DECISION DU COMMISSAIRE
RELATIVEMENT à une demande de révision, par le
Commissaire des brevets, de la décision finale de
l'examinateur, en vertu de l'article 47 du Règlement
régissant les brevets (avant la modification par décret
du conseil, C.P. 1970-728, entrée en vigueur le 1er juin
1970).
ET
RELATIVEMENT à une demande de brevet, numéro de série
850,482; déposée le 31 mai 1952 pour une invention
intitulée:
XEROGRAPHIE EN COULEURS PAR RAIES SUCCESSIVES
Agents de brevets pour le requérant: MM Gowling & Henderson
Ottawa, Ontario.
La présente décision porte sur une demande de révision, par le Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur portant refus des revendica-
tions 1 à 4 inclusivement, de la demande no 850,482. Cette demande de révision
a été faite, en date du 8 mai 1970, aux termes de l'article 47 (3) du Règlement
régissant les brevets (avant sa modification par décret du conseil, C.P. 1970-728
entrée en vigueur le ler juin 1970).
La Commission d'appel des brevets a révisé l'instruction de cette demande
et les faits sont les suivants:
La demande de brevet no 850,482 a été déposée le 31 mai 1962 au nom
de W.E. Bixby et porte sur la xérographie en couleurs par raies successives, et
particulièrement sur une méthode de reproduction de l'image comprenant la
fragmentation prismatique d'une image lumineuse en une série de raies spectrales,
et l'illumination d'une plaque xérographique photosensible, lesdites raies
spectrales formant l'image électrostatique latente correspondante.
L'examinateur a présenté son rapport sur ladite demande le 22 avril
1964. A défaut de référence pertinente relativement aux techniques antérieures,
le refus est fondé sur la non conformité aux articles 25 et 22 (2) du Règlement
régissant les brevets. L'examinateur a aussi invoqué l'article 39.
Dans sa réponse du 22 octobre 1964, le demandeur a énuméré les références
citées au cours de l'étude de la demande correspondante déposée aux États-Unis.
L'exposé et les revendications ont été rectifiés de façon à faire échec au rejet
des examinateurs et à satisfaire au Règlement. Le demandeur a analysé en détail
la technique antérieure, et sollicité l'acceptation des revendications rectifiées.
Dans son rapport du 15 août 1967, l'examinateur a refusé les
revendications 1 à 4 inclusivement et la revendication no 19 parce
qu'elles sont trop larges et qu'elles ne définissent rien qui ne figure
déjà dans les deux publications présentées par le demandeur dans sa réponse
précitée. Les revendications 3, 10 et 13 sont aussi rejetées parce qu'e-les
ne sont pas suffisamment explicites au sens de l'article 36 (2) de la Loi
sur les brevets.
Dans sa réponse du 8 fébrier 1968, le demandeur a rectifié les
revendications 3, 10 et 13, ajouté les nouvelles revendications 12 à 21
et 31 à 37, et soutenu qu'elles devaient être acceptées puisque les systèmes
de microfispersion cités dans les antériorités se limitaient à la photographie
et n'avaient pas encore été appliqués à la xérographie. Il a aussi fait
remarquer que la microdispersion n'avait jamais été développée au stade
pratique en photographie.
Dans sa décision du 7 mai 1968, l'examinateur a subdivisé les revendi-
cations en six groupes d'objets différents et il a indiqué comment les
revendications doivent être limitées àune seule invention, en vertu de l'article
38 (2) de la Loi sur les brevets et de l'article 60 (1) du Règlement régissant
les brevets. La revendication no 28 a aussi été rejetée pour irrégularité.
Dans sa réponse du 31 octobre 1968, le demandeur a annulé tous les
objets sauf deux, y compris la revendication no 28, se conformant ainsi aux
exigences du rapport précédent de l'examinateur.
Le quatrième rapport de l'examinateur, daté du 14 février 1969, fait
mention des antériorités suivantes:
RCA Review: sept. 1958 Rydz
Brevet américain no 2,278,940 7 avril 1922 Murphy
Brevet canadien no 357,742 12 mai 1936 Prienerstorfer
Brevet canadien no 93,040 9 mai 1905 Drac
Les revendications 1 à 5 ont été rejetées parce qu'elles sont trop larges
et qu'elles ne constituent pas un objet brevetable par rapport aux antériorités.
Ces revendications ont aussi été rejetées parce que l'utilisation des techniques
de séparation prismatique des couleurs dans des procédés électro-photographiques,
comme la xérographie, est un procédé évident.
Dans sa réponse du 12 mai 1969, le demandeur rejette cette objection de
l'examinateur en disant que le brevet Rydz est expérimental, qu'il ne stipule
pas clairement que la photographie et la zérographie sont des techniques analogues,
et que les revendications 1 à 5 ne sont pas anticipées dans cette référence et
qu'elles ne sont pas non plus évidentes par rapport à cette dernière. Il a aussi
ajouté qu'il était injustifié de combiner des références ne portant pas sur des
techniques analogues.
Dans son rapport du 24 juin 1969, l'examinateur a encore une fois rejeté
les revendications 1 à 5, en vertu des références précitées, et a fait remarquer '
que le brevet Rydz porte sur des méthodes électro-photographiques, analogues à
la zérographie, et que ce brevet utilise une technique de séparation de la couleur
qui fait appel à des filtres pour réduire l'information aux trois couleurs de
base et amener le débeloppement de raies de couleur dans le procédé électro-
photographique. L'examinateur soutient qu'il,y a évidence dans le fait de
remplacer les techniques de séparation de la couleur de Rydz par les
techniques de séparation prismatique de Drac, Murphy ou Preinestorfer.
Dans sa réponse du 9 septembre 1969, le demandeur s'oppose à cette
objection, déclare que les revendications rejetées ne sont pas anticipées
dans une seule des références et que l'examinateur les a injustement combinées
pour appuyer son rejet. Le demandeur prétend que la combinaison des références
n'est pas évidente, qu'elle est inexploitable et non anticipée. Le demandeur
reprend chaque référence en détail et commente les raisons pour lesquelles ces
combinaisons ne sont pas exploitables.
Le dernier rapport de l'examinateur, daté du 1er février 1970, est
basé sur l'article 46 du Règlement régissant les brevets et devient la
"décision finale". Ce rapport est essentiellement le double du rapport du
24 juin 1969, sauf qu'il ne stipule que le rejet des revendications 1 à 4.
Le 8 mai 1970, le demandeur a demandé une révision de l'instruction
par le Commissaire des brevets. Le demandeur a présenté des arguments pour
réfuter le rejet final, ce sont les mêmes que ceux qu'il avait présentés le
19 septembre 1968, avec une analyse plus détaillée des références. Il est
a noter que l'examinateur n'a jamais rejeté les revendications pour cause
d'anticipation ou manque de nouveauté.
Après une étude attentive des motifs de rejet invoquées par l'examinateur,
ainsi que de tous les arguments présentés par le demandeur, je suis convaincu
que le rejet des revendications 1 à 4 est bien fondé.
Le débat se situe autour de la phrase: c'est un procédé évident que
d'appliquer certaines techniques d'exposition photographique, comme la techni-
que de séparation des couleurs, à des procédés électro-photographiques, comme
la xérographie.
L'étude des antériorités démontre que le brevet Rydz et al. (R.C.A.
Review, septembre 1958) porte sur un procédé électrographique pour la
production d'imprimés en souleur. Les techniques de séparation des couleurs
à l'aide de filtres sont décrites aux pages 473 à 477. Ce procédé de séparation
des couleurs donne toutes les informations sur les trois couleurs de bases pour
chacune des régions de l'image.
Le brevet canadien Drac, no 93,040, divulgue une façon de produire
trois négatifs, chacun d'eux représentant une couleur différente. L'image
est séparée par prismes et lentilles .
Le brevet américain Murphy, no 2,278,940, porte sur des moyens de
reproduire des images en couleur à l'aide d'un prisme de dispersion pour
ainsi diriger la lumière de l'image à reproduire sur différents éléments
photosensibles. Des signaux électriques sont modul.s selon le flux de
lumière reçu par les éléments photosensibles. Ces signaux modulés
contrôlent des fusils de peinture qui peignent une image couleur
correspondant à l'image originale.
Le brevet canadien Preinerstorfer, no 357,742, porte sur la
production et la reproduction de photos couleur, particulièrement de
films. L'image lumineuse est séparée de façon prismatique en raies
spectrales projetées sur une couche photographique.
La revendication no 1 de la demande se lit comme suit:
Une méthode pour reproduire une image en séparant cette
image lumineuse en raies spectrales, et en illuminant une
plaque xérographique sensible à l'aide de ces raies spectrales
pour former l'image électrostatique latente correspondante.
Il est évident que cette revendication reprend celle du brevet Rydz et al.,
sauf pour ce qui est de la technique de séparation (prismatique) des couleurs.
L'étape faisant appel à un prisme pour séparer l'image lumineuse en
raies spectrales constitue-t-elle une invention? Rydz utilise une technique
de filtres. Il y a bien d'autres façons de séparer une image lumineuse en ses
couleurs de base. Dans les trois brevets précités, l'image lumineuse est
séparée de façon prismatique en raies spectrales.
Le demandeur prétend "qu'il n'y a aucune analogie entre les procédés
photographiques et les procédés xérographiques" (à la page 7 de sa lettre du
8 mai 1970). Cependant, le IRE (Institute of Radio Engineers) n'est pas de
cet avis, et dans sa publication "Standards on Electrostato-graphie Devices,
1961" (approuvée le 4 avril 1960), page 619 des procès-verbaux de mars 1961,
définit la "xérographie" comme étant "la branche de l'électrographie électrostatique
qui utilise un agent isolant photoconductif...pour produire une chose visible".
Il est de plus reconnu que ce procédé applique certaines techniques d'exposition
photographique comme l'exposition par un système de lentilles, par contact et
par balayage des plaques xérographiques. Cela n'implique que la substitution
d'un agent photosensible (xérographique) à un autre (photographique). Il est
évident que les temps de pose, l'intensité de lumière, la réponse spectrale, etc.
varient d'après l'agent utilisé. Il est aussi évident que l'électro-photographie
donne une image électrostatique latente alors que la photographie donne une
image chimique latente. Je considère donc qu'il y a bel et bien analogie
entre les procédés photographiques et les porcédés de xérographie.
Les revendications 2 à 4 comprennent une étape complémentaire de
développement de l'image latente. Cette étape est nécessaire pour obtenir
une image visible. La revendication no 2 décrit l'étape du développement
en termes si généraux qu'elle ne définit rien de plus que le procédé de
développement en trois couleurs de base de l'image structurée, décrit dans
le brevet Rydz et al. La revendication no 3 porte sur une étape évidente.
La revendication no 4 qui dépend de la revendication no 3 ne fait qu'établir
une limite pour un appareil, déja contenue dans le brevet Preinerstorfer.
Les revendications 1 à 4 ne sont pas des revendications spécifiques
et elles sont vraiment rédigées en termes très généraux. La substitution
d'une technique prismatique telle que revendiquée n'entraîné aucune fonction
nouvelle ou aucun nouveau résultat avec les éléments de la combinaison.
D'après les références citées, je suis convaincu qu'il s'agit d'une
étape évidente de simplement remplacer les techniques de séparation des
couleurs telles qu'utilisées par Rydz et al., par une technique très bien
connue de dispersion prismatique de la couleur décrite dans les brevets Drac,
Preinerstorfer ou Murphy, pour en arriver à une "solution large" d'une méthode de
reproduction de l'image telle que définie dans les revendications 1 à 4.
Je trouve que l'objet de ces revendications manque d'ingéniosité inventive
par rapport aux antériorités, et je confirme le rejet de l'examinateur. Les
revendications 1 à 4 sont rejetées.
Président
Commission d'appel des brevets
R.E. Thomas
Je souscris aux conclusions de la Commission d'appel des brevets. Le
rejet des revendications 1 à 4 est confirmé. L'instruction de la demande
se poursuivra normalement pour le reste des revendications.
Telle est ma décision
Le Commissaire des brevets
A.M. Laidlaw
Fait à Ottawa (Ontario)
le 3 novembre 1970