DECISION DU COMMISSAIRE
REDELIVRANCE: Nouvelles revendications pour des parties non revendiquées
de la véritable invention.
Même si les nouvelles revendications, afin d'éviter d'imiter les techniques
antérieures, doivent nécessairement reposer sur des restrictions différentes de
celles contenues dans les restrictions différentes de celles contenues dans les
revendications concernant le brevet initial retenu pour redélivrance, le brevet
initial est défectueux et inopérant parce qu'il a revendiqué moins que ce
qui était inventé en réalité. Les nouvelles revendications sont jugées selon
leur propre mérite, indépendemment de la présence des revendications initiales,
et le fait que les revendications pourraient être présumées tenir compte de
différents objets d'invention, ne vicie pas la validité de cette revendication
en vertu des dispositions de l'article 38(1), le Commissaire n'ayant reçu aucune
autorité en vertu de l'article 50(3) d'exiger des demandes supplémentaires.
DECISION FINALE Infirmée.
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La présente décision a trait à une demande de révision, par le Commissaire des
brevets, de la décision finale de l'Examinateur, en date du 29 mars 1972, de la
demande portant le numéro 060,764. La demande a été déposée au nom de Lubomyr
0. Hewko et porte sur "Un mécanisme auxiliaire de commande. La Commission d'appel
des brevets a entendu l'appel le 8 novembre 1972. Le demandeur était représenté
par MM. G. F. Henderson et B. E. Fisk.
Lors de l'instruction, qui s'est terminée par la décision finale, l'Examinateur a
refusé la demande de redélivrance pour les motifs suivants:
(a) La demande de redélivrance contient des revendications
ayant trait à une invention différente de celle du brevet
initial portant le numéro 771,386.
(b) Le demandeur n'a pas démontré qu'il avait l'intention
de revendiquer l'objet d'invention exposé dans les présentes
revendications de redélivrance 5 à 10.
Dans la décision finale, l'Examinateur déclare (notamment):
Le premier motif de refus est fondé sur le fait qu'un brevet
redélivré doit porter sur la même invention que le breveté
a décrit et revendiqué dans le brevet initial. Afin que
cette demande soit jugée avoir trait à la même invention,
toutes les revendications doivent contenir les restrictions
essentielles qui ont été jugées nécessaires pour rendre
brevetable la revendication la plus générale, soit la
revendication 4 du brevet initial, laquelle est également
la plus générale dans la présente demande de redélivrance.
Les revendications 1 et 5 à 10, elles qu'elles sont actuellement
ne comportent pas les caractéris~~ques essentielles de la
revendication 4 du brevet initiai et, par conséquent, visent
une invention différente de celle pour laquelle le brevet a été
délivré.
Le second motif de refus est fondé sur le fait que le demandeur, dans
la revendication initiale, avait revendiqué un porte-planétaire doté
des surfaces palières espacées formant un palier hydrodynamique, et
qu'ensuite ayant modifié les revendications, il avait annulé toute
référence à ce palier particulier, et qu'en fait, il avait annulé toute
référence à un palier quelconque. Un brevet en redélivrance n'a pas
pour but d'introduire à nouveau, ou de donner une im-ortance plus grande, à
un objet d'invention annulé au cours de l'instruction du brevet initial.
Un jugement rendu dans une cause connexe est irrévocable et ne peut être
amendé par une redélivrance. Ce jugement exclut toute prétention à la
revendication de l'objet en cause.
En résumé, nous considérons que la présente demande en redélivrance
comporte encore de nouvelles revendications qui ne se rapportent pas à
la même invention que le brevet initial, et que le demandeur n'avait pas
l'intention de revendiquer l'objet des nouvelles revendications puisque cet
objet est étroitement lié à l'objet délibérément annulé dans une revendication
lors de l'instruction du brevet initial. La teneur de l'article 50 de la Loi
sur les brevets écarte nettement toute possibilité d'amendement dans l'une
ou l'autre de ces causes et, par conséquent, la présente demande de redélivrance
est jugée irrécevable.
Le 28 juin 1972, dans sa réponse à la décision finale, le demandeur déclare
(notamment):
Nous alléguons que le refus de l'Examinateur pour ce motif, ainsi que les
raisons qui l'y ont amené, ne correspondent pas à la lettre de la Loi.
L'Examinateur a déclaré qu'afin que la demande puisse être considérée
avoir trait à la même invention, toutes les revendications doivent comporter
les restrictions énoncées dans la revendication la plus générale du brevet
initial.
Nous faisons respectueusement remarquer que cette déclaration de l'Examinateur
va à l'encontre de la décision de la Cour Suprême du Canada dans l'affaire
de Curlmaster Manufacturing Co. Limited c. Atlas Brush Limited, 52 CPR 51.
La revendication 1 de la demande en redélivrance de cette cause est reproduite
aux pages 63 et 64 du rapport. Il est évident que ladite revendication ne
comporte pas la restriction à l'effet que les fibres doivent être divisées
en deux groupes de longueur inégale, bien que cette restriction fasse partie
de toutes les revendications de la demande connexe, comme on peut le voir à
la page 57 du rppport. En dépit de ce fait, la Cour Suprême du Canada a
jugé la demande en redélivrance ainsi accordé, valide. Compte tenu de ce
jugement, les déclarations de l'Examinateur, qui maintient que les revendications
de la présente doivent comporter toutes les restrictions essentielles qui avaient
été jugées nécessaires afin de rendre brevetable la revendication 4 du brevet
initial, doivent alors être nettement fausses.
L'Examinateur semble être d'avis que le demandeur, en annulant la
revendication 3 de la demande initiale, a pris une décision qui le lie
et l'empêche de revendiquer l'objet des revendications 5 à 10. Compte
tenu des faits, cette prétention est tout à fait fausse. En examinant
la revendication 3 de la demande initiale, revendication qui a été annulée
le 9 février 1967, nous constatons que ladite revendication ne fait pas
état des caractéristiques sur lesquelles nous fondons la brevetabilité
de la présente demande. La seule référence à l'objet revendiqué par la
présente, qui soit faite dans les revendications 5 à 10, peut se lire
comme suit ''...les surfaces palières espacées dans ledit porte-planétaire
et formant un palier hydrodynamique". En limitant la portée des revendications
dans le but de prouver la supériorité de son invention par rapport à
l'antériorité canadienne, ainsi que de la technique citée par opposition
à la demande américaine correspondante, le demandeur a omis de revendiquer,
par inadvertance, dans ses revendications révisées, l'objet ayant trait au
palier hydrodynamique dans la revendication 3. Cependant, l'existence même
de la revendication 3 indique clairement que le demandeur avait bel et bien
l'intention de revendiquer l'objet en cause, et les déclarations incontestées
de la demande démontrent bien que cette omission était le résultat d'une
inadvertance, d'un accident ou d'une méprice de la part des avocats en
brevets du demandeur, survenue lors de l'instruction de la demande. L'objet
des revendications 5 à 10 de la présente n'est nullement suggéré par la
technique décrite dans les documents au dossier du brevet initial numéro 771,386.
Nous allèguons que, bien que l'annulation de la revendication 3 puisse
constituer une décision pouvant empêcher le demandeur de revendiquer, dans
les procédures en cours, une revendication ayant la portée de la revendication
3 de la demande initiale, elle ne peut en aucune manière l'empêcher d'en
revendiquer une de portée plus restreinte, qui n'a pas été revendiquée dans
la demande initiale, et qui a trait à un objet qui n'a pas été rejeté en raison de
technique. Rien dans la Loi n'appuie la position prise par l'Examinateur, et
cette position est de toute évidence inéquitable. Dans les circonstances
présentes, la demande en cause se situe dans les limites des règlements régissant
la redélivrance d'un brevet, du fait que le demandeur a, par inadvertance,
accident ou méprise, revendique moins que ce à quoi il avait droit en raison
de l'état de la technique. Par conséquent, le demandeur cherche à obtenir
redélivrance de son brevet afin de bénéficier de la protection qui lui est due.
Dans sa demande le demandeur déclare:
(1) Que le demandeur est titulaire du brevet portant le numéro 771,386
décerné le 14 novembre 1967 pour une invention intitulée:"Mecanisme
auxiliaire de commande".
(2) Que ledit brevet est jugé défectueux et inopérant parce que la
description ou la spécification sont insuffisantes, et parce que le
breveté a revendiqué moins que ce à quoi il avait droit.
(3) Que les raisons poux lesquelles le brevet est jugé défectueux et
inopérant sont les suivantes:
(3a) Que la spécification est défectueuse du fait qu'elle
ne revendique pas de manière explicite l'agencement
et la construction de la réalisation illustrées à la
figure 5, telle qu'elle a été modifiée afin de corriger
une erreur qui s'y était glissée par méprise.
(3b) Que ledit brevet ne contient pas de revendications d'une
portée semblable à celle des revendications 5 à 10 qui
sont établies selon l'illustration à la figure 5
(3c) Que les revendications 1 à 4 dudit brevet se limitent à des
détails de construction que ne sont pas indispensables à
l'application de l'invention et, à cause de cette même
limitation injustifiée, ne donnent pas au demandeur tout le
crédit qui lui est dû.
(4) Que ladite insuffisance est survenue sans aucune intention de fraude
ou de l'inventeur, ni de la part de ses avocats en brevet qui par
inadvertance se sont trompés dans la préparation de la demande dudit
brevet, ainsi qu'au cours de la procédure d'examen d'admissibilité
de ladite demande de brevet et, également par inadvertance, l'erreur
n'a pas été découverte par l'inventeur qui, ne possédant aucune
expérience de la Loi régissant les brevets ou de la procédure d'examne
de demande de brevet, ne s'est pas aperçu desdites omissions lors de la
préparation ou de l'instruction de la demande.
(5) Que la connaissance des faits nouveaux, révélés dans le mémoire
descriptif modifié et à la lumière duquel les nouvelles revendications
ont été rédigées, est venue au demandeur vers le premier juin 1969 lors
d'une révision dudit brevet et de ses revendications connexes.
Les revendications 1 à 4 sont essentiellement les mêmes que celles qui ont contribua
à la délivrance d'un brevet à la demande initiale. La revendication 4, qui est
représentative, se lit comme suit:
Un mécanisme auxiliaire de commande permettant d'entraîner les
éléments secondaires d'un véhicule actionné par moteur, comportant
un boîtier de support, un manchon de support fixé audit boîtier, un
porte-planétaire entraîné par le moteur, un galet de planétaire entraîné
par ledit porte-planétaire, un pignon solaire supporté par ledit
manchon de support, une couronne, ledit palier entraînant par frottement
le pignon solaire et la couronne, un arbre de commande finale de souple
accouplé de manière à commander l'élément auxiliaire du moteur et dont
l'une des extrémités se prolonge à l'intérieur dudit manchon de support,
des dispositifs pour supporter ladite extrémité de l'arbre et pour
commander ledit arbre et comportant un accouplement entre ladite couronne
et ledit arbre, ledit galet de planétaire pouvant effectivement entraîner
ladite couronne et supporter ladite couronne et son accouplement supportant
ainsi ladite extrémité dudit arbre de commande de couple.
Les revendications 5 à 10 ont été ajoutées à la présente demande de redélivrance.
La revendication 5 se lit comme suit:
Un mécanisme de transmission de puissance comportant un boîtier
d'attaque, un élément d'entrée de puissance, un élément de débit
de puissance, un porte-planétaire monté de façon à pouvoir tourner
dans kedit boîter et accouplé à l'un des éléments afin de trans-
mettre le couple, un certain nombre d'encoches axiales disposés
à intervalles réguliers façonnées dans ledit porte-planétaire
ayant de surfaces palières planes espacées parallèlement par rapport les unes
aux autres et se faisant face, une paire de garnitures de paliers
disposées vis-à-vis l'une l'autre dans chacune desdites encoches, chaque
garniture ayant une surface plane en contact avec l'une des surfaces de
galets et une surface concave essentiellement sphérique façonnée du
côté opposé desites surfaces palières afin d'assurer deux surfaces
sphériques se faisant face dans chaque encoche, une bille planétaire
fixée entre les deux s~~~ces spériques concaves en opposition de chacune
desdites paires de garnitures et se prolongeant au-delà des faces opposées
dudit porteur, la surface sphérique concave de chacune desdites
garnitures se caractérisant par un rayon plus grand que le rayon de
chacune desdites billes planétaires, d'où une ouverture de coincement
entre la bille et chacune desdites surfaces concaves sphériques, faites
de manière que le lubrifiant en présence dans lesdites ouvertures de
coincement a tendance à soulever lesdites billes planétaires, de sorte
qu'elles produisent une lubrification absolue et hydrodynamique à l'endroit
des paliers spériques, la première couronne étant reliée à un autre desdits
éléments afin de transmettre le couple et entraîner ladite bille par
frottement, la deuxième couronne étant reliée à un troisième desdits éléments
afin de transmettre le couple et entraîner ladite bille par frottement,
la première et la deuxième couronne positionnant axialement et radialement
ladite bille et comportant les moyens pour engager ladite première couronne
et ladite deuxième couronne en contact de frottement avec ladite bille de
manière à transmettre le couple.
Parmi les causes nombreuses qui, comme la présente, ont trait à des demandes
de redélivrance, il convient de se référer à la décision de la Cour Suprême du
Canada dans l'affaire de Curlmaster c. Atlas (1967) RCS, pages 514 à 517, qui
révèle la position de la Loi qui a motivé le jugement rendu dans l'affaire en
question: (insistance particulière soulignée par des traits gras).
Le juge de première instance s'est basé sur la déclaration de
J. MacLean concernant le but de l'article 50 dans la cause de
Northern Electric Company Ltd. c. Photo Sound Corporation (1936)
Ex. R.C. pages 75 à 89:
... une redélivrance a pour but de modifier un brevet
défectueux, des défauts dans le mémoire ou les dessins,
et non l'objet en cause, ce afin de divulguer l'objet
brevetable et lui assurer la protection que le brevet
avait pour but de conférer à l'inventeur. Par conséquent,
un brevet de redélivrance doit se limiter à l'invention que
le breveté a tenté de décrire et de revendiquer dans son
émoire original, mais qu'il n'a pas réussi à faire parfaitement
à cause d'une inadvertance, d'un accident ou d'une méprise"; il
a donc droit, non pas à un brevet nouveau mais à un brevet
modifié. Le contraire, s'il était admissible, donnerait lieu
à une situation intolérable. Il est alors logique de conclure
qu'aucun brevet ne peut être jugé "défectueux ou inopérant"
aux termes de la Loi, parce qu'il ne décrit ou ne revendique
pas l'objet de l'invention au-delà des restrictions de ladite
invention telle qu'elle a été conque et perçue par l'inventeur
au moment de l'invention.
Le juge a également fait référence au motif invoqué par C.J. Duff dans la
même cause (1936) RCS, pages 649 à 651:
Il faut surtout que l'invention décrite dans le
mémoire descriptif, ou la spécification modifiée et
protégée par le nouveau brevet, soit la même invention
sur laquelle portait le brevet initial.
et à la page 652:
La Loi ne prévoit pas de cas où l'inventeur a omis de
revendiquer protection à l'égard d'un objet qu'il a inventé
mais qu'il a négligé de décrire ou de prescrire adéquatement,
parce qu'il ignorait ou ne croyait pas que l'objet qu'il
avait réalisé constituait une invention aux termes de la
Loi dur les brevets, et que par conséquent il n'avait pas l'inten-
tion de décrire, prescrire ou revendiquer dans son brevet original.
La teneur de l'article 50 écarte nettement toute possibilité
d'amendement dans un cas semblable.
L'article 50 de la Loi a été discuté récemment dans cette Cour
concernant l'affaire de Farbwerke Hoechst Aktiengeselschaft c. Le Commissaire
des brevets, (1966) R.C.S. 604. Dans cette affaire, référence fut faite
au jugement rendu par la Cour Suprême des Etats-Unis dans la cause de
Mahn c. Harwood, (1884) 112 U.S., pages 354 à 363, et qui définit les
conditions de la Cour américaine relativement à la redélivrance de
brevet comme étant "un moyen d'offrir l'adoucissement que les cours
de justice ont toujours donné dans les cas bien clairs d'accident ou
de méprise dans la formulation de documents écrits."
A la page 530 de la même cause, on peut également lire la décision prise par
la cour dans l'affaire de Leonard c. Le Commissaire des brevets, (1913) Ex.
R.C. 351, dans laquelle J. Cassels déclare à la page 360:
Lorsqu'on a revendiqué un dispositif ou une combinaison
spécifique, la non-revendication des autres dispositifs
ou combinaisons à première vue présents dans le mémoire,
représente selon la Loi, en ce qui touche le breveté, un
don que ledit breveté fait au domaine public et doit ainsi
être exécutée, à moins que le breveté ne s'empresse le
déposer une demande de redélivrance et de prouver que c'est
par inadvertance, accident ou méprise qu'il a omis de
revendiquer lesdits dispositifs ou combinaisons.
A la lumière d'une longue série de décisions, il est évident
que les mots "en raison d'une spécification ou d'un mémoire
descriptif insuffisant" s'appliquent à la revendication en tant
que partie de la spécification dans un brevet.
Il a également été établi que le brevet original peut, tout
en étant à première vue parfaitement bon, être soumis aux termes
de cette condition et être considéré défectueux et inopérant
en raison d'une spécification ou d'un mémoire descriptif insuffisant
s'il est évident que le breveté ayant exposé son invention dans la
spécification a, par méprise, omis de la revendiquer.
Il est par conséquent possible que les conditions nécessaires pour rendre une
redélivrance valide soient remplies même lorsqu'aucune revendication n'a été
faite de l'invention réelle du brevet initial, comme l'affirme la décision rendue
par la Division de première instance de la Cour Fédérale (décision dont le
compte-rendu n'a pas été consigné) dans l'affaire de Burton Parson Chemical
c. Hewlett-Packard (Canada) Ltd., le 31 mai 1972 - Référemce Numéro T-390-71,
dans laquelle le juge Noël déclarait à la page 42:
...la Cour s'efforce uniquement d'établir l'existence d'une
invention brevetable même dans le cas où cette dernière n'est
pas nécessairement décrite ni même revendiquée, puisque la
déclaration de l'invention exposée au début du brevet original
de Curl-Master ne mentionnait pas du tout la caractéristique
qui, comme la Cour le constatait plus tard, constituait
l'invention sur laquelle pouvait se baser le brevet de redélivrance.
Considérant la présente demande, le motif de refus à l'effet que "Le demandeur
n'a pas réussi à prouver qu'il avait l'intention de revendiquer l'objet
d'invention exposé présentement dans les revendications de redélivrance 5 à
10" semble être basé sur le manque d'évaluer adéquatement la spécification
de la demande initiale, ainsi que la demande de redélivrance dans l'établissement
de la nature réelle de l'invention, et de ce qui devrait être protégé par le
brevet. Il faut cependant comprendre qu'il n'y a pas de redélivrance possible
dans un cas où l'inventeur aurait été dans l'impossibilité de revendiquer, dans
le brevet initial, ce qui a été revendiqué dans un brevet de redélivrance, ou
lorsqu'il y a de toute évidence intention de fraude.
Au cours de la procédure d'examen de la demande initiale, le demandeur a
retiré toutes les revendications originales, dont la revendication 3 qui
contenait une déclaration ayant une large portée "...des surfaces de palières
espacées dans ledit porte-planétaire et formant un palier hydrodynamique..."
se rapportant à la figure 5 des dessins. Le demandeur déclarait, comme on peut
le constater à la demande, qu'il y avait eu erreur dans la figure 5 des dessins
originaux, où les garnitures (59) auraient dû être illustrées avec un
remplissage de barres obliques afin de correspondre à la divulguation selon
laquelle la partie (60) réfère à une surface sphérique et non à une surface
cylindrique. A ce sujet la divulguation originale déclare:
Dans la figure 5, le porte-planétaire illustré est muni
d'encoches 58, usinées intérieurement et conques pour recevoir
les garnitures de palier 59. Les garnitures 59 sont dotées
de surfaces sphériques 60 qui épousent plus étroitement la
forme sphérique des billes planétaires et produisent une
meilleure capacité de charge hydrodynamique. Ici, un palier
sphérique partiellement hydrodynamique est crée par l'usinage
d'un siège sphérique à l'intérieur de la garniture 59. Comme
l'indiquent les flèches, le rayon du siège est supérieur au
rayon de la bille planétaire, d'où une ouverture de coincement
entre la bille planétaire et le siège 60.
Par conséquent, il est admis que l'erreur à la figure 5 du dessin est un
facteur qui contribue à la conception erronée de l'invention réelle partant
de l'impossibilité d'obtenir les revendications concernant la structure de la
figure 5 de la demande initiale. Ainsi donc, par les nouvelles revendications,
visant la nouvelle figure 5, le demandeur tente de conférer à son invention
une portée plus grande par redélivrance que par le brevet. Cependant, comme il
a été établi, par les décisions rendues dans les causes invoquées (ci-devant),
nonobstant les droits du public à l'égard de l'objet non revendiqué, il est
permis à un breveté de renoncer à son brevet et de révoquer l'abandon apparent
qu'il en a fait au domaine public, pourvu que les conditions clairement définies
concernant la délivrance soient remplies.
Comme le déclare l'Examinateur dans son exposé, point auquel la Commission
d'appel des brevets se rallie, les revendications 5 à 10 déposées pour redélivrance
ont une portée plus restreinte que les revendications initiales qui ont été
annulées; ainsi donc, il n'est pas question ici de recouvrer l'objet déliberément
abandonné par la suppression des revendications face à une objection. Il
s'agirait plutôt de rechercher des revendications d'une portée égale ou plus
vaste que les revendications initiales annulées. En outre, il est également
important que les nouvelles revendications diffèrent de la technique antérieure.
L'autre motif de refus, à savoir que "La demande de redélivrance comporte des
revendications qui ont trait à une invention différente", parait fondé sur une
interprétation de l'article 60 du Règlement régissant les brevets combiné avec
l'article 38 de la Loi sur les brevets. La Commission est d'avis qu'une telle
interprétation de l'article 60 des Règlements, au titre de l'article 50 de la
Loi sur les brevets, pourrait effectivement priver un demandeur du droit légal
qui lui appartient de revendiquer ce qu'il a le droit de revendiquer comme
étant nouveau bien qu'il ait omis de le revendiquer dans son brevet initial.
Il faut néanmoins établir ici une distinction à la situation où il n'y a pas eu
opportunité suffisante de revendication comme, par exemple, lorsqu'un demandeur
doit annuler des revendications afin de diviser la demande, et tente ensuite
par une demande de redélivrance d'obtenir des revendications relatives à cette
autre invention pour laquelle une demande divisionnaire devrait être déposée
conformément à l'article 38(2) de la Loi sur les brevets.
La véritable question consiste donc à déterminer si les revendications
ont nettement trait à une invention différente et distincte au titre d'un
objet ou d'une combinaison ne faisant pas partie inhérente de l'invention
présentement réalisée et décrite, et dont la protection devait être assurée
par le brevet initial. Il ne suffit toutefois pas que l'objet de nouvelles
revendications eût pu être revendiqué dans le brevet initial, parce qu'il était
suggéré ou indiqué dans la spécification; il doit de plus constituer des parties
ou portions de l'invention projetée, ou pour laquelle protection était
recherchée par le brevet initial, et ne pas simplement constituer une allégation
superflue ou abandonnée (voir l'affaire Northern Electric, susmentionnée). I1
est évident, en raison de déclarations émises par les Cours, dans les causes
précitées, qu'un brevet amendé doit avoir trait à la même invention sur laquelle
portait le brevet intial, et qu'un brevet de redélivrance présuppose des revendications
nouvelles pour des parties non revendiquées de l'invention réelle.
De plus, la prétention qui veut que les revendications "ne visent pas la même
invention", à cause des restrictions différentes prescrites dans les revendications
brevetées et dans les nouvelles revendications, ne semble pas tenir compte des
dispositions de l'article 38(1) de la Loi sur les brevets, en ce que le fait que
les revendications ne visent peut-être pas, la même invention, ne signifie pas
nécessairement qu'il nullifie la validité d'aucune de ces revendications brevetées
1 à 4 et les nouvelles revendications 5 à 10 réunissent un nombre d'éléments
communs, est par lui-même évidence de la corrélation des objets des deux groupes
de revendications.
Qui plus est, il semble clair que la présence ou l'absence de revendications
brevetées dans la demande de redélivrance, ou même l'invalidité des revendications
brevetées, ne devrait pas invalider la possibilité d'obtenir de telles revendications
nouvelles par redélivrance. Cette opinion s'appuie sur la décision rendue par
la Cous Suprême du Canada dans la cause de Curlmaster (susmentionnée)
selon laquelle une revendication brevetée fut jugée invalide en raison de la
technique antérieure et une nouvelle revendication fut accordée par redélivrance
pour 1 Invention réelle, ce an dépit du fait que la nouvelle revendication portai
essentiellement sur un objet différent de celui de la revendication invalidée
du brevet, ce qui n'empêcha pas la Cour de considérer que les dispositions
de l'article 50(1) concernant la même invention avaient été respectées.
Le brevet initial, tout en étant opérant en ce qui regarde les revendications
brevetées désignées ici comme revendications 1 à 4, est, selon les dispositions
prescrites par l'article 60(1) de la Loi sur les brevets, inopérant et défectueux
parce qu'il ne réussit pas à revendiquer autant de l'objet réellement inventé
que ce qui a été décrit par les nouvelles revendications 5 à 10 se ~apportant
à l'objet de l'invention, illustrées à la figure 5.
Dans les circonstances, par conséquent, la Commission est convaincue que l'objet
des nouvelles revendications n'outre passe pas les restrictions de l'invention
que le breveté a tenté de décrire et de revendiquer dans son mémoire original
et qu'il n'a pu faire parfaitement, et que la révision de l'affaire démontre
qu'il y a évidence suffisante afin de permettre de conclure que la disposition
légale concernant une même invention a été respectée.
La Commission recommande que la décision finale, portant le rejet de la demande
de redélivrance, soit retirée.
Le Président intérimaire
de la Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
Nous nous rallions aux constatations de la Commission d'appel des brevets
et infirmons la décision finale. La demande est retournée à l'Examinateur
pour la reprise de l'instruction.
Telle est notre décision
Le Commissaire des brevets
A.M. Laidlaw
Fait à Ottawa (Ontario)
le 16 février 197
Mandataire du demandeur
MMs. Gowling, MacTavish
Osborne & Henderson