le
Commissaire des brevets.
La dernière question à trancher est de savoir si les traitements médicaux, tels
que définis par la Cour suprême dans la cause Tennessee Eastman Co. c. Le
Commissaire des brevets, comprennent le traitement des animaux aussi bien que
le traitement des humains.
Comme il a déjà été mentionné, la Cour de l'Echiquier a reconnu dans Tennessee
Eastman Co. c. Le Commissaire des brevets une différence entre les méthodes
appliquées aux humains et celles appliquées aux animaux. Elle a conclu que le
traitement des humains ne produit pas un résultat commercial ni industriel.
L'accent a surtout été porté sur l'aspect commercial et industriel et sur la
reconnaissance de deux entités possibles, soit le traitement médical des humains
et le traitement médical des animaux.
Toutefois à la Cour suprême, le juge Pigeon n'a fait aucune mention spéciale de
l'aspect commercial et industriel, mais il a conclu, à la page 206, que la
présumée invention "... est clairement du domaine de l'application pratique.
De fait, comme le prouvent les dossiers, "l'invention" consiste essentiellement
en la découverte qu'une substance adhésive connue peut être adaptée à l'usage
chirurgical". Le juge Pigeon n'a pas non plus fait de distinction entre les
animaux et les humains lorsqu'il a déclaré, à la page 206: "Il est clair qu'une
nouvelle substance qui est utile dans un traitement médical ou chirurgical pour
animaux ou humains est une invention," ou encore: "La seule question est donc
de savoir si une nouvelle utilisation à des fins chirurgicales d'une substance
connue peut être revendiquée comme invention... Je ne le crois pas, et il me
semble que l'article 41 indique très clairement que tel n'est pas le cas."
Si l'article 41 de la Loi..,sur les brevets vise les "produits destinés à
l'alimentation ou à la médication" tant des humains que des animaux (voir
American Home Products c. Le Commissaire des brevets Cour suprême de l'Ontario
LE L~ DçCEMBRE L(?(), il en résulte donc qu'aucune distinction ne doit être
faite entre les traitements médicaux des humains et ceux des animaux pour
faire pièce aux dispositions de l'article 41 de la Loi sur les brevets.
Le demandeur fait aussi référence à des décisions précédentes rendues par la
Commission, et plus particulièrement celle au sujet d'une invention pour
"Favoriser la croissance des ruminants" et celle pour "Une méthode d'analyse
des fluides ou des tissus biologiques", pour étayer sa prétention que le présent
objet est acceptable. Ces décisions sont cependant différentes puisqu'elles ne
concernent pas le traitement d'une maladie; car en d'autres termes il ne
s'agissait pas "de traitement médical au sens strict du terme."
Dans ces circonstances, la Commission est convaincue que "le traitement
médical au sens strict du terme", qu'il soit appliqué aux humains ou aux
animaux, ne peut être revendiqué à titre d'invention en vertu des dispositions
de la Loi sur les brevets.
La Commission recommande que la décision de l'examinateur portant refus de
l'objet des revendications 8 à 16 soit confirmée, et que par voie de conséquence
les revendications 8 à 17 proposées qui ont une portée plus large que les
revendications rejetées soient également rejetées.
Le président adjoint de la
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets et refuse
d'octroyer un brevet à l'objet des revendications 8 à 16 ou des revendications
proposées. Le demandeur dispose de six mois pour interjeter appel de la
présente décision, aux termes de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
Telle est ma décision
Le Commissaire des brevets
A.M. Laidlaw
Fait et signé à Hull (Québec)
le 14 mai 1974
Agents de brevets du requérant
Smart & Biggar