DECISION DU COMMISSAIRE
EVIDENT: Etant donné le contenu de plusieurs antériorités
Les phases du procédé d'extraction des substances indésirables qui se
trouvent dans la solution d'extraits et sont connues pour former un bouchon
avant la phase finale de la concentration par congélation, ou pour gâcher
l'extrait après la phase de concentration par congélation, étaient évidentes
pour tout homme du métier connaissant le contenu de plusieurs antériorités
où de telles substances sont extraites pour d'autres motifs.
DECISION FINALE: Confirmée.
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Cette décision porte sur une demande de révision, par le Commissaire des
brevets, de la décision finale de l'examinateur en date du 5 juillet 1972
au sujet de la demande 056,234. Cette demande a été déposée aux noms de
Richard G. Reimus et Anthony Saporito et a trait à un "Appareil de concentration".
La Commission d'appel des brevets a tenu une audience le 16 mai 1973, à
laquelle M. O'Gorman a représenté le demandeur.
Lors de l'instruction qui s'est terminée par la décision finale, l'examinateur
a refusé les revendications C1 et C2 parce qu'elles ne définissent pas un
objet inventif par rapport aux antériorités suivantes.
Brevets américains
1,507,410 le 2 septembre 1924 W. Zorn
2,410,157 le 29 octobre 1946 W.S. Frederickson
Publication:
Sivetz: Coffee Processing Technology, volumes 1 et 2. The AVI Publishing
Co. Inc., 1963.
Dans sa décision finale, l'examinateur a déclaré notamment:
Zorn n'utilise pas l'expression "dégraissage". Toutefois,
le brevet décrit la filtration d'un extrait chaud pour
extraire les "matières en suspension" (ligne 73, page 1).
Zorn poursuit ainsi "...le liquide filtré passe ensuite
dans un serpentin ou une cuve de refroidissement 4 et la
température est réduite le plus possible sans atteindre
le point de congélation. Le liquide froid est ensuite
filtré de nouveau par le second filtre 5 pour éliminer
les matières que le refroidissement du liquide a laissées
en suspension..." (c'est moi qui souligne) (lignes 74 à
79, page 1). Cette définition semble rendre assez bien
ce que le demandeur entend par l'emploi de l'expression
"dégraissage".
Dans le mémoire, peu de précisions sont données sur l'importance
déterminante de la "période de retenue". Tout d'abord, elle est
présentée comme un choix par l'emploi de l'expression "si désiré".
Deuxièmement, l'intervalle indiqué dans la phrase "de quelques
secondes à plusieurs heures" couvre à peu près toutes les périodes
possibles d'utilité pratique. Il semble impossible que Zorn
puisse faire autrement que de procéder à l'intérieur de cette
période, et il serait déraisonnable de présumer qu'il le pourrait
ou qu'il le ferait.
En ce qui concerne l'intervalle de température, le demandeur
mentionne également des intervalles de 80 F à 32ÀF et de 45À à 32 F
au dernier paragraphe de la page 4, aussi bien qu'un intervalle de
80À à 36ÀF que le demandeur déclare maintenant déterminant.
En ce qui concerne la description des intervalles de concentration,
il faut reconnaître que les valeurs spécifiques données ne sont
pas mentionnées. Toutefois, l'intervalle "allant d'un faible
pourcentage jusqu'à 40 à 50 pour cent" est si grand qu'il est
difficile de concevoir pourquoi Zorn ne procéderait pas à l'intérieur
de cet intervalle. En outre, le mémoire de demandeur semble étayer
de peu de preuves l'assertion selon laquelle ces deux types d'intervalles
sont également déterminants.
L'argument du demandeur selon lequel il y a une différence déterminante
entre l'énoncé: "de quatre à cinq jours de préférence" de Frederickson,
et celui du demandeur: de quelques secondes à plusieurs heures "si
désirée" est inacceptable.
Cependant, cet aspect est étudié aux pages 14 à 21 du volume 2 de
Sivetz qui traitent des conditions nécessaires à la formation de la
glace, de la dispersion des solides dissous au cours des phases
liquides et solides, de l'effet de la séparation des graisses, et
enfin, de l'élimination de la glace par centrifugation. Sivetz
décrit donc la précipitation des graisses et la concentration par
congélation.
Le demandeur, dans sa réplique à la décision finale, en date du 5 juillet
1972, a déclaré notamment:
En ce qui concerne l'antériorité de Zorn, le demandeur souligne
que Zorn ne s'intéresse pas au problème résolu par la présente
invention, à savoir l'élimination des graisses, goudrons, etc.
de l'extrait de café pour faciliter la concentration par
congélation. En vérité, Zorn ne manifeste aucun intérêt pour
ce problème. Le principal objectif du mémoire de zorn est
d'éliminer d'une infusion de café "les él.ments indésirables dont
la présence entraîne des modifications chimiques ou autres qui
altèrent l'arôme du liquide ou le gâtent " (voir lignes 26 à 30, page 1).
Ainsi, bien qu'aux lignes 69 à 90 de la page 1, Zorn divulgue la
filtration, le refroidissement et la filtration secondaire d'un
extrait de café avant la concentration par congélation, ces opérations
ne visent pas à enlever les graisses et goudrons pour faciliter la
concentration par congélation, mais à éliminer les éléments
indésirables qui gâcheraient l'extrait liquide de café.
Le demandeur fait observer que ses propres revendications se
distinguent de la divulgation de Zorn sur un autre point. Elles
requièrent en effet le maintien de l'extrait à la température de
refroidissement pour permettre la formation du précipité avant la
filtration. Voir, par exemple, la revendication C1 qui décrit
"le maintien dudit extrait à ladite température pendant une
période de retenue, suffisante pour précipiter les graisses,
goudrons et autres solubles du café, dans la solution, pour qu'ils
déposent, mais pas assez longue pour altérer l'extrait de café
de façon notable".
La méthode d'élimination des substances indésirables de
Frederickson comprend le refroidissement de l'extrait à
une température de 33 à 34 F et une période de repos "de
quatre à cinq jours de préférence" au cours de laquelle
l'extrait n'est pas remué. Le demandeur estime qu'une période
de repos aussi prolongée que celle proposée par Frederickson,
entraînerait l'altération de l'extrait de café; ceci n'entre
évidemment pas dans le cadre de l'invention énoncée dans la
revendication C1 d'après laquelle une période de retenue est
nécessaire mais ne doit toutefois "pas être assez longue pour
altérer l'extrait de café de façon notable".
Cette demande a trait à un procédé de traitement d'extraits liquides pour
la préparation de particules de café solubles.
Les revendications C1 et C2 se lisent comme suit:
Un procédé de dégraissage de 20 à 40% des solides, contenus
dans l'extrait de café frais, procédé qui comprend le
refroidissement dudit extrait à une température variant
entre le point de congélation dudit extrait et 70 F; le maintien
dudit extrait à ladite température pendant une période de
retenue, suffisante pour précipiter les graisses, goudrons et
autres solubles du café dans la solution, afin qu'ils déposent,
mais pas assez longue pour altérer l'extrait de café de façon
notable; la séparation physique de ladite matière précipitée
et dudit extrait au cours d'une phase choisie dans le groupe
composé de la filtration et de la centrifugation; et la
concentration par congélation de l'extrait obtenu.
Dans un procédé de concentration d'un extrait liquide de
café formant un précipité insoluble à une température
supérieure à celle où il y a formation de glace, dont
la teneur en solides dissous est d'environ 20 à 40%, et
comprenant la congélation partielle dudit extrait liquide
pour former de la glace et l'extrait liquide concentré,
l'amélioration consiste à refroidir préalablement ledit
extrait liquide à une température d'environ 30À à 70ÀF pour
précipiter la matière insoluble qu'il contient, l'entreposage
dudit extrait liquide selon ledit intervalle de température
jusqu'à formation d'un précipité suffisant, sans altération
appréciable de l'arôme, la séparation par centrifugation de
ladite matière insoluble et dudit extrait liquide, la soumission
subséquente dudit extrait liquide à une température plus basse
afin qu'il s'y forme de la glace, et la séparation de la glace
et dudit extrait concentré.
Plus précisément, le procédé décrit dans les revendications C1 et C2 a
trait à la concentration d'extraits de café pour la préparation de
particules de café solubles. Les phases sont les suivantes:
a) le prérefroidissement à une température de 30À à 70 F
d'extraits de café, dont la teneur en solides est de 20
à 40%, pour amorcer la précipitation des matières
insolubles,
b) l'entreposage de l'extrait refroidi pendant le temps
nécessaire à la précipitation. Toutefois, ce délai
ne doit pas se prolonger au point d'altérer l'arôme,
c) la séparation physique des matières insolubles précipitées.
En menant à bien les trois premières phases précédant la concentration
par congélation, l'objectif visé est d'éliminer de l'extrait les goudrons
et graisses qui obstruent le panier centrifuge utilisé au cours de la
phase de concentration par congélation.
Il s'agit de décider si le procédé décrit dans les revendications C1 et C2
peut être refusé légitimement pour des raisons d'évidence étant donné les
antériorités opposables.
L'antériorité Sivetz invoquée établit que des pourcentages de solides
variant de 10% à 30% et même 40% peuvent être obtenus facilement par
percolation normale dans la préparation d'extraits de café pour le procédé
de concentration par congélation des solubles de café. Il est à remarquer
également que ce texte établit que plus de degré de concentration est
élevé, plus le café perd de son arôme. Il est donc courant d'utiliser
des extraits de café dont la teneur en solides est de 20 à 40%, tel que
revendiqué par le demandeur, pour la préparation de particules de café
soluble.
Dans son brevet, Frederickson reconnaît la nécessité d'éliminer de l'extrait
de café les graisses et autres substances solubles pour éviter que l'extrait
se détériore. Le procédé utilisé dans ce brevet comprend le refroidissement
de l'extrait à une température variant de 33À à 34 F, puis le repos de
l'extrait pendant une certaine période; cependant, cette période de retenue
est plus longue que celle mentionnée dans la présente demande, pour des
motifs quelque peu différents. Le mémoire de l'antériorité Frederickson
dépasse la portée de la présente demande, puisque non seulement Frederiskson
mentionne les graisses et autres substances, mais qu'il identifie trois
types de substances cireuses qui sont précipitées à des vitesses différentes.
Les précipités lourds se déposent au fond, tandis que la séparation des
précipités légers exige d'autres moyens. A la page 148 du tome 2 de son
ouvrage, Sivetz reconnaît, lui aussi, que la présence de goudron dans les
extraits de café est indésirable, et que ce goudron adhérera à n'importe
quelle surface et sera très difficile à enlever. Dans cette antériorité,
il est suggéré d'éliminer le goudron par centrifugation; or cette phase
est précisément revendiquée par le demandeur dans la revendication C2 et
est l'une des phases possibles mentionnées dans la revendication C1.
L'un des objectifs du procédé divulgué par le brevet Zorn est d'éliminer
les éléments indésirables des extraits de café. La filtration est l'une
des phases utilisées dans ce procédé. Le demandeur désire éliminer les
mêmes éléments indésirables de l'extrait de café, mais en vue d'un objectif
différent, celui de prévenir l'obstruction du panier pendant la concentration
de l'extrait par congélation. La phase de la concentration par congélation
décrite par le demandeur est précisément celle que Zorn a décrite.
La phase de la séparation physique des substances insolubles précipitées
dans l'extrait de café, exécutée avant la phase de la concentration par
congélation, peut être faite soit par filtration, soit par centrifugation,
et tel que susmentionné, ces phases possibles sont clairement indiquées
dans les antériorités "sivetz" et "Zorn".
En outre, prenant en considération le contenu des deux brevets invoqués
et l'ouvrage de Sivetz où la technique de la transformation du café est
étudiée à fond, il est jugé que la phase revendiquée par le demandeur,
et qui consiste à éliminer d'une solution, avant son utilisation dans un
procédé de concentration par congélation, les éléments indésirables dont
les propriétés obstructives sont connues, est un fait évident pour tout
homme du métier. De même, nous soutenons qu'éliminer d'un extrait les
substances qui s'y sont formées au cours d'une période de retenue et qui
peuvent gâter ledit extrait est un fait évident pour tout homme du métier.
En outre, dans l'ouvrage citée, Sivetz étudie à fond non seulement
l'effet des substances mentionnées par le demandeur, mais aussi celui
de plusieurs autres substances comme les huiles, le carbone, les colloides
et les cendres.
La Commission est donc convaincue que le demandeur n'a pas accompli de
progrès technique et que le procédé décrit dans les revendications C1
et C2 ne justifie pas la délivrance d'un brevet.
La Commission recommande que la décision de l'examinateur de refuser les
revendications C1 et C2 pour défaut d'objet d'invention brevetable,
soit confirmée.
Le Président adjoint
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets et
refuse de délivrer un brevet relativement aux revendications C1 et C2.
Le demandeur dispose de six mois pour interjeter appel de cette décision,
aux termes de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
Telle est ma décision,
Le Commissaire des brevets
A.M. Laidlaw
Fait et signé à Ottawa (Ontario)
le 25 mai 1973.
Agents pour le demandeur
Smart & Biggar, Ottawa