DÉCISION DU COMMISSAIRE
NOUVEAUTE NON CONFORME AUX STATUTS: Simple amélioration esthétique
Le produit est déjà connu; la seule différence réside dans les motifs dont
"les entailles sont plus nombreuses et plus profondes" et qui sont faites à la
machine plutôt qu'à la main. Cette différence dans le motif ornemental, dont
la nouveauté réside uniquement dans l'aspect décoratif, et non dans une forme
utile à une fonction quelconque, est du domaine de l'artisan, et ne constitue
pas un objet d'invention brevetable.
DÉCISION FINALE: Confirmée
RELATIVEMENT à une requête de révision, par le
Commissaire des brevets, de la décision finale
de l'examinateur, aux termes de l'article 46 du
Règlement régissant les brevets.
ET
RELATIVEMENT à une demande de brevet, sous le
numéro de série 044,282, déposée le 28 février 19b9
au sujet d'une invention intitule:
PANNEAUX TEXTURISES
Agents du demandeur
MM. Kirby, Shapiro,
Curphey & Eades
Ottawa (Ontario).
Cette décision porte sur une requête de vision, par le Commissaire des
brevets, de la décision finale de l'examinateur, en date du 22 juillet 1971, au
sujet de la demande 044,282. Cette demande a été déposée au nom de Donal F. Luebs
et al et a trait à des "Panneaux texturisés".
Lors de l'instruction qui s'est termine par la décision finale, l'examina-
teur a refusé les revendications et la demande parce que l'objet d'invention
porte sur un produit connu. Dans sa décision, l'examinateur a déclaré:
Les revendications définissent un panneau dont la surface
est travaillée de façon à imiter un produit taillé à la main,
et qui est presque identique aux panneaux fabriqués selon les
méthodes conventionnelles. Les restrictions dimensionnelles
des entailles que définissent les revendications ne présentent
pas de différence brevetable étant donné qu'elles sont semblables
à celles qui peuvent être produites à la main à l'aide d'une
herminette ou d'une hache. Les revendications ne définissent donc
rien d'autre qu'un produit connu, soit un panneau taillé à la main,
et ne sont pas acceptables. Le plaidoyer du demandeur, portant que
la revendication est brevetable du fait que la restriction supplé-
mentaire dit simplement que le panneau est fabriqué à l'aide d'un
outillage automatique, n'est pas acceptable étant donné qu'il est
soutenu que: --"Pour que la revendication soit valable, il est
essentiel que l'objet de la revendication soit nouveau" et pré-
tendre qu'un procédé nouveau rend un produit nouveau et donner à
celui-ci une "qualité artificielle". En outre, l'argument du
demandeur selon lequel, en raiosn de la méthode de fabrication
mécanisée, les panneaux ont certaines caractéristiques que n'ont
pas les panneaux taillés à la main, manque de pertinence, comme
en témoigne ce qui suit.
Il est souligné q~ l'objet d'invention du demandeur a été décrit
comme imitant les entailles grossières faites dans un panneau
taillé- à main. Le demandeur a souligné que les brevets antérieurs
avaient été délivrés pour des procédés mécaniques qui donnaient un
produit fini d'une régularité monotone. Dans sa plus récente ré-
plique, le demandeur souligne que la surface est "façonnée automati-
quement par des lames rotatives" et prétend que la normalisation du
produit le rend brevetable. Les arguments sont donc contradictoires
et, comme il a été dit ci-dessus, il est considéré que, ni l'imita-
tion d'un travail manuel grossier, ni la normalisation des entailles
ne rend le produit brevetable.
Dans sa réplique en date du 24 août 1971, le demandeur a déclaré:
Les revendications qui figurent actuellement dans la demande portent
sur un "panneau texturisé simili-antique" et non sur un panneau
ayant l'aspect du fait main. Il est vrai que l'outillage automati-
que est réglé pour fabriquer des panneaux lamellaires, c'est-à-dire
à trois plis, cinq plis, etc., ayant l'aspect classique d'un
madrier solide équarri à la main, mais cet aspect extérieur est
l'unique ressemblance, si ressemblance il y a. Les panneaux usinés
sont faits de trois feuilles minces de bois collées en contrariant
les fibres et sont plus résistants et plus mi-nces que les planches
de bois plein taillées à la main, moins résistantes, qui pourraient
ordinairement être utilises à leur place. Il n'existe aucune
ressemblance entre les deux produits, si ce n'est l'aspect général.
Comme le souligne la dernière modification du 18 mai, les panneaux
ont une surface qui ne présente ni échardes, ni rugosités excessives;
ils sont plus faciles à nettoyer et les vêtements ou autres tissus
n'y accrochent pas. Les entailles faites par le dispositif du
demandeur sont beaucoup plus nombreuses et beaucoup plus profondes.
De plus, il n'y a pas de cannelures dans les planches taillées à la
main.
L'examinateur a rejeté toutes les revendications simplement
parce que le produit revendiqué ressemble à un autre article.
Un tel motif de rejet semble peu valable. Le produit, y
compris le panneau à trois plis et les entailles superfi-
cielles, est nouveau et mérite la protection conférée par
un brevet.
Après avoir étudié le motif de rejet énoncé par l'examinateur, ainsi que
le plaidoyer du demandeur, je suis convaincu du bien-fondé du rejet.
La revendication 1 de la demande décrit un fini texturisé comprenant de
multiples "méplats" se chevauchant à la surface d'un panneau de contreplaqué et
résultant de la diminution de l'épaisseur de cette surface. Conformément au
mémoire (page 1, lignes 1 à 13 et page 3, lignes 24 à 28) le fini obtenu imite
les marques de l'herminette sur un panneau taillé à la main, ce qui de toute
évidence n'est pas nouveau. Le fait d'obtenir ce fini sur un panneau de contre-
plaqué, plutôt que sur un panneau de simple épaisseur, semble insuffisant pour
rendre les revendications distinctes brevetables. Il est évident, compte tenu
du brevet américain 3,234,978 invoqué, que les panneaux de contreplaqué sont
texturisés en entaillant la surface du pli supérieur. En outre, la substitution
du contreplaqué au bois plein ne produit pas de résultat inattendu pour ce qui
est de la finition de la surface. Le demandeur le reconnaît dans son mémoire
LORSQU'il affirme aux lignes 19 à 22 de la page 1 que la méthode de texturisa-
tion qu'il utilise s'applique " à tout produit fibreux, plus particulièrement au
bois comme le contreplaqué, le bois d'oeuvre ou le bois densifié".
Dans la revendication 2, la restriction: ".., comprend des arêtes et des
creux pour imiter le travail fait par une lame irrégulière", est dénuée de sens.
Dans la revendication 3, la restriction suivante: " .lesdites arêtes ... paral-
lèles aux fibres du pli supérieur, et à angle droit avec le pli sous-jacent",
n'est qu'une allusion à une propriété normale du contreplaqué. Les restrictions
des revendications 4 à 7 n'ajoutent rien d'autre que des caractéristiques évidentes
et des limites dimensionnelles.
Les références à un "panneau à tois plis" et aux plis adjacents collés,
à fibres opposées, donnant ainsi une très grande solidité audit panneau", peuvent
être considérées comme une simple définition des caractéristiques bien connues
d'un panneau de contreplaqué ordinaire et ne sont donc pas pertinentes en termes
de brevetabilité. De plus, le passage suivant: "les entailles dans le panneau
sont beaucoup plus nombreuses et plus profondes" indique simplement une question
de choix.
Je suis convaincu qu'un artisan en ce domaine peut tracer des motifs
décoratifs ou ornementaux sur un panneau sans qu'il y ait pour autant invention
de sa part. Les articles dont la nouveauté réside uniquement dans l'utilisation
d'un dessin, d'un motif, d'une garniture ou du sens esthétique ne sont pas jugés
brevetables. Cependant, il demeure que les articles de forme particulière sont
brevetables lorsque ladite forme est utile à une certaine fonction.
Le demandeur a fabriqué un panneau qui n'est différent que par son
effet ou son aspect décoratif. J'estime donc qu'il n'y a pas nouveauté,
sauf pour l'aspect ou l'effet esthétique; de ce fait, l'objet revendiqué
ne peut être qualifié d'invention.
Je recommande que la décision de l'examinateur, de refuser la demande
pour manque de nouveauté, soit maintenue.
Le président de la Commission
d'appel des brevets
R.E. Thomas
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets et
refuse de délivrer un brevet. Le demandeur dispose de six mois pour interjeter
appel de cette décision, aux termes de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
Telle est ma décision,
Le Commissaire des brevets
A.M.Laidlaw
Fait à Ottawa (Ontario)
le 13 octobre 1971