DECISION DU COMMISSAIRE
NON-STATUTAIRE - Article 2 (d) de la Loi sur les brevets: Ordinateur programmé.
Un ordinateur programmé pour fonctionner d'une certaine manière est une machine
différente du même ordinateur programme pour fonctionner d'une autre manière.
Un procédé pour conditionner le fonctionnement d'un ordinateur peut être vala-
blement revendiqué. Un procédé pour commander le fonctionnement d'un ordinateur
ou pour faire fonctionner un ordinateur peut aussi faire l'objet de revendications
valables si celles-ci ne sont pas considérées comme redondantes. Un procédé
comprenant une utilisation nouvelle de l'ordinateur programmé peut être acceptable,
tandis qu'une revendication pour une nouvelle utilisation ne peut pas l'être.
DECISION FINALE: La politique. du Bureau a été modifiée.
*******************************
RELATIVEMENT à. une demande de révision, par le
Commissaire des brevets, de la décision finale
de l'examinateur, en vertu de l'article 46 du
Règlement régissant les brevets
ET
RELATIVEMENT à une demande de brevet portant le
numéro de série 961,392, déposée le 26 mai 1966,
pour une invention intitulée:
COMPTAGE DES BITS PREDETERMINES DANS UN MOT
DE DONNEES
Agents du demandeur
MM. Kirby, Shapiro, Curphey et Eades
Ottawa (Ontario)
****************************
Cette décision a trait à une demande de révision, par le Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur, en date du 25 juin 1971, sur
la demande portant le numéro de série 961,392. Cette demande a été déposée au
nom de Gerald Waldbaum et elle a trait au "Comptage des bits prédéterminés dans
un mot de données".
Le 20 octobre 1971, la Commission d'appel des brevets a tenu une audience
à laquelle le demandeur était représenté par M. Charles Curphey, l'agent d'Ottawa;
M. James W. Falk et M. Howard R. Popper, Bell Laboratories, New Jersey, E.-U. et
M. R.H. Barrigar, avocat d'Ottawa.
Lors de l'instruction qui s'est terminée par la décision finale, l'exami-
nateur a rejeté les revendications (seize en tout) parce qu'elles avaient trait
à un objet d'invention non brevetable selon les dispositions des articles 2(d) et
28(3) de la Loi sur les brevets.
Les faits sont les suivants:
Les revendications 1 à 8 et 11 à 13 inclusivement ont trait à une méthode pour
commander le fonctionnement d'une unité de traitement.
La revendication 9 a trait à un procédé pour le conditionnement du fonctionnement
d'une unité de traitement.
Les revendications 10 et 16 sont des revendications pour un appareil, en termes
de moyens et de fonction.
Les revendications 14 et 15 portent sur une nouvelle utilisation d'une unité
de traitement.
Les revendications les plus importantes se lisent ainsi:
1. Une méthode permettant de commander le fonctionnement
d'une unité de traitement de donnes de façon à
déterminer le nombre de 1 dans un mot de donnes; ladite
unité de traitement comprenant une mémoire pour le
stockage de mots de données et de mots instructions à des
adresses respectives; un moyen de commander normalement
l'exécution séquentielle de mots instructions se trouvant
à des adresses successives; plusieurs registres; un moyen
d'affecter des mots de données de la mémoire auxdits
registres; un moyen de faire subir des opérations logiques
aux mots de données contenus dans lesdits registres; et un
moyen déclenché par l'exécution d'un mot instruction
prédéterminé permettant d'examiner le mot de données contenu
dans un premier registre prédéterminé parmi lesdits registres,
de transformer en 0 le 1 le plus à droite du mot de données si
ledit registre contient au moins un 1, de commander un trans-
fert au mot instruction se trouvant à une adresse prescrite
si ledit premier registre ne contient que des 0 et d'affecter,
à un deuxième registre prédéterminé parmi lesdits registres,
l'adresse du mot instruction suivant si ledit transfert est
effectué; d'après les étapes suivantes:
(i) commander ledit moyen de stockage de façon à affecter
audit premier registre un mot de données de la mémoire dont
le nombre de 1 doit être compté,
(2) commander l'unité de traitement de données de façon à
faire exécuter une série de mots instructions identiques
audit mot instruction prédéterminé, et
(3) comparer l'adresse du premier de ladite série de
mots instructions au contenu dudit deuxième registre, lorsqu'un
transfert est effectué durant l'exécution de l'un des mots
instructions de ladite série, afin de déduire le nombre de 1
compris dans ledit mot de données.
9. Un procédé de conditionnement du fonctionnement d'une
unité de traitement de données permettant de déterminer les
nombres relatifs de 0 et de 1 d'ans un mot de données; ladite
unité de traitement de données comprenant une mémoire pour
le stockage de mots de données et de mots instructions
à des adresses respectives ; un moyen de commander
normalement l'exécution séquentielle de mots instructions
se trouvant à des adresses successives; plusieurs registres;
un moyen d'affecter des mots de données de l' mémoire
auxdits registres; et un moyen de commander le fonctionnement
de l'unité de traitement de données selon le mot instruction
en cours d'exécution; d'après les étapes'suivantes:
(1) commander ledit moyen de stockage de façon à
affecter au premier desdits registres un mot de données
de la mémoire dont les nombres relatifs de 0 et de 1 doivent
être déterminés;
(2) exécuter une série de mots instructions identiques,
permettant chacun de modifier le mot de données se trouvant
dans ledit premier registre, de façon à inverser la valeur de
son bit le moins significatif qui a une valeur prédéterminée,
et, si ledit premier registre ne contient que des bits de
la valeur opposée, de commander un transfert au mot instruction
se trouvant à une adresse spécifie et d'affecter au deuxième
desdits registres l'adresse du mot instruction suivant,
et
(3) commander la comparaison de l'adresse du premier de
ladite série de mots instructions au contenu dudit deuxième
registre, lorsqu'un transfert est effectué durant l'exécution
de l'un des mots instructions de ladite série, afin de déter-
miner les nombres relatifs de 0 et de 1 compris dans ledit
mot de données.
10. Une unité de traitement de données comprenant une
mémoire pour le stockage de mots de données et de mots
instructions à des adresses respectives; un moyen de commander
normalement l'exécution séquentielle de mots instructions se
trouvant à des adresses successives; plusieurs registres; un
moyen d'affecter des mats de données de la mémoire auxdits
registres; ladite unité de traitement de données étant programmée
de façon à déterminer les nombres relatifs de 0 et de 1 dans un
mot de données d'après les mots instructions stockés dans ladite
mémoire afin
(1) de commander ledit moyen de stockage de façon à affecter
au premier desdits registres un mot de données de la mémoire dont
les nombres relatifs de 0 et de 1 doivent être déterminés;
(2) d'exécuter une série de mots instructions identiques,
permettant chacun de modifier le mot de données se trouvant
dans ledit premier registre, de façon à inverser la valeur de
son bit le moins significatif qui a une valeur prédéterminée, et,
si ledit premier registre ne contient que des bits de la valeur
opposée, de commander un transfert au mot instruction se
trouvant à une adresse spécifiée, et
(3) de déterminer, d'après le nombre de mots instructions de
ladite série qui ont été exécutés avant ledit transfert, les
nombres relatifs de 0 et de 1 contenus dans ledit mot de
données.
14. Un procédé comprenant une nouvelle utilisation d'un
appareil de traitement de données à programme enregistré
et consistant en une mémoire adressable pour le stockage
de mots de données et d'instructions de traitement desdits
mots de données, un moyen d'exécuter lesdites instructions,
un moyen de transfert à une instruction affectée à une
adresse particulière par suite de l'exécution desdites
instructions et un moyen de comparer des onnées, y compris
lesdites adresses, obtenues de ladite mémoire, ladite
nouvelle utilisation étant le comptage du nombre de bits
d'un genre prédéterminé dans un desdits mots de données
et ledit procédé comprenant les étapes suivantes:
a) exécuter une instruction parmi une série d'instructions
affectées à des adresses successives de la mémoire pour
chaque bit dudit genre prédéterminé qui est décelé dans
ledit mot de données,
b) effectuer un transfert à une adresse de retour lorsqu'il
n'y a plus de bits dudit genre prédéterminé dans ledit
mot de données, et
c) comparer les adresses de la première et de la dernière
instruction exécute pour calculer le nombre de bits
dudit genre prédéterminé dans ledit mot de données.
15. Une nouvelle utilisation du registre d'instruction
d'un appareil de traitement de donnes à programme enre-
gistré, comprenant l'emploi répété dudit registre pour
stocker les adresses d'une série d'instructions, de telle
sorte que la soustraction de l'adresse de la première
instruction de ladite série de l'adresse de la dernière
instruction exécutée de ladite série permet de déterminer
le nombre de bits d'un genre particulier dans un mot de
données, d'après les étapes suivantes:
a) insertion dans ledit registre de l'adresse de la
première d'une série d'instructions affectes à des adresses
successives de ladite mémoire,
b) exécution d'une instruction de ladite série et progres-
sion de l'adresse se trouvant dans ledit registre chaque
fois qu'un bit dudit genre prédéterminé est décelé dans
ledit mot de données,
c) transfert à une adresse de retour lorsqu'il n'y a
plus de bits dudit genre prédéterminé dans ledit mot de
données, et
d) soustraction des adresses de la première et de la
dernière instruction exécutée de ladite série, pour calculer
le nombre de bits dudit genre prédéterminé dans ledit mot
de données.
Je voudrais d'abord souligner que dans le cas qui nous occupe, les
décisions de l'examinateur ont été complètes, appropriées et conformes aux
directives du Bureau des brevets concernant la brevetabilité des programmes d'or-
dinateurs, ou, pour être plus précis, des ordinateurs programmés et des procédés
de programmation.
Pluieurs rencontres ont eu lieu après l'appel, ainsi qu'avant et
après l'audience, pour étudier et débattre la politique à suivre par le Canada
relativement à la brevetabilité des programmes d'ordinateurs et la Commission
d'appel des brevets a été intimement liée à tous les aspects du problème.
Dans ses représentations écrites et verbales, le demandeur a déclaré
qu'il ne considère pas que les programmes d'ordinateurs sont un objet d'invention
brevetable aux termes de l'article 2(d) ou de tout autre article de la Loi sur
les brevets, ou que les instructions ou les listes d'instructions pour le fonc-
tionnement d'un ordinateur sont brevetables. La Commission est entièrement
d'accord avec cette déclaration et reconnaît que les revendications de la demande
ne définissent pas un programme d'ordinateur comme tel.
Le mot programme signifie qu'il s'agit d'une série d'étapes ordonnées
ou d'une liste d'instructions spécifiant les changements internes de l'état des
dispositifs physiques à l'intérieur d'une unité de traitement. Cette série
d'étapes ou liste d'instructions peut être enregistrée sur une variété de moyens
y compris des listes imprimées ou manuscrites sur du papier, des cartes perforées
ou des rubans de papier, des rubans magnétiques ou du câblage électrique. Quels
que soient la forme ou le dispositif utilisés pour enregistrer un programme, il
n'est pas brevetable en tant que programe. Voilà la conclusion à laquelle bien
des pays sont arrivés et je ne vois aucune raison pour que le Bureau des brevets
ait une opinion différente.
Comme il a été indiqué ci-dessus, les revendications du demandeur ont
trait à un procédé, un appareil et à une nouvelle utilisation. Je vais d'abord
traiter de l'appareil.
Sans entrer dans les détails du fonctionnement de l'invention, le de-
mandeur a pris une unité de traitement bien connue (j'utiliserai le mot "ordi-
nateur" pour plus de facilité) et il l'a associée à un système téléphonique pour
déterminer le volume de trafic téléphonique. L'ordinateur est programmé de
façon telle que sa mémoire centrale peut compter le nombre de lignes de jonction
occupées se trouvant sur un compteur d'appels de 23 lignes de jonction, appelé
compteur d'appels K. Le compteur d'appels indique les lignes de jonction
occupées en chiffres de 1 et les lignes de jonction libres en chiffres de 0.
Avant l'invention du demandeur, il a été déclaré que la façon normale
d'effectuer le comptage exigeait un compteur branché directement sur le
compteur d'appels K. L'ordinateur devait ensuite être modifié en le recâblant
ou en utilisant une technique de mise en mémoire qui nécessitait trois fois plus
d'opérations qu'il n'en faut dans la disposition présentée par le demandeur, qui
n'a aucune connexion directe entre le compteur K et la mémoire centrale et qui,
en outre, élimine le besoin de brancher un compteur sur le compteur d'appels K.
Il a été affirmé que le demandeur a obtenu un résultat inattendu
étant donné qu'il n'avait jamais été établi auparavant que cet ordinateur bien
connu pouvait fonctionner de cette manière, jusqu'à ce que le demandeur élabore
ce programme particulier. Le demandeur est d'avis que l'ordinateur programmé
est une machine fonctionnant d'une manière nouvelle et non évidente et qu'elle
est donc une machine nouvelle et par conséquent brevetable.
D'après mois, la question la plus importante à trancher dans ce cas est
d'établir si un ordinateur programmé d'une certaine façon est une machine différente
du même ordinateur lorsqu'il est programmé d'une autre façon.
En l'absence de précédents canadiens pertinents, le demandeur s'est basé
sur les causes britanniques et américaines suivantes:
Britanniques
Demande Badger Co. Incorporated (1970) R.P.C. 36
Demande de Gever (1970) R.P.C. 91
Demande de Slee & Harris (1966) R.P.C. 194
Américaines
In re Bernhart and Fetter 163 U.S.P.Q 611 (1969)
In re Prater and Wei 162 U.S.P.Q. 541 (1969)
In re Musgrave 167 U.S.P.Q. 280 (CCPA) (1970)
Se reportant aux causes britanniques, le demandeur a affirmé que les dé-
clarations du tribunal britannique ont une signification au Canada en raison de
la déclaration suivante dans la cause Lawson c. Commissaire des brevets 62 C.P.R.
101:
Il est donc accepté en principe que les conditions concernant
l'objet d'invention d'un brevet s'étendent également aux lois
britanniques et canadiennes et que les précédents établis par
les tribunaux de Grande-Bretagne font autorité au Canada.
(C'est le demandeur qui souligne).
Il a été déclaré que la revendication no 10 est une revendication pour
un appareil, copiée sur la forme de revendication trouvée acceptable par l'examina-
teur en chef du Bureau des brevets de Grande-Bretagne dans la cause Slee and Harris
(mentionnée ci-dessus). Il est noté que cette cause n'a pas été entendue par le
Tribunal d'appel des brevets étant donné qu'il n'y a pas eu motif d'appel.
Il est noté que les deux revendications pour un appareil mentionnent une
pluralité de "moyens" ayant trait aux pièces d'un ordinateur et qu'elles contiennent
en outre des précisions sur les fonctions de "commande", "d'exécution" et de "dé-
termination" en réponse à un programme. Les revendications pour un appareil sont
donc rédigées en termes de moyens et de fonction, mais à mon avis, elles ne doivent
pas être rejetées pour cette seule raison si l'objet d'invention n'est pas suscepti-
ble d'être revendiqué en termes de structure.
J'ai étudié la décision du Bureau des brevets de Grande-Bretagne dans la
cause Slee and Harris et les deux jugements du Tribunal d'appel des brevets de
Grande-Bretagne mentionnés ci-dessus, et j'en conclus que les deux organismes
admettent que les inventions portant sur des ordinateurs programmés constituent des
objets d'invention valables pour obtenir la protection conférée par un brevet. De
plus, il me semble évident que si certaines formalités doivent être respectées dans
la rédaction des revendications, rien dans les décisions du Tribunal d'appel n'impli-
que que les inventions portant sur des ordinateurs programmés ne doivent pas répondre
aux conditions normales de nouveauté, d'utilité et d'ingéniosité inventive. Le
Tribunal d'appel a trouvé qu'un ordinateur, programmé et commandé d'une certaine fa-
çon est en effet une sorte de fabrication au sens de la loi. L'ordinateur peut être
commandé pour fonctionner d'une manière évidente, auquel cas, bien entendu, aucun
brevet ne peut être conféré, ou il peut être commandé pour fonctionner d'une façon
nouvelle et non évidente, auquel cas un brevet pour un ordinateur ainsi commandé est
justifié. Dans la cause Gever (mentionnée ci-dessus), le juge Graham a exposé claire-
ment la déclaration d'invention du Bureau des brevets comme l'examinateur en chef
l'avait énoncée, et après l'avoir approuvée il a dit: "Je crois qu'il aurait aussi
fallu indiquer que l'invention revendiquée est un appareil de traitement des dates,
construit et arrangé de sorte que --- les trois étapes indiquées par M. Hudson peuvent
être effectuées en le faisant fonctionner".
En ce qui concerne la décision américaine de la United States Court of Customs
and Patent Appeals an cause In re Bernhart and Fetter (mentionné ci-dessus) le
tribunal a déclaré que "si une machine est programmée d'une certaine façon nouvelle
et non évidente, elle est différente physiquement de la machine sans ce programme;
ses éléments de mémoire sont disposés différemment. Le fait que ces changements
physiques sont invisibles à l'oeil ne doit pas nous porter à conclure que la machine
n'a pas subi de changement".
La cause Bernhart & Fetter correspond à la cause britannique Badger Co. Par
conséquent les deux pays ont gris les mêmes décisions quant à la brevetabilité des
ordinateurs programmés.
Il est reconnu que les décisions des tribunaux britanniques exercent une
influence considérable sur la jurisprudence canadienne. Il est aussi évident que
l'article 2(d) de la Loi sur les brevets ressemble fort à l'article 101 du United
States Code, Title 35-Patents.
En raison de ce qui précède, je suis arrivé à la conclusion que les reven-
dications 10 et 16, dans la mesure où elles définissent une machine programmée ou
commandée de façon à fonctionner d'une manière nouvelle et non évidente, ne sont pas
contraires à l'article 2(d) de la Loi sur les brevets.
Ayant déterminé que l'objet d'invention des revendications 10 et 16 entre
dans le cadre de l'article 2(d) de la Loi, le rejet aux termes de l'article 28(3)
est irrecevable parcs que 1es revendications n'ont pas trait à un principe scienti-
fique ou à une conception théorique.
En ce qui a trait aux revendications 1 à 8 et 11 à 13 portant sur une
méthode pour commander le fonctionnement d'un ordinateur, il est noté qu'il s'agit
d'un type de revendication qui ne semble pas recevable par le Bureau des brevets de
Grande-Bretagne parce que le résultat de la méthode serait un renseignement d'ordre
intellectuel et par conséquent ne serait pas un genre de fabrication.
Dans la cause qui nous occupe, je crois qu'il est approprié de considérer
comme semblables une méthode pour commander le fonctionnement d'une machine et une
méthode pour faire fonctionner une machine et, puisque Le Bureau canadien des brevets
accepte régulièrement des revendications pour des méthodes de fonctionnement, je ne
m'opposerais normalement pas à ces revendications. Cependant, étant donné que les
revendications pour un appareil dans cette demande distinguent l'invention en men-
tionnant des étapes relatives à une méthode, les revendications 1 é 8 et 11 à 13
devraient être vérifiées pour s'assurer qu'elles ne sont pas redondantes, bien que
si ce point n'a pas été soulevé dans la décision finale de l'examinateur, je ne
sois pas tenu de prendre position.
La revendication no 9 définit un procédé pour le conditionnement du fonction-
nement d'une unité de traitement. Il a été affirmé qu'il s'agit là d'un type de
revendication jugé recevable par le Tribunal d'appel des brevets en cause Badger.
Je n'ai aucune raison de m'opposer à cette revendication parce qu'elle ne definit
pas l'invention de façon adéquate.
La revendication no 14 définit un procédé comprenant une nouvelle utilisation
d'un appareil de traitement des données d'un programme en mémoire. La revendication
no 15 définit une nouvelle utilisation pour le registre des adresses du programme
d'un appareil de traitement des données d'un programme en mémoire. Dans la cause
Lane-Fox c. The Kensington and Knightsbridge Electric Lighting Co. Ltd. 9 R.P.C. 416,
le juge Lindley a dit:
D'une part, la découverte qu'une chose connue peut être
utilisée dans un but utile pour lequel elle n'a jamais
servi auparavant n'est pas en soi une invention brevetable,
mais, d'autre part, la découverte de la façon d'utiliser
une telle chose pour un tel but sera une invention breve-
table s'il y a nouveauté dans la façon de l'utiliser qui
se distingue de la nouveauté du but en question.
Cette déclaration étaye la pratique du Bureau des brevets de rejeter les
revendications ayant trait à une nouvelle utilisation et, à mon sens, la revendi-
cation no 15, n'est pas le genre de revendication appropriée étant donné qu'elle
ne fait que définit un but. D'autre part, la revendication no 14 peut être
considérée comme un genre de revendication recevable étant donné qu'elle définit
un mode d'utilisation de l'ordinateur connu, mais elle peut toujouts faire l'objet
de la même objection (redondance) dont j'ai fait mention en ce qui concerne les
revendications 1 à 8 et 11 à 13.
Pour conclure, je crois que la réponse à la question principale dont j'ai
parlé ci-dessus, est qu'un ordinateur programmé d'une certaine façon doit être
considéré comme une machine différente du même ordinateur lorsqu'il est programmé
d'une autre façon ou lorsqu'il n'est pas programmé. Par conséquent, je considère
que le rejet de l'examinateux aux termes des articles 2(d) et 28(3) de la Loi
sur les brevets est irrecevable et recommande que la décision finale soit
réformée.
Le président de la Commission
d'appel des brevets
R.-E. Thomas
Je souscris aux conclusions de la commission d'appel des brevets et réforme
la décision finale. La demande sera renvoyée à l'examinateur pour reprise de la
procédure d'examen.
Telle est ma décision,
Le Commissaire des brevets
A.-M. Laidlaw
Fait à Ottawa (Ontario)
ce 8e jour de décembre 1971