DECISION DU COMMISSAIRE
EXPOSE SUPPLEMENTAIRE: Date établie seulement sur des revendications.
Les revendications en soi ne peuvent pas être traitées comme une "divulgation"
aux termes des articles 52 et 53 du Règlement régissant les brevets, selon la
définition de l'article 2(e). Comme c'est le cas pour une demande, une date de
dépôt ne peut être la date à laquelle les revendications seules sont déposées.
DECISION FINALE: Confirmée
RELATIVEMENT à une demande de révision, par
le Commissaire des brevets, de la décision
finale de l'examinateur en vertu de l'article
46 du Règlement régissant les brevets.
ET
RELATIVEMENT à la demande de brevet no de série
833,291 déposée le 6 octobre 1970 pour une
invention intitulée:
PREPARATION DE PERCHLOROFLUOROPROPANES
Agents de brevets du requérant: MM. Smart & Biggar
Ottawa (Ontario)
La présente décision a trait à une demande de révision, par le Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur datée du 9 septembre 1970,
portant refus de l'exposé supplémentaire.
La Commission d'appel des brevets a entendu l'appel le 6 mai 1971. M. R.
Fuller représentait le requérant. Les faits sont les suivants:
La demande no 833,291 a été déposée le 6 octobre 1961 au nom de J.W. Clart
et al et a trait à la "préparation de perchlorofluoropropanes".
Au cours de l'instruction qui s'est terminée par la décision finale datée
du 9 septembre 1970, l'examinateur a rejeté l'exposé supplémentaire et les reven-
dications 6 et 7 appuyées par l'exposé supplémentaire, aux termes des articles 2(d),
28(1) et 29(2) de la Loi sur les brevets en considération des références suivantes:
Brevets américains:
3,235,612 le 15 février 1966 Anello et al
3,258,500 le 28 juin 1966 Swamer et al
Le 22 août 1967, l'examinateur a déclaré en vertu de l'article 45(2) de
la Loi sur les brevets qu'il y avait conflit entre la présente demande et les deux
demandes de brevets en co-instance 000,092 et 000,689. Le Bureau des brevets a
rédigé deux revendications identifiées R1 et R2, pour définir l'objet du litige.
Le demandeur a été avisé que les revendications R1 et R2 n'avaient été rédigées
que pour définir le conflit de priorité et ne pouvaient s'appliquer à sa demande
parce qu'elles étaient trop larges pour sa divulgation.
A ce moment, le demandeur de la demande de brevet no 000,689 s'est retiré
du conflit; mais celui de la demande 000,092 est resté partie du conflit.
(Les demandes et les réponses faites en vertu de l'article 45, entre le 15 janvier
1968 et le 9 avril 1969, citées dans la décision, ont été omises.)
Le 29 avril 1969, l'examinateur a exigé que le demandeur retire les
revendications R1 et R2 qui lui avaient été soumises seulement pour le mettre au
courant du conflit.
Le 4 juillet 1969, le demandeur a répondu en annulant les revendications
litigieuses et en les représentant sous forme des nouvelles revendications 6 et 7,
appuyées par un exposé supplémentaire présenté au même moment. Le dépôt officiel
de l'exposé supplémentaire a été enregistré le 4 juillet 1969.
(Les demandes et les réponses faites entre le 4 juillet 1969 et le mois de
septembre 1970, citées dans la décision, ont été omises.)
Dans la décision finale, l'examinateur a fait remarquer que, bien que
l'exposé supplémentaire ait été limité à la seule divulgation des revendications
6 et 7 (revendications R1 et R2) telles que déposées au dossier le 22 décembre
1967, cette date ne peut pas être considérée comme la date de dépôt réelle de
l'exposé supplémentaire parce que les articles 52 et 53 du Règlement régissant les
brevets ne traitent que des modifications apportées à l'exposé. Autrement dit,
les revendications portant sur des matières qui tombent sous le coup de ces articles
ne peuvent pas être considérées comme la divulgation d'une invention. L'objet de
ces revendications doit d'abord être introduit dans l'exposé, conformément à
l'article 53, avant de pouvoir être prises en considération. bans ce cas, le jour
où l'objet de ces revendications a été introduit dans l'exposé est le 4 juillet
1969, par conséquent, la date de dépôt réelle de l'exposé supplémentaire est le
4 juillet 1969.
Dans une lettre datée du 16 décembre 1970, le requérant a demandé la
révision aux termes de l'article 46(5) du Règlement régissant les brevets. Dans
sa demande de révision, le demandeur réitère les arguments avancés dans sa réponse
précédente du 20 mai 1970, et présente les nouveaux arguments suivants:
a) puisqu'il n'existe aucun jugement des tribunaux
du Canada portant sur l'état de choses qui existe
dans le cas présent, le demandeur s'est basé sur
des décisions rendues par les tribunaux de
Grande-Bretagne parce que, dit-il, en l'absence
de décisions canadiennes, les décisions
britanniques font autorité. A l'appui
de ses arguments, le demandeur a cité
les cas de jurisprudence suivants:
1) Lawson c. le Commissaire des brevets -
Cour de l'Échiquier 1970.
2) Tennessee Eastment Co. c. le Commis-
saire des brevets - Cour de
l'Échiquier 1970.
3) Moser c. Marsden 13 R.P.C. 24.
4) George Hattersely & Sons Ltd. c. George
Hodgson Ltd. (1904) 21 R.P.C. 525.
Les deux premiers cas de jurisprudence sont cités par le demandeur pour
étayer sa prétention que les décisions des tribunaux britanniques font autorité
lorsqu'il n'y a pas de décisions rendues sur un sujet donné par les tribunaux
canadiens. Les autres décisions sont citées à l'appui de la position adoptée
par le demandeur, savoir: puisque le Commissaire a permis de modifier la demande
de façon à y inclure les revendications concurrentes, ces dernières devraient
être considérées comme faisant partie du mémoire descriptif original et
l'alignement des parties formelles du mémoire descriptif (exposé et revendica-
tions), pour qu'elles coincident les unes avec les autres, ne devrait pas être
entravé par une simple formalité. Le mémoire descriptif au complet peut être
considéré comme la définition de l'invention, et une fois ce concept inventif
bien établi, spécialement grâce à la décision du Commissaire d'autoriser
l'addition des revendications litigieuses, toutes les parties du mémoire des-
criptif doivent être considérées comme un tout et être alignées les unes par
rapport aux autres. Ce faisant, seule serait modifiée la formulation de l'in-
vention totale for clairement définie par le demandeur au cours de l'instruction
de la cause.
b) Quant à la question de savoir si la modification de
l'exposé a été faite en temps opportun relativement à
la divulgation d'une pratique antérieure après que les
revendications concurrentes aient été copiées par le
demandeur, ce dernier prétend que l'exposé a été modifié
au moment où le mémoire descriptif (revendications plus
exposé) a été modifié. Il invoque de plus à l'appui de
sa théese la décision rendue par le juge Collins (cas
de jurisprudence no 4 précité) stipulant que la demande
tout entière doit être considérée comme un tout définis-
sant l'invention, ainsi que la position de Lord Watson
(cas de jurisprudence no 3 précité) selon laquelle "...
les revendications modifiées doivent être considérées
comme si elles avaient fait partie de la demande origi-
nale...". Ainsi, la modification d'une partie du mémoire
descriptif (c.-à-d. les revendications) doit être consi-
dérée comme la modification de l'autre partie du mémoire
(c.-à-d, l'exposé) au moins en ce qui a trait à la date
réelle d'une telle modification.
c) Finalement, le demandeur déclare, après avoir
analysé les paragraphes (1 (a)), (3), (4), (5),
(7) et (8) de l'article 45 de la Loi sur les
brevets, qu'une fois le conflit déclaré, le
Commissaire n'a aucun pouvoir discrétionnaire aux
termes de la Loi sur les brevets de ne pas
reconnaîtxe les revendications faites par le
demandeur parce qu'elles sont concurrentes.
Après avoir examiné les raisons du rejet énoncées par l'examinateur,
ainsi que les arguments écrits et verbaux présentés par le demandeur, je suis
convaincu que le rejet est bien fondé.
A l'audition de in cause, l'agent de brevet du requérant, M. Fuller, a
très habilement présenté le cas du demandeur en approfondissant et en mettant en
valeur certains points relevés au cours de l'instruction.
La principale question à résoudre est: quelle est la date réelle de
l'exposé supplémentaire?
L'article 2(e) du Réglement régissant les brevets se lit comme suit: (Cité)
L'article 53 du Règlement régissant les brevets se lit comme suit: (Cité)
Il est évident d'après la définition de "divulgation" (ou "exposé") donnée
à l'article 2(e) du Réglement régissant les brevets et d'après l'article 53 dudit
Réglement que les revendications relatives à une matière qui tombe sous le coup
des articles 52 et 53 du Réglement régissant les brevets ne peuvent être considérées
comme faisant partie de la divulgation d'une invention. L'objet de ces revendi-
cations doit d'abord être introduit dans l'exposé, conformément aux dispositions
de l'article 53, avant que lesdites revendications puissent être considérées comme
en faisant partie.
Je trouve que l'objet des revendications 6 et 7 n'a pas été présenté par
le demandeur comme une modification de l'exposé, mais plutôt par le Bureau des
brevets en tant que revendications R1 et R2 pour définir le conflit de priorité
seulement. Cela est clairement établi dans la décision datée du 22 aoùt 1967, aux
termes de l'article 45(2). Lorsque le demandeur a inclus les revendications R1
et R2 dans son exposé, le 22 décembre 1967, afin de définir le conflit, il n'a pas
dit que ces revendications faisaient partie de son exposé. Il est aussi très
évident qu'à ce moment son exposé ne corroborait pas ces revendications.
A l'audience, l'agent de brevet du requérant a souligné qu'aux termes
de l'ancien article 68 du Règlement régissant les brevets, aucune modification ne
pouvait être faite pendant des procédures de conflit. Depuis bien des années, la
pratique courante est d'accepter qu'un exposé supplémentaire soit déposé pour
obtenir une date de dépôt réelle, même s'il ne peut pas être inclus au dossier au
moment du dépôt.
En ce qui a trait aux décisions des tribunaux britanniques citées par le
demandeur à l'appui de sa position, savoir: puisque le Commissaire a permis la
modification de façon à inclure les revendications concurrentes, ces dernières
devraient être considérées comme faisant partie du mémoire original, je trouve les
décisions citées non pertinentes puisque leur objet n'a aucun rapport avec les
modifications de l'exposé définies à l'article 53 du Règlement régissant les
brevets.
Je m'attaquerai maintenant à la position du demandeur selon laquelle une
fois le conflit déclaré, le Commissaire n'a pas suffisamment de pouvoir discrétion-
naire, d'après la Loi sur les brevets, pour refuser les revendications faites par
le demandeur, pour raison de conflit. Je ne vois pas comment cette position peut
être soutenue dans le Cas présent. Les revendications concurrentes ont été reje-
tées après que le conflit ait été dissipé, et afin de triompher de ce rejet, ie
demandeur, après avoir annulé les revendications concurrentes, a déposé un exposé
supplémentaire et a représenté ces revendications sots les numéros 6 et 7, appuyées
par l'exposé supplémentaire. Le présent rejet n'est pas fondé sur le fait que ces
revendications étaient concurrentes, mais sur le fait que la date réelle du dépôt
de l'exposé supplémentaire est de deux ans postérieure à celle du dépôt des deux
brevets américains cités.
Je me permets d'attirer l'attention du demandeur sur sa réponse du 15 mai
1968 dans laquelle il évoquait deux brevets américains, et déclarait:
Le brevet américain no 2,745,866 indique
substantiellement que le même procédé catalytique
peu être appliqué à des températures de 125 à
600.degree.C, la seule différence entre cette référence
et le brevet américain no 2,435,143 précité étant
l'utilisation de fluorure de chrome qui s'oxyde
in situ, apparemment au contact de l'oxyde du
composé catalytique à base de chrome.
Ainsi, l'antériorité du principal procédé des
revendications concurrentes est établi dans le
brevet américain no 2,436,143, la seule différence
étant l'échelle de température. J'estime que la
température plus élevée employée dans les revendi-
cations concurrentes n'ajoute aucune limitation de
caractère inventif, mais constitue seulement une
variante d'un procédé bien connu dans le domaine
catalytique, spécialement décrit dans le brevet
américain no 2,745,866.
Pour ces motifs, je demande respectueusement que
le conflit soit dissipé pour toutes les parties
en cause et que toutes les revendications restant dans
les mémoires descriptifs soient rejetées en raison
des brevets américains déjà mentionnés.
Je trouve ici que le demandeur soutient que l'objet en question ne
constitue pas une invention.
Le demandeur a soutenu qu'une fois les revendications 6 et 7, non
corroborées par l'exposé ont été ajoutées à la demande, cela lui donnait le droit
à partir de ce jour d'introduire l'objet de ces revendications dans l'exposé à
une date ultérieure. Cela n'est vrai que dans le cas des revendications déposées
dans la demande originale. D'autre part, si des revendications seules étaient
déposées avec une demande originale, aucun numéro ni date ne serait attribué à
la demande puisqu'il s'agirait alors d'une demande incomplète. De la même façon,
si des revendications seules sont déposées à n'importe quel moment après la date
de dépôt originale, aucune date d'exposé supplémentaire ne peut être attribuée
a ces revendications.
J'en conclus que les revendications présentées ici comme étant
corroborées par l'exposé supplémentaire devraient porter la date de l'exposé
supplémentaire, date à laquelle l'objet des revendications 6 et 7 a été
introduit dans l'exposé, c.-à-d. le 4 juillet 1969, et non pas la date à
laquelle les revendications ont été rédigées pour contester un conflit, avec
la mention qu'elles n'étaient pas corroborées par l'exposé et ne pouvaient pas
être accordées au demandeur.
Je suppose que les deux brevets américains délivrés en 1966 des réfé-
rences pertinentes en ce qui concerne les revendications puisque le demandeur
n'en a contesté que la date.
Je recommande que la décision de l'examinateur de rejeter les revendi-
cations 6 et 7 corroborées par l'exposé supplémentaire (dont la date de dépôt
réelle est le 4 juillet 1969), en vertu des articles 28(1) et 29(2) de la Loi sur
les brevets eu égard à la pratique antérieure, soit maintenue.
Le président
Commission d'appel des brevets
R.E. Thomas
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets et
rejette les revendications 6 et 7. Le demandeur dispose de six mois pour inter-
jeter appel de la présente décision, aux termes de l'article 44 de la Loi sur
les brevets ou pour retirer l'objet rejeté.
Telle est ma décision.
Le Commissaire des brevets
A.M. Laidlaw
Fait à Ottawa (Ontario)
le 17 mai 1971